Forum de FilmDeCulte

Je connais très mal Hawks, qui, il me semble est un des réalisateurs classiques les plus difficiles d'accès : très peu d'esbrouffe formelle chez lui, et son art n'existe justement que sur la durée, sur sa capacité à exister pendant deux heures, de façon homogène, sans coups d'éclats.

Seuls les anges ont des ailes est un film assez étrange, au scénario plutôt déroutant, puisque ce qu'on nous propose de découvrir, c'est le quotidien d'une petite compagnie de service postal (à la Saint-Exupéry), avec ses drames, ses amours, et ses haines. Et tout de suite, il y a quelque chose d'un peu raté dans ces dialogues qui s'auto-parodient constamment, dans ces petites blagues brumeuses qui ne font guère mouche ; et pourtant, le scénario construit tout de même une superbe gallerie de portraits, et parvient à donner vie à une véritable petite communauté, une famille d'hommes durs qui prétendent ne pas être affectés par la dureté de l'existence. Hawks, ici, me parait presque prisonnier de ce foisonnement, de ce flot d'événements, de personnages, et de formes. Il ne sait d'abord pas trop quoi faire des marivaudages de l'écriture, et les dix premières minutes du film sont assez pénibles.

Pourtant, lorsque les hommes prennent enfin le ciel, que la comédie cesse pour se heurter aux réelles conséquences de ces égos poseurs un peu vains, Hawks décolle lui aussi, et signe certaines séquences absolument exceptionnelles : je pense par exemple à la première scène de vol, où Cary Grant cherche à faire se poser un pilote en se servant du seul bruit de son avion. C'est efficace, prenant, et profondément investi. Le film est à cette image, parfois bancal, un peu trop long, souvent bavard à l'excès. Et pourtant, la vie explose en son sein.
Grand film, donc, même si clairement imparfait (par contre, Rita Hayworth est insupportable, son surjeu m'horripile au plus haut point).

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"Je vois ce que tu veux dire, mais..."
"Je me suis mal exprimé, pardon."

T'es dur avec Rita Hayworth, on la voit à peine dans ce film, au contraire de Jean Arthur qui est tout autant insupportable. Après plutôt que de les incriminer, c'est plutôt les scénaristes les responsables de ces deux portraits de godiches. Le film aurait d'ailleurs eu tout à gagner à n'être joué que par des hommes et à en exclure totalement la gent féminine (à savoir que le perso de Hayworth n'apporte absolument rien, et celui de Arthur uniquement pour la scène finale). Comme tu le dis le film est essentiellement centré autour d'

mais intercalé entre Bringing up baby et His girl Friday, je trouve celui-ci extrêmement mal balancé entre drame et comédie. Pour tout dire j'ai trouvé la première partie tellement lourdingue (et m'a tellement porté sur les nerfs) que j'ai du faire une grande pause avant de pouvoir enfiler la deuxième. Je trouve Grant mal casté (il est évidemment à sa place pour jouer la partie comédie du rôle, mais il n'a aucune crédibilité dans le côté fier à bras, et on en arrive à des scènes horribles - sinon abjectes - telle le dîner post accident du premier pilote). Le film pue le studio à plein nez, Walsh n'aurait pas fait pire.

Sinon pour les scènes aériennes, ayant vu Wings de Wellman quelques semaines auparavant, ça atténue fortement le peu d'intérêt qu'elles apportent au film.

2-3/6

Découvert au ciné cette année j'ai littéralement adoré. Grand film d'aventures romantique d'un charme fou.

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CroqAnimement votre

Je venais de lister la dizaine de films de Hawks que j'ai vu sur IMDb (work in progress), ça va de 6 à 8/10 pour autant que ma mémoire soit fiable, celui là c'est vraiment celui que j'aime le moins, le côté homme qui ont de grosses couilles et qui tourne la page d'un collègue qui meurt en mangeant son steak c'est vraiment pas pour moi.

Le film m'a fait l'effet inverse de Rio Grande de Ford que j'ai découvert récemment. Je pensais ne pas aimer Ford, mais j'ai tellement apprécié Rio Grande que je suis en train de revoir tout ceux que j'avais vu et dont je n'avais aucun souvenir, et je suis vraiment en train de découvrir quelque chose d'exceptionnel à côté duquel j'étais quasi totalement passé à côté. A l'inverse je crains malheureusement de revoir ceux de Hawks et de les trouver bien moins sympa qu'à l'époque.

Drôle de film qui commence par une grosse demi-heure en temps réel, plutôt impressionnante dans l'écriture tenue et la mise en scène, qui rentabilise au maximum son décor tropical (ces profondeurs de champ chargés, mamma mia, on est chez Bay ou quoi?), où l'on retrouve un peu du Hawks version screwball comedy dans la rencontre entre le personnage de Jean Arthur et celui de Cary Grant transposée dans un univers loin de ceux de Bringing Up Baby ou His Girl Friday. Alors qu'on voit se profiler la bonne vieille romance entre ses deux personnalités pas forcément raccord, le récit bascule alors dans une chronique de la vie de pilotes coursiers coincés dans une ville fictive d'Amérique du Sud mais dévoués à leur activité malgré les morts et les handicaps.

J'ai tout d'abord été désarçonné par ce virage, tant le premier tiers m'avait charmé, et la disparition de Bonnie, qui semblait être le référant du spectateur, littéralement débarquée dans ce microcosme particulier avant d'être reléguée au second plan, mais il m'apparaît évident que Hawks choisit délibérément d'entamer son film dans un registre familier, pour ne pas dire attendu, avant d'y introduire le drame, retirant le tapis de sous les pieds de Bonnie (et du spectateur donc). A ce titre, la scène nocturne où ils cherchent à guider un pilote dans la brume par le seul son de son zinc est géniale (et les autres scènes de vol/atterrissages périlleux tout aussi impressionnantes). A croire qu'il a voulu substituer à l'humour et au glamour hollywoodien la réalité qu'il a vu de ses yeux, rendant hommage à ces aviateurs. Bonnie choisit de rester et peut-être qu'elle apparaît beaucoup moins à l'écran parce que Hawks veut vraiment nous mettre à sa place, nous montrer ces hommes à travers ses yeux. Il l'écarte pour mettre de côté la romance, désignée impossible par Geoff, nous/la laisser voir de quoi il retourne réellement pour ces pilotes, avant de la faire revenir dans le troisième acte pour un choix avisé. Et renouer alors avec le ludisme (cf. le coup de la pièce...scène reprise quasiment à l'identique dans The Dark Knight!).

C'est un poil long tout de même mais c'est bien.

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