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MessagePosté: 19 Jan 2022, 16:36 
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Robot in Disguise
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Boiling Point en VO

J'ai longtemps entretenu le désir de faire un film nerveux sur la restauration, ma curiosité fut donc au maximum.

Le fameux adage "Un film est un documentaire sur son propre tournage" n'est jamais plus vrai que pour les films en plan-séquence. Pour un mec comme moi qui suit à peine les histoires et ne pense souvent qu'à ce qui se passe derrière la caméra, c'est évidemment du petit lait. Surtout que c'est un vrai plan-séquence non truqué. Il y a quelque chose de tellement excitant à penser face à la première image qu'on est déjà en train de regarder "le dernier plan" que l'exercice, aussi gimmicky puisse-t-il être, ne cesse jamais d'être stimulant.

Et ici, le mariage entre le sujet et le traitement est parfait car il y a tellement de ponts entre le monde du restauration et celui du cinéma: cette vie de saltimbanque précaire ; cette dichotomie entre la scène-la table et les coulisses-la cuisine ; cette performance que chaque serveur doit accomplir tel un acteur ; même ce goût du petit remontant liquide, gazeux ou sous forme de poudre... Savoir que les acteurs sont sur le fil du rasoir à chaque instant tout comme le sont les personnages de cuistots apporte au film une vraie pertinence.

J'avais vu des bouts de la bande-annonce et je craignais le scénario qui poussait les potards en faisant intervenir la mafia (bout de scène avec Jason Flemyng qui réclame son argent) mais j'ai été content de voir que les enjeux restaient presque exclusivement culinaires ou humains, jamais exogènes: des problèmes d'hygiène, de main d’œuvre, d'ingrédients, de rapports humains... Si, format narratif oblige, le film est un peu catalogue, il réussit à ne pas aller trop trop loin dans la litanie d'emmerdes. Plusieurs pistes sont posées mais on ne sait pas lesquelles vont virer au drame
(ainsi, le client relou de la table 7 disparaît sans chute, mais c'est les fruits à coque de la table 13 qui vont gâcher la soirée - d'ailleurs petite entorse à la réalité avec cette ambulance qui arrive instantanément).

Par contre, je trouve que le film est meilleur dans sa collection de petits riens, d'interactions humaines où on découvre les membres de la brigade, leurs habitudes, leurs griefs, que lorsqu'il essaie de trop donner un enjeu cathartique à "Andy Jones" (un Stephen Graham étonnamment neutre et effacé). Ainsi, la fin ne me semble pas avoir une très grande résonance.

Au passage, petit détail qui m'a énervé: "Camille" la française manifestement jouée par une british qui prend un accent français. Même quand elle dit des mots français style "chef" ou "julienne" son accent est pas bon. Choix honteux et inexplicable.

Mais sinon j'ai passé un excellent moment, ça m'a capté tout du long, c'est un film dans lequel je me sentais bien.

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MessagePosté: 19 Jan 2022, 16:55 
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Bien motivé du coup et tu me rassures pour l'aspect polar que je craignais prononcé aussi, ça semblait faire beaucoup pour un seul film, avec un enjeu périphérique placé au centre (je note aussi l'emploi respecté du terme "brigade").


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MessagePosté: 19 Jan 2022, 23:58 
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Qui-Gon Jinn a écrit:
Boiling Point en VO

Enorme, je savais pas. Le film a débarqué tellement tardivement sur mon radar que j'ignorais le titre original, tellement meilleur que le titre français.

Bon sinon t'as tout dit.

Citation:
Le fameux adage "Un film est un documentaire sur son propre tournage" n'est jamais plus vrai que pour les films en plan-séquence. Pour un mec comme moi qui suit à peine les histoires et ne pense souvent qu'à ce qui se passe derrière la caméra, c'est évidemment du petit lait. Surtout que c'est un vrai plan-séquence non truqué. Il y a quelque chose de tellement excitant à penser face à la première image qu'on est déjà en train de regarder "le dernier plan" que l'exercice, aussi gimmicky puisse-t-il être, ne cesse jamais d'être stimulant.

Alors étant une personne normale qui suit les histoires, mais tout de même conscient du dispositif, je le trouve plutôt bien géré, presque trop. La caméra ne bouge jamais gratuitement, du moins jamais de façon ostentatoire, on suit toujours quelqu'un, on passe d'un personnage à un autre dans un véritable mouvement choral où chacun existe (même si le chef sert de protagoniste, les personnages sont bien caractérisés et une certaine authenticité parvient à émaner même des archétypes et ce malgré le récit ramassé qui pourrait les réduire à des saynètes et d'ailleurs tous les acteurs sont nickels), mais c'est presque tellement naturel que l'on ne remarque pas l'absence de coupe et du coup, ça m'a paru parfois moins tendu que ça n'aurait pu l'être. Quand tu sens l'absence de coupe, tu sens l'absence d'échappatoire, d'un cut qui viendrait relâcher la tension...ici c'est pas vraiment le cas.

