Forum de FilmDeCulte

Je mets pas l'affiche elle est honteuse.



En France, un commissariat est le théâtre d’un face à face entre la police et les habitants de la ville. Par le prisme de l’institution policière, Commissariat fait le portrait d’une ville et de sa population.

Grand film malaimable et douloureux, mais probablement le film le plus important de l'année quant aux questionnements autour de la pratique documentaire et de la normalisation de la présence des caméras comme témoins de nos vies. Très grande intelligence de mise en scène, presque un questionnement de chaque plan quant à la validité de l'existence de ces plans, film pétri de doutes ontologiques donc film majeur. Chaque plan se sait contestable, pour mieux dire, à contester. C'est la qualité première du film. Pas le temps de développer, mais à quiconque réfléchit à la pratique documentaire, je recommande d'y aller avec le cerveau branché.

_________________

*

Nouveau marronnier zadien: le film qui s'auto-pense.

Groovy!

pollueur de merde

_________________

*

Alors je vais recentrer pour te faire plaisir :

J'ai pas vu d'extraits. Est-ce que ça ressemble aux Depardon style Délits flagrants, Muriel Leferle ou 10e chambre?

_________________

Forcément on y pense, mais ce n'est pas vraiment pareil, je pense que ça va plus du côté de Wiseman, parce qu'on ressent davantage la présence du filmeur, non qu'il intervienne ou quoi mais la mise en scène ne tend jamais à l'effacement de sa présence, il y a sans cesse la question du pourquoi on filme (au sens de : a-t-on bien raison de filmer?).

_________________

*

Ça me branche bien, mais les extraits vus sur Mediapart (notamment) me font un peu peur pour une vision en salle. La qualité de l'image est comment ? La photo a l'air absente, aussi. Et c'est du 4/3 ?

_________________
I think we're gonna need a helmet.

oui, très beau 4/3, photo qui joue sur la sous-exposition, donc pas dans les standards, c'est pas gai mais ça mérite la salle, yep.

le son m'a bcp impressionné, je me demande vraiment comment ils ont travaillé là-dessus

_________________

*

Et à Belfort dans la compétition documentaires, Virgil Vernier présente un moyen métrage sur un physionomiste de boîte de nuit.

Bon c'est vraiment excellent, quelque part entre Striptease et Depardon (peut-être un peu moins fulgurant dans le montage, mais toujours avec les choix de scènes qui font mouche). C'est souvent très drôle, tout autant que c'est souvent malaisant dans sa manière de présenter les paumés, les poivrots, les racistes sous un jour autre que pathétique. Ce que j'aime aussi beaucoup c'est que souvent on appréhende le "personnage" de la scène par sa voix, ses gestes et qu'on ne voit le visage que vers la toute fin, je ne sais pas si c'est volontaire mais c'est saisissant, comme pour la scène des deux soeurs avec l'une qui s'accroche et l'autre qui veut s'en débarasser.
5/6
L'affiche est en effet vraiment dégueulasse étant donné que le docu ne comporte que des normands et aucun rebeu à casquette.

Ptain je voulais le voir mais le film est quasiment invisible à Paris déjà, incompréhensible la vitesse avec laquelle il s'est fait évincé.

_________________
CroqAnimement votre

Tu peux encore le voir, il reste quatre séances sur toute la semaine.

Alors bouge-toi le cul!

J'ai réussi à le voir et je ne regrette pas. Vraiment un magnifique documentaire qui s'intéresse en permanence à ceux qu'il filme. En résulte un concentré bouleversant de détresse humaine avec des visages incroyables qui racontent à eux seuls des histoires terribles. Effectivement je trouve que le film est passionnant du point de vue du geste documentaire dans ce qu'il a envie de dire et de justement ne pas dire.
Je trouve juste dommage la dernière scène et sa référence facile au Kärcher car elle me paraît totalement déplacé et réoriente le film vers un discours qu'il s'était bien retenu d'avoir jusque là (référence politique, politique sécuritaire, racisme etc...). Là pour le coup je trouve que c'est une faiblesse d'avoir succombé au "bon mot". Mais bon ce n'est qu'un détail, c'est vraiment un chouette film pas facile et pas encourageant pour l'humanité mais toujours digne et beau.

5/6

_________________
CroqAnimement votre

Problème de ces films qui fonctionnent sur des saynètes : celles-ci sont inégalement intéressantes, celles qui le sont le plus ne sont pas forcément menées jusqu'à une forme de terme (elles sont trop courtes en gros) et les personnages défilent de manière un peu expéditive. C'est distrayant, comme une série, ou des podcasts les pieds sur terre sur France Culture. On prend un petit shot de réalité avant de faire dodo, un peu surpris de voir ces flics paternalistes qui disent à un jeune homme de se rabibocher avec sa compagne qui pleure.

Le message de Zad au début, rarement je lis des trucs aussi fumeux. Il n’y a même pas un exemple analysé qui rende le questionnement sur le filmage un peu concret. Le personnage du commissaire est frappant par exemple : il est juste filmé sans qu’on voie la personne à laquelle il s’adresse - ou alors plus tard. La question du point de vue semble de toute manière aléatoire, ou en fait liée tout simplement aux souhaits des personnes qui se succèdent dans le bureau - sans parler des autres contraintes matérielles - il est normal que pour un documentaire pris sur le vif le contrechamp n’existe pas même s’il existe ici de manière marginale lors de la mise en cellule). Pour le commissaire on imagine le fonctionnaire chevronné (proche de la retraite d’après une interview), paternaliste mais on se dit que la caméra le rend plus histrionique que de normal. Sa manière de gueuler est impressionnante. On ne le verra que comme ça, en passant, de toute façon faire un petit numéro devant une femme qui lui dit à raison “vous n’avez pas besoin de crier comme ca”. Sauf que elle a raison, caméra ou pas tandis que lui ne semble pas en avoir conscience même si on voit qu’il a l’air très humain (au sens de compréhensif).
Pourquoi ce genre de documentaire n'aborde jamais la question du regard, tout simplement... En mode confessionnal dans une télé-réalité. C'est une coquetterie que la télé-réalité aborde, même si c'est de manière hypocrite.