la pièce, puis le film.
j'étais donc content de pouvoir découvrir un classique du théatre au théatre, d'autant que ça ne se monte pas si souvent que ça en france. du coup ce fut aux bouffes parisiens, avec christina réali. et c'était mitigé mais quand même très impressionnant. impressionnant parce que c'est une pièce incroyable, d'une richesse émotionnelle et thématique impressionnante, une écriture parfaite, tout ça. et porté par christina réali, que je n'avais jamais vu jouer je crois, et qui était magnifique, bouleversante, j'ai été totalement conquis. et mitigé parce que la pièce est quand même totalement dans son jus américain, dans les années 50, et que de fait joué en français à paris en 2024 avec des intermittents c'est un peu compliqué. et autant avec christina l'alchimie est parfaite et ça se fait, autant les autres acteurs c'était parfois plus chaotique, à ne pas oser jouer les amerloques parce que c'est un peu ridicule mais un peu quand même mais bon on va quand même rentrer après dans son studio parisien... ça ne marchait pas très bien tout le temps.
voir le film rapidement après était donc parfait, puisque le film a été fait dans la foulée immédiate de la pièce, qui avait été mise en scène par le même kazan * avec le même brando **, et que le jus est donc d'origine.
et c'était donc d'autant plus spectaculaire, ce texte d'une puissance folle, ce mélodrame riche complexe et bouleversant, porté par une mise en scène élégante, précise, et forte. je n'ai rien contre le théâtre filmé - mais c'est marrant comme il n'y a jamais cette impression là, ils sortent lorsque c'est nécessaire, mais sinon c'est simplement un presque huis-clos - qui fait donc parfaitement sens - dans un décors parfaitement conçu et exploité. et à l'intérieur de ça, tout est iconique, à commencer évidemment par marlon brando qui est à couper le souffle, chaque plan sur lui est à tomber, la comparaison avec l'acteur français au théâtre est bien sûr dévastatrice, mais vraiment l'aspect mythique de la chose n'est certainement pas usurpé. c'est vrai de chaque morceau du film, dans un noir et blanc sublime, il y a mille plans, moments, regards, répliques, qui sont des gigantesques morceaux de cinéma, iconiques et magiques.
et là où les choses se rejoignaient, c'est qu'il y a nécessairement une petite distance émotionnelle à cause de la distance culturelle et temporelle, ils jouent comme à l'époque dans un contexte purement américain. mais de l'avoir vu en français, avec une actrice française qui elle le jouait avec nos codes actuels permettait d'effacer cette distance, ce personnage est extraordinaire et totalement bouleversant - vraiment des frissons devant christina au théâtre, que je n'aurais pas eus ici -.
la pièce se joue jusqu'au 25 mai je crois, et pour moi ce petit duo pièce-film était magique, ça rentre dans mon panthéon et toujours une chouette émotion quand un grand classique te parle à ce point.
* fort souvenir des débats aux états unis pour la remise de son oscar d'honneur à élia kazan - sachant qu'il avait été un collaborateur zélé du maccarthisme. souvenir de sean penn qui ne s'était pas levé en gardant les bras croisés, comme d'autres dans la salle. et du coup je me dis que c'était un des premiers débats en mode "cancelled" qui m'avait frappé, un grand artiste vs son comportement moralement questionnable, est-ce que ça efface tout ?, est ce qu'on s'abstient juste de le célebrer?, etc.
** dans la pièce ce n'était pas viven leigh - que j'ai trouvée bien mais pas incr non plus - mais jessica tandy. qui avait été célebrée mais qui a été remplacée pour le film et qui a ensuite eu une carrière relativement modeste, la malheureuse a quand même du se sentir passer à côté de son destin. mais la vie ne l'a pas oubliée puisqu'elle a bien finie par gagner un oscar de la meilleur actrice... à 80 ans, pour
miss daisy et son chauffeur.
marlon qui couchait pendant le tournage avec laurence olivier, le mari de... vivien leigh, c'est quand même totalement mythique aussi.