Merci pour la recension ! Toubiana explique pourquoi il a voulu raconter la vie de cette femme?
elmergantry a écrit:
en même temps que je lisais le livre, j’ai vu le film (pas terrible) de Warren Beatty « Reds » sur la vie de ce journaliste américain John Reed qui a participé aux événement de 1917
Vu l'an passé. Je serai moins sévère - mais ce n'est pas le film auquel je m'attendais: la partie consacrée à la Révolution n'est pas la plus intéressante finalement; par contre, celle du début (la bohème new yorkaise de 1900) est quand même brillante je trouve.
Hello, je pense que Toubiana voulait racontait l’histoire de sa vie car elle-même n’avait jamais eu le courage de le faire, tout simplement.
Sur Reds, c’est marrant mais moi c’est exactement le contraire. La première partie m’a vraiment barbé, les histoires de coucherie entre la compagne de Reed et l’écrivain O’Neill m’ont paru bien plates et très conventionnelles (y a même pas de ménage à 3, dès que Reed revient, O Neill est largué, tu parles de révolutionnaires !). L’autre partie, autour de la révolution russe et de ses conséquences aux Etats-Unis, m’ont plus intéressé, peut-être parce que quand on voit ce que s’apprêtent à devenir les Etats-Unis, ça fait du bien de se rappeler qu’il y eut un temps où ce pays vit émerger un parti communiste américain. Ce yankee qui va chercher à Moscou la reconnaissance de sa section et se voit ordonné de faire la paix avec son concurrent, c’est quand même dingue. Je ne sais pas si le fameux bouquin de Reed, Les dix jours qui ébranlèrent le monde, vaut la peine d’être lu…
Je crois que c'est assez compliqué car d'une part les MacMahonien pouvaient valoriser le cinéma soviétique pour son formalisme, aussi un peu pour le plaisir prendre Sadoul en sandwich.
On trouve sur Scribd pas mal de numéros de Présence du Cinema en PDF, difficile à lire à cause des pubs, avec déjà un compte-rendu par Morulet de festivals où il se félicite de voir du Eisenstein même si c'est court, et valorise le classicisme de certains films de pays pris dans le glacis (Tchécoslovaquie) par opposition aux prétentions modernistes du cinéma français. Je crois aussi que la bonne réputation de Boris Barnet en France vient d'eux.
Plus près nous, filmsnoutc, d'inspiration macmahonienne, accorde une grande place aux films soviétiques. Ce qu'il dit de la Lettre Inachevée de Kalatazov est significatif (mais il faudrait comparer avec le ton des macmahonien historiques). Disons qu'il y a une certaine projection sur la projection.
Le film peut se décomposer en deux parties distinctes. Dans la première, les auteurs s’intéressent aux quatre personnages. Trois hommes, une femme, la taïga, les diamants…Les sentiments parfois non-dits sont exprimés avec légèreté et justesse. A ce moment, la virtuosité du cinéaste toute entière focalisée sur les personnages crée une sensation de liberté. La caméra virevolte autour d’eux -ce qui permet de suivre suivre leurs déplacements sans découper les séquences- elle achève souvent sa course par de magnifiques gros plans sur les visages. La jeunesse des comédiens ajoute à l’impression de fraîcheur. La ravissante Tatiana Samoilova est de retour. Certes, son pantalon la grossit plus que de raison (elle n’allait pas se promener en Sibérie en minishort) mais c’est un plaisir que de retrouver le petit écureuil de Quand passent les cigognes. Ce parti-pris réaliste n’empêche pas un souffle lyrique discret mais permanent. Je pense à cette discussion où le premier plan de l’image est composé de hautes herbes. C’est simple mais sublime. Kalatozov et Ouroussevski n’ont pas encore sorti l’artillerie lourde mais visuellement, c’est déja une tuerie.
C’est dans la seconde partie que la démesure soviétique s’exprime pleinement. Oh, pas de propagande, pas de lutte des classes et même une fin à l’opposé de tout triomphalisme. Mais des personnages cheveux au vent filmés en contreplongée sur fond de ciel menaçant avec la musique grave qui va bien. Cette seconde partie est nettement plus dramatique que la première puisqu’elle fait suite à une catastrophe naturelle. Seul compte alors le combat entre les aventuriers et la nature hostile. C’est la Nature éternelle, violente, horrible, tellement plus forte que les dérisoires humains, qui est l’objet du déploiement de l’armada technique de Kalatozov. Des travellings absolument gigantesques, des morceaux de bravoure d’une ampleur exceptionnelle (la course à travers la taïga enflammée), la lumière boréale…font de cette seconde partie un somptueux poème visuel. Kalatozov retrouve alors la beauté primitive d’un certain cinéma muet. Celui de Gance, Griffith, Murnau. Un cinéma dont les données (l’homme, l’amour, la nature) étaient simples mais sublimées par des créateurs doués d’une inextinguible inventivité plastique.
