Forum de FilmDeCulte

Tombé dessus à la moitié sur France 2, difficile de faire plus beau.
Quand le soldat russe quitte le trappeur à la fin de la première partie, ses compagnons et lui lui rendent hommage en disant "on n'en fait plus des comme ça."
Evidemment, cela vaut pour le film qui est d'une sobriété absolument déchirante.

That's more like it.

Il est intéressant de voir Kurosawa revenir à la nature qui définissait une grande partie de son cinéma à ses débuts pour se ressourcer après un échec artistique et commercial qui le poussa au suicide. Simultanément, il est vraisemblablement obligé d'aller dans un autre pays - l'Union Soviétique en l'occurrence - pour pouvoir tourner un film. Par conséquent, il est difficile de ne pas prêter une dimension autobiographique à cette histoire d'un homme résolument dans son élément que le temps va destiner à disparaître, que ce soit à cause de sa vision défaillante (#métaphore) ou du monde moderne (son incapacité à s'adapter à l'univers urbain, le fusil flambant neuf qui aura peut-être causé sa perte).

Mais avant tout ça et même sans ça, il y a le récit d'une incroyable bromance entre un soldat russe et un homme des bois, l'expertise de ce dernier n'ayant d'égal que son humilité face à la nature et à ses codes, qu'il s'agisse de croyances de son peuple ou simplement de cet humanisme cher à l'auteur (on laisse de l'écorce pour la prochaine personne qui s'arrêtera dans cette cabane, on ne brûle pas la viande qu'on ne finit pas pour la laisser aux animaux qui passeront par là). Aux yeux de Dersou, tout est homme, tout est vivant. La rivière, le feu, le soleil, les animaux. Le film illustre sans doute plus qu'aucun autre dans le corpus de Kurosawa sa philosophie panthéiste.

Dersou, c'est Akira, c'est son cinéma, et on est tous le Capitaine, à explorer ce monde avec aplomb avant d'être invité à le découvrir à travers Dersou, à en apprécier la beauté mais aussi les codes, la dangerosité. La séquence de coupage d'herbes et la tempête, mais quelle folie! Après cette séquence, j'étais comme le Capitaine, j'aurais suivi Dersou au bout du monde. Et quand ils se retrouvent cinq ans après, j'étais à deux doigts de chialer. Mais déjà les russes ne sont plus les seuls à parcourir ces contrées, d'autres factions se disputent sur cette terre. Les soldats russes ne sont jamais en guerre mais il y a toujours une guerre quelque part, un conflit qui point, qui menace cette nature. Rien n'est éternel.

On sent que Kurosawa sait qu'il est dans la dernière partie de sa carrière, que ça va pas durer. Il met désormais 5 ans entre chaque film, il galère à être financé. Il craint de ne plus pouvoir déployer sa vision. Et ce serait dommage, vu comme il retrouve du poil de la bête ici, en retrouvant le Scope (enfin plus exactement du 2.20 étant donné qu'il s'agit de son seul film tourné en 70mm) et une approche plus naturaliste de la couleur.

Superbe film.

_________________

Grand film de mon enfance, très envie de le redécouvrir évidemment.

Mon top 4 Kurosawa:

- les 7 samouraï
- Barberousse
- entre le ciel et l'enfer
- Dessous Ouzala

Mais j'en apprécie beaucoup d'autres.

Pareil.
Ce film devrait d'ailleurs être au programme du CM2. Si tu rates la séance, tu passes pas au collège.

Rien que les Yojimbo/Sanjuro, Rashômon, Ran, Château de l'araignée, Forteresse cachée et je ne cite que ses films en costumes...
Niveau rapport quantité/qualité, qu'on ait ses préférences évidemment dans sa filmo et qu'on mette plein d'autres réals au-dessus, en dehors de Spielberg, ya personne d'autres qui ne me vienne en tête.