Pour autant, la mise en scène confère une véracité tout à-propos à cette chronique finement écrite d'un soir chargé dans un restaurant, où chacune des petites tensions professionnelles est parfaitement cernée ET au service d'un propos sur le business.

Citation:
J'avais vu des bouts de la bande-annonce et je craignais le scénario qui poussait les potards en faisant intervenir la mafia (bout de scène avec Jason Flemyng qui réclame son argent) mais j'ai été content de voir que les enjeux restaient presque exclusivement culinaires ou humains, jamais exogènes: des problèmes d'hygiène, de main d’œuvre, d'ingrédients, de rapports humains... Si, format narratif oblige, le film est un peu catalogue, il réussit à ne pas aller trop trop loin dans la litanie d'emmerdes. Plusieurs pistes sont posées mais on ne sait pas lesquelles vont virer au drame
(ainsi, le client relou de la table 7 disparaît sans chute, mais c'est les fruits à coque de la table 13 qui vont gâcher la soirée - d'ailleurs petite entorse à la réalité avec cette ambulance qui arrive instantanément).

Par contre, je trouve que le film est meilleur dans sa collection de petits riens, d'interactions humaines où on découvre les membres de la brigade, leurs habitudes, leurs griefs, que lorsqu'il essaie de trop donner un enjeu cathartique à "Andy Jones" (un Stephen Graham étonnamment neutre et effacé). Ainsi, la fin ne me semble pas avoir une très grande résonance.

Voilà, tout pareil. Je n'avais pas vu la BA mais je redoutais les potentiels rebondissements artificiels, une hypothétique intrusion du domaine criminel, un Pusher III quoi, mais il n'en est rien. J'admire ces films qui ont confiance dans la force et la spécificité de leur sujet, de leur milieu, un peu comme Locke où un contremaître essaie juste de gérer la merde de son couple et un chantier en même temps.
Et c'est effectivement pourquoi je trouve la fin, que ce soit l'histoire de la dette révélée sur le tard, mais surtout ces 5 dernières minutes "je ne sais pas comment finir mon film", un peu ratées.
Y a pas besoin de faire du chef un alcoolique cocaïnomane et certainement pas de le faire mourir pour donner un sens au récit. La chronique se suffisait à elle-même comme tranche représentative du quotidien d'un chef sous pression. Une fin ouverte ou même, pour une fois, une non-fin aurait été préférable, pour son incertitude et son sentiment que "c'était juste une journée parmi tant d'autres et c'est comme ça chaque jour, c'est la guerre".


Citation:
Au passage, petit détail qui m'a énervé: "Camille" la française manifestement jouée par une british qui prend un accent français. Même quand elle dit des mots français style "chef" ou "julienne" son accent est pas bon. Choix honteux et inexplicable.

Ici, je peux éventuellement excuser cette facilité compte tenu de la démarche mais c'est vrai que je me demande souvent "mais ils ont vraiment pas réussi à trouver un acteur parfaitement bilingue?".

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MessagePosté: 20 Jan 2022, 08:57 
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MessagePosté: 20 Jan 2022, 09:29 
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MessagePosté: 20 Jan 2022, 09:45 
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Film Freak a écrit:
Ici, je peux éventuellement excuser cette facilité compte tenu de la démarche


Alors que s'ils avaient mis un Blanc pour jouer un Noir... :lol:

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MessagePosté: 20 Jan 2022, 10:12 
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MessagePosté: 26 Jan 2022, 10:01 
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J'ai pas grand-chose de plus à ajouter sinon que j'ai trouvé ça rudement efficace et prenant : on est plus dans la performance, c'est sûr, mais l'idée est suffisamment bien trouvée pour soutenir toute l'entreprise. J'ai rien contre les films-concepts quand il y a un réel boulot sur le reste et c'est le cas.
Pour ce qui est de la fin, je serai moins critique : je trouve qu'on montre quand même par petites touches que la soirée sort de l'ordinaire : la présence de la star, c'est Noël et surtout le fait que les deux cuistots disent leur fait à la gérante... Le final découle de tout ceci est finalement fait écho à l'élément déclencheur :
si on peut déterminer ce qui a causé l'allergie, qui est vraiment coupable ? idem pour la chute du chef : est-ce que c'est lui le seul responsable ou bien faut-il chercher la cause dans l'insistance de la star télé à le rembourser ou bien dans le désordre dans l'équipe etc... ?

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MessagePosté: 26 Jan 2022, 10:10 
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"Efficace", le mot inventé pour ce film.