_________________ He pays penance to the air above him
On trouve sur Scribd pas mal de numéros de Présence du Cinema en PDF, difficile à lire à cause des pubs, avec déjà un compte-rendu par Morulet de festivals où il se félicite de voir du Eisenstein même si c'est court, et valorise le classicisme de certains films de pays pris dans le glacis (Tchécoslovaquie) par opposition aux prétentions modernistes du cinéma français
Pourrais-tu préciser? A part "Un an de festivals" dans le n°19, je ne peux me rappeler d'autre CR de festivals par Mourlet. Et dans ce CR, rien qui ressemble à ce que tu dis sur Eisenstein ou le cinéma tchèque. Par contre, des dézinguages d'Eisenstein, Mourlet en a commis plusieurs, explicites et fameux, notamment dans la NRF et les Cahiers du cinéma.
Citation:
Plus près nous, filmsnoutc, d'inspiration macmahonienne, accorde une grande place aux films soviétiques. Ce qu'il dit de la Lettre Inachevée de Kalatazov est significatif (mais il faudrait comparer avec le ton des macmahonien historiques
filmsnonutc n'est pas macmahonien. Il est trop jeune pour ça.
C'est indirect parce qu'il cite un autre mais dans le compte-rendu du festival de Prades dans le numéro Fuller il s'associe à un commentaire plutôt élogieux sur Ivan le Terrible, même si la formulation est casuiste "d'un certain côté le sommet de l'expressionisme".
Et surtout plus bas il oppose la sobriété d'un film tchèque, Pierot de Jan Mimra, aux produits de la cellule recherche de la RTF. Maintenant c'est court et relève plus d'une recherche de positionnement que d'un vrai point de vue.
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C'est indirect parce qu'il cite un autre mais dans le compte-rendu du festival de Prades dans le numéro Fuller il s'associe à un commentaire plutôt élogieux sur Ivan le Terrible, même si la formulation est casuiste "d'un certain côté le sommet de l'expressionisme".
Et surtout plus bas il oppose la sobriété d'un film tchèque, Pierot de Jan Mimra, aux produits de la cellule recherche de la RTF. Maintenant c'est court et relève plus d'une recherche de positionnement que d'un vrai point de vue.
Mourlet a consacré un article complet à descendre Ivan le terrible (à l'époque de sa sortie en France quand le film fut unanimement encensé). La plate citation qu'il fait du communiqué de presse du festival ne traduit nullement le changement de son point de vue sur ce film. Dans le même papier, il se plaît à résumer dans le détail un film particulièrement inepte. Cet article, qui est un des derniers qu'il donne à Présence, manifeste un certain ras-le-bol quant au cinéma. Et qu'il cite, au milieu de films d'autres nationalités (américains, allemands...), un dessin animé tchèque comme exemple esthétique n'est évidemment nullement révélateur d'un quelconque positionnement quant aux "pays pris dans le glacis".
Pour une vision documentée et contextualisée du mac-mahonisme, notamment de son versant politique, je ne saurais que recommander ce super livre, tout à fait passionnant. En toute objectivité.
Dont acte Sinon, pour retomber sur mes pattes après une demi-connerie, sur le positionnement politique des Macmahoniens, Pierre Rissient en itw par Michel Ciment (même si l'émission est plutôt consacrée à son rôle d'attaché de presse/distributeur)
C'est vrai que dans Présence du Cinéma on trouve des puns pour Défense de l'Occident, ou des revues de Roger Caillois mal perçu par les vrais anthropologues. Mais Bertrand Tavernier, dont le documentaire sur la guerre d'Algérie est pour moi l"oeuvre la plus importante,était aussi un Mac-Mahonien
D'ailleurs ce que dit Pierre Rissient dans le lien sur la guerre d'Algérie, pour rapide qu'il soit, est aussi important.
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Inscription: 13 Juil 2005, 09:00 Messages: 37563 Localisation: Paris
HITS, FLOPS AND OTHER ILLUSIONS de Ed Zwick Zwick avait eu un certain succès sur Twitter avec ses threads d'aphorismes tirés d'expériences de tournage réelles mais anonymisées. C'était sympa mais souvent un peu trop poseur et haïku. Le succès de ses tweets l'ayant encouragé à écrire un livre, j'avais un peu peur en entamant la lecture mais, tel Mauro Colagreco dans Top Chef, j'ai été conquis.
