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Paris, aujourd'hui. Dorcy, jeune Noir chrétien, veut épouser Sabrina, une jeune Maghrébine. Mais Sabrina a quarante frères, et ce mariage cristallise un tabou encore bien ancré dans les mentalités de ces deux communautés : pas de mariage entre Noirs et Arabes.


On voit vraiment une tendance se tracer depuis 10 ans dans le cinéma français, qui partirait sans doute de L'Esquive pour passer par La guerre est déclarée, Polisse, Donoma sans doute (pas vu), et maintenant ça. Un truc parti du naturalisme qui n'est maintenant plus qu'une recherche aveugle d'énergie brute, qui en passe d'ailleurs toujours par cet électrochoc violence/rire, propre à rendre le spectateur hypersensible, émotion grande ouverte, prêt à avaler tout ce qu'on lui amène.

Rengaine, fort d'un pitch simple qui n'a pas besoin de milles explications, peut mener la chose assez loin : on en est plus qu'à des bouts de scènes collées selon l'envie (plus de scènes utilitaires, plus de scènes de transition, juste un best-of), ce qui précède ou ce qui suit s'invitant en écho, notamment par le son. C'est évidemment assez séduisant, parfois assez bordélique et facile aussi, mais il en sort de plutôt belles choses, comme cette structure "40 frères" qui donne l'impression d'une mini-fresque aux accents légendaires, tout en redessinant discrètement une cartographie d'un Paris bis. Le parcours n'est pas bête, assez cohérent (la confrontation finale qui a lieu absurdement, mais fort logiquement, dans les souterrains sombres par exemple). Au final, le film est surtout l'histoire du grand frère qui fait le lien entre tous ces lieux, et ça tombe bien puisque l'acteur en question est bon.

Après, comme pour certains films cités plus haut, le fait que le film coure après l'intensité, et seulement après ça, devient rapidement une limite. On ne compte plus le nombre de situations et dialogues incroyablement cons qui servent de terreau à ce cinéma-trip. Des trucs comme la séquences gore/tournage, avec le pseudo suspens de film d'étudiant, c'est juste absolument INTERDIT. On est pas au lycée, bordel. La caricature grasse (pourtant loin d'être illégitime) des tournage amateurs tendance art contemporain, la grossierté basique du cheminement psychologique du grand frère, l'archétypage maximum des persos secondaires, le couple central bien transparent... Tout ça pue la facilité, et au final c'est fatiguant. Encore une fois, le film se vit comme un tour de montage russe, et s'évapore aussi vite après la séance terminée.

Et puis autre chose : il serait sérieusement temps d'arrêter de se toucher quand on a réalisé un film en DV en mode guerrilla (oh mon dieu, juste les conditions de tournage de 99,99% des films étudiants !), et croire qu'on est révolutionnaire parce qu'on a fait trembler la caméra. Le texte de fin fait vraiment pitié... Je lis partout le réal dire qu'il y connaît rien, qu'il est pas réal - hypocrite ! La scène du début du comptage des frères, avec ce dispositif de cadrage si particulier, c'est de l'art brut tout innocent peut-être ? Assumez un peu les films que vous faites les mecs.

Merci Tom d'avoir créé ce fil. J'avais la flemme.

Je suis d'accord à 100% avec toi même si je serais moins sévère sur la fin. J'adore l'énergie et la liberté du truc, je kiffe comme tu dis le côté mythologique des 40 frères, le frère en chef est génial, et pareil je trouve le couple central un peu fade. Et - Noony a d'ailleurs pensé la même chose - t'oublie le film hyper rapidement, c'est très bizarre.

Au niveau des acteurs c'est globalement génial, mais c'est marrant comment les limites du jeu apparaissent dès que Djaïdani casse son dispositif et passe dans un truc cadré plus large et dont les plans durent plus longtemps (la confrontation finale, par exemple, avec ses horribles silences "lourd de sens"). En gros à partir du moment où tu cut-cut-cut, que tu film tout en méga gros plan, et que t'as pas à te soucier d'un rythme narratif classique, c'est facile d'avoir des acteurs qui jouent hyper bien. (je dis pas ça de manière moqueuse, c'est plutôt une leçon intéressante à tirer du film)

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Liam Engle: réalisateur et scénariste

Oui tout à fait. D'où une impression générale de poudre aux yeux qui persiste, même si on peut décemment pas attaquer le film sur ça (s'il a trouvé un moyen de fonctionner, tant mieux pour lui).

T'en penses quoi des autres films du genre, pour le coup ? (Polisse, Donoma, Kechiche, voire les Safdie si on veut trouver un équivalent de naturalisme énergique outre-atlantique...)

Kechiche je suradore (la plupart des films) parce que bah c'est hyper bien joué mais c'est aussi filmé, et puis je sais qu'il fait le film avec une équipe, des délais à tenir, etc. (ça devrait pas rentrer en ligne de compte, je sais, mais du coup je l'admire encore plus d'arriver à un tel niveau de jeu dans un contexte de tournage classique)

POLISSE je respecte vachement aussi dans l'ensemble, j'aime la liberté que s'accorde la réal.

Par contre Safdie je vois pas ce que c'est, et j'ai raté DONOMA en partie à cause du fait que ça dure 2h15.

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Liam Engle: réalisateur et scénariste

Ok. J'ai aussi plus d'admiration pour Kechiche (enfin le mec j'en sais rien, m'en fous, mais le duo L'Esquive / La graine et le mulet est beaucoup plus ambitieux et solide, il a pas besoin de rendre ses situations archétypales pour que son cinéma soit énergique, c'est super rigoureusement mis en scène sous les atours de caméra tremblantes... c'est zarb parce qu'a priori c'est le plus naturaliste de tous, celui qui devrait me toucher le moins).

Safdie c'est Daddy Long Legs / Lenny and the kids (Go get some rosemary) :

http://www.youtube.com/watch?v=ohFCUm8h5ug

Le film avec 36 titres...