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Que lire cet hiver ?
Bien sûr, nous eûmes des orages, 168 pages, 14.00€ (Commander)
La Vie brève de Jan Palach, 192 pages, 16.50€ (Commander)


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MessagePosté: 14 Fév 2022, 23:54 
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"the Lamb is supposed to be pink" a le potentiel pour être le nouveau "a dingo ate my baby".

Premier restaurant, bistronomique, ou autre d'ailleurs, où je vois une serveuse proposer spontanément de l'eau du robinet à ses clients, qui viennent par ailleurs de commander deux coûteuses bouteilles de vin. Bon il suffit d'une fois et elle est présentée comme une employée pas très à cheval sur les horaires. Gros problème d'ailleurs dès lors que le film veut aller côté du réalisme et de l'immersion, chaque détail qui paraît exagéré rend le film un peu plus désolant - désolant mais sans agressivité ni haine, juste une forme de blasitude. On est ou bien dans le digest d'anecdotes, qui rend truc pas crédible du tout, soit dans la délusion totale - ce qu'accentue cette ce plan-séquence qui reste sagement au-dessus des gestes des acteurs qui jouent les cuisiniers qu'on ne verra que, for vraisemblance sake, répandre un peu de sauce sur les plats à l'aide d'une cuillère. Il y a un mec qui passe le film à couper des citrons ou je ne sais pas quoi pratiquement devant les clients (on le voit à un moment comme par magie arriver avec des assiettes pleines pour les présenter à la chef de rang) . Absurde. Les clients sont pratiquement inexistants, relégués dans un rôle d'incultes débiles qui ne méritent pas ce qu'on leur cuisine.
On sait que le film accumule pour donner un suc, un concentré mais c'est too much et pas crédible pour un sou. La collègue qui fond en larmes et tombe dans les bras du commis ado aux bras scarifiés et qui disparaissent aussitôt fait, les scènes de ménage qui se suivent en chaîne à la fin, etc. Entre le début, façon invasion managériale (qui est ce type d'ailleurs qui circule dans la cuisine et note les restaurants, se base-t-il sur une réalité ? on dirait un mix de critique gastronomique et d'inspecteur de l'hygiène) et la fin, façon Flight, on a un tableau complètement soap et déréalisé du métier qu'on voudrait nous faire passer comme une couleuvre.
"C'est pas prétentieux, ça ne se prend pas la tête, c'est agréable et simple" dit une critique culinaire à propos de ce qui lui est servi. Pendant ce temps le chef boit dans sa gourde qui semble ne jamais se vider à chaque fois qu'il apparaît - de l'alcool apprendra-t-on.

Assez mauvais.

Pour l'anecdote, le tournage aurait duré trois jours, en mars 2020 alors que l'épidémie commençait - avec 150 personnes sur le plateau d'après le dossier de presse.


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MessagePosté: 14 Sep 2022, 10:09 
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Messages: 28532
Localisation: In the Oniric Quest of the Unknown Kadath
Avec bmntp même si je serais moins virulent mais j'ai trouvé ça moyen.

Le plan-séquence est humble, pas du tout dans l'esbrouffe à base de persos qui se croisent dans tous les sens, de mouvements impossibles ou que sais-je, c'est hyper simple on n'est pas dans Birdman. Mais justement du coup à plusieurs moments j'ai senti que le cadreur "attendait" une mise en place hors-champ. Du coup on perd assez régulièrement la nervosité, le mouvement sans fin de ce personnage incapable de rester en place et l'agitation d'un restaurant en pleine ébullition... Ca ne tient pas totalement. Et c'est pas aidé par le scénario trop mécanique et surtout ce personnage principal que j'ai trouvé un peu raté. Trop loser dès le début, trop faible, trop neutre, le mec n'a pas de personnalité, n'a pas du tout le charisme d'un grand chef. Du coup il n'y pas non plus le côté descente aux enfers, impression que c'est foutu dès le début du coup le film est trop sur la même ligne.

Et après niveau crédibilité c'est pareil, en effet on ne voit jamais les perso cuisiner, le seul plat que l'on voit vraiment est ridicule, deux pauvre morceaux de viande recouverts de sauce. Du coup je n'y ai pas trop cru. Et évidemment le scénario est hyper mécanique, la fille avec l'allergie c'est tellement évident qu'il va y avoir une connerie... L'autre mec qui est une star à la télé mais qui est au bord de la faillite c'est pas du tout expliqué. Et les 5 dernières minutes sont limite cata avec cet évènement final sorti de nulle part en mode "on savait pas comment finir". Ca flingue un peu le film.

Je retiendrai surtout l'actrice qui joue la seconde chef qui est excellente et bien plus charismatique que le sympathique mais limité Stephen Graham. Et d'accord avec l'efficacité réelle du film, à la fin j'avais l'impression qu'il restait une demie-heure. Mais bon il ne m'en restera pas grand chose et j'ai presque l'impression que le film passe un peu à côté de son sujet ou du moins reste bien trop en surface.

3/6

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