Elmore Leonard avait pour credo "I tend to leave out the parts the readers skip", conduisant à cette écriture si efficace et cinématographique. Et le cerveau de scénariste de Zwick l'a appliqué à ses mémoires, ne perdant aucun temps sur son enfance ou son milieu social, rentrant direct dans le récit de sa carrière, beat par beat, sans temps mort. De sa fac de ciné à ses premières expériences télé (ça m'a bien chauffé pour tenter sa série THIRTYSOMETHING), jusqu'au succès de GLORY, l'échec de son film suivant qui précède le projet avorté SHAKESPEARE IN LOVE, ses heurts avec Brad Pitt, ses films militaires des années 90 avec Denzel, sa collab avec l'effarant Tom Cruise...
C'est riche en anecdotes, non-exempt d'un regard au laser sur sa vie intérieure, et d'une densité folle en terme d'observations lose et quotidiennes sur la vie de réalisateur, impossible de ne pas se reconnaître. On voit que quelle que soit l'échelle on est tous confrontés aux mêmes galères.
Hormis quelques extraits d‘un journal, le livre compile les chroniques cinéma tenues par JP Manchette dans le journal Charlie hebdo et ses avatars de 1979 à 1982 : nostalgie, nostalgie….
Je connais mal Manchette l’écrivain, de lui je n’ai lu récemment que Le petit bleu de la côte ouest (conseillé par Nicolas Matthieu dans une revue) qui ne m’a pas plus impressionné que ça peut-être parce que le polar n’est pas mon genre de prédilection.
Mais Manchette chroniqueur de cinéma, c’est vraiment chouette à lire. Un mélange de désinvolture, d’érudition et d’humour, je dirais.
En matière de cinéma, il a une idée fixe qu’il synthétise parfaitement au début de son papier pour Les aventuriers de Spielberg : « Vous connaissez notre vieux refrain : l’histoire du cinéma comme art est terminée avant 1930 ; le cinéma industriel qui lui succède se désagrège dans les années 1950 ; de sorte qu’à présent, si on veut rigoler derrière la caméra ou devant l’écran, il ne nous reste rien, sauf le revivalisme hollywoodien. S’il y en a deux qui ont compris ça, ce sont les petits malins Lucas et Spielberg ».
Amis de Oliveira, Tarkovski,.. passez votre chemin, ce livre n’est pas pour vous.
Pour Manchette, le cinéma est devenu essentiellement de la Culture, cette « charogne de l’Art » comme il écrit. Même un film comme le Don Giovanni de Losey qu’il défend pour sa beauté, marque « une date dans l’histoire de la démocratisation- c’est-à-dire la commercialisation- de la culture, et nous inspire donc une admiration entrecoupée de vomissements convulsifs. »
Malgré cette aigreur, il arrive quand même à nous faire partager son plaisir de spectateur. Son accablement aussi car à l’époque, il n’y avait pas moins de mauvais films qu’il n’ y en a maintenant.
Quant à ses jugements, c’est à chacun d’apprécier, moi par exemple quand il termine sa critique élogieuse de 1941 de Spielberg par « Ne pas oublier, à part ça, que 1941 est un film très drôle », je suis consterné. A l’inverse, je me réjouis de lire que Black Jack de Ken Loach et Le loup-garou de Londres de Landis (deux films que j’ai défendus ici) sont à ses yeux respectivement « distrayant, intelligent, solide » et « drôle et futé ».
Sur l’un des mes films préférés ever, voici ce qu’il raconte et ma foi, ça dit l’essentiel :
Alien, d’abord , qui peut se passer de longs commentaires. Scénario simple comme une bande dessinée de Weird Science : un navire marchand spatial embarque une chose extraterrestre qui se met à faire la peau à tout le monde. La plupart des navigants sont des espèces de jeunes cadres propres sur eux, sauf un qui a davantage de personnalité car c’est un robot, et deux qui sont ronchons parce que ce sont des soutiers (surtout le nègre), et puis une nana dynamique qui gagne à la fin (ça, c’est moderniste). De même qu’aux James Bond on attend les gadgets, ici on attend les meurtres et les apparitions du monstre, qui est bigrement pervers et foutrement polymorphe. C’est agréable, parce que c’est extraordinaire sur le plan plastique. Le réalisateur Ridley Scