Forum de FilmDeCulte

Histoire (s) de cinéma

A chaque Festival de Cannes, son film polémique. Long métrage sur l’indépendance de l’Algérie, Hors la loi de Rachid Bouchareb a réveillé une Croisette bien endormie jusque-là, mais pas, hélas, pour des raisons artistiques.

Jamais le Palais des festivals n’a jamais autant mérité son surnom de bunker. Dès le petit matin et la première projection réservée à la presse, l’atmosphère était particulière, les fouilles plus poussées et les services de sécurité aux aguets. Aux abords du Palais, la présence policière est impressionnante. De mémoire cannoise, jamais un film n’avait provoqué un tel déploiement sécuritaire. Depuis l’annonce de sa sélection dans la compétition officielle, Hors la loi de Rachid Bouchareb suscite la polémique sur la lecture de son seul scénario. Film sur l’indépendance de l’Algérie situé dans la France de l’après-guerre, la fausse suite d’Indigènes – on retrouve les mêmes acteurs mais dans des rôles différents – provoquera sans surprise quelques remous de par sa représentation forcément partiale – c’est une fiction – de faits historiques contestés.

La leçon de Carlos

Après une introduction déjà lourde de sens, le récit débute par la mise en images du massacre de Sétif du 8 mai 1945. Rachid Bouchareb n’a pas la prétention d’être historien, juste cinéaste, mais cela ne peut l’exempter de son entière responsabilité artistique. La séquence – et le film dans son ensemble – démontrent d’une vision de l’Histoire en noir et blanc, avec les Français comme méchants et les membres du Front de Libération Nationale comme héros d’une cause juste et universelle. L’auteur de London River nuance parfois son propos, avec le meurtre d’un partisan du MNA (Mouvement National Algérien) ou les discussions des cadres du FLN qui espèrent une répression sanglante de la population pour provoquer la révolte de celle-ci contre l’Etat colonisateur, mais il adopte clairement le point de vue politique d’Abdelkader, le frère le plus engagé dans la lutte pour l’indépendance. Quitte à asséner des slogans en guise de dialogues.

Il y a deux jours, le Festival de Cannes projetait Carlos dans son intégralité. Mise en scène par Olivier Assayas, la série a fait le pari de l’intelligence du spectateur, du portrait psychologique approfondi et de la leçon de géopolitique appliquée. Peut-être aveuglé par son sujet important, Rachid Bouchareb assène un discours, filme des intentions et des archétypes. A chaque frère son rôle et sa fonction : l’idéologue qui n’agit jamais physiquement, l’ancien militaire qui exécute ceux qui s’opposent au FLN et le voyou qui hésite à prendre partie. Ce dernier, Saïd, est le plus beau personnage du film. Jamel Debbouze apporte sa fragilité à ce petit frère qui rêve de boxe et de faire fortune, loin des combats de ses aînés, et qui sera bien malgré lui embarqué dans le tourbillon de l’Histoire.

2/6

Bon évidemment ça a été très applaudi... Voir un truc aussi carré après Carlos ne joue évidemment pas en la faveur de Bouchareb.
2/6