Le désastre.
En même temps, c'était TELLEMENT prévisible.
J'adore Kevin Smith. J'adore son univers, ses thématiques et ses références, j'adore ses dialogues, j'adore que derrière tout l'apparat de philosophages geek et les anecdotes graveleuses il y ait une réalité émotionnelle, des personnages humains. En gros, j'adore son écriture. Celle qui parvient même à faire briller certaines séquences de ses films les plus faibles.
Tout le monde sait que Smith touche pas une bille en mise en scène.
Avec les films, l'expérience et les budgets grandissants, il s'est amélioré, passant de plat/dégueu à plat/fonctionnel, et jusqu'à présent, ça suffisait, parce que l"intérêt, le génie de ses films, résidait dans l'écriture.
Why the FUCK would you go direct a movie you haven't written, Kevin?
Ca n'a aucun sens. Tu as déjà testé ton (absence de) talent à la caméra sur des épisodes de série TV que tu n'avais pas écrit. Et c'est très bien, la réa TV est tellement formatée que ta mise en scène plan-plan y avait parfaitement sa place.
Mais pourquoi aller réaliser ce scénario indigent qui se veut un renvoi - pire, un hommage - aux films d'action des années 80, et plus particulièrement les buddy movies, mais qui n'arrive pas UNE SEULE FOIS à capturer ce qui faisait la magie de ces fleurons '80s, qu'il s'agisse de la comédie ou de l'action.
Smith a pourtant l'habitude de laisser une dynamique de duo habiter ses films mais ici, entre un Tracy Morgan dont je comprendrais JAMAIS le succès et un Bruce Willis qui cachetonne comme JAMAIS un acteur a cachetonné dans sa carrière, il n'y a AUCUNE alchimie. Mec, t'as John McClane entre les mains, t'en fais Navarro. Et tu, Bruce? T'as oublié Le Dernier Samaritain?
Malgré quelques tentatives auto-réflexives (une des ultron-rares bonnes idées du film, mal exploitée d'ailleurs : Morgan qui se prend pour un personnage de film et ne cesse de citer des dialogues de film...et Willis qui, comme s'il s'agissait d'un film français, se sent obligé de préciser le titre du film référencé à chaque réplique), nul besoin de préciser qu'il n'y a rien du talent d'un Shane Black ici...repensez au Dernier Samaritain, à Last Action Hero ou Kiss Kiss Bang Bang qui jouent avec ces codes, ou à Hot Fuzz récemment...pensez à ces films et pleurez. Peut-être que si Smith avait écrit le film, il en aurait été autrement (Edgar Wright est après tout un direct héritier de Smith, le talent à la réa en plus) mais en l'état, il signe un monument de non-drôle qui se voudrait Le Flic de Beverly Hills (une des ultron-rares bonnes idées du film : Smith est allé embauché le compositeur Harold Faltermeyer pour scorer le film) mais qui n'est même pas Rush Hour.
Le pire, c'est que le film semble abandonner la comédie (déjà bas de plafond) à mi-chemin et sombrer dans du vulgaire polar eighties (avec trois-quatre touches d'humour pourrave) où les séquences s'agencent au départ n'importe comment puis après, juste sans intérêt.
Le casting des gueules secondaires est sympa (Jason Lee en cameo, Adam Brody, Kevin Pollak, même Seann William Scott) mais cruellement sous-exploité.
C'est pénible. Ca dure moins de deux heures, ça en paraît quarante.
0,5/6
Heureusement, Smith revient à l'écriture et surtout change de registre avec son prochain, annoncé depuis longtemps, Red State, "film d'horreur politique", pour revenir à ses amours premières avec une comédie dans le monde du hockey avec Seann William Scott.
Je crois encore en toi, Kevin. C'est difficile, alors me déçois pas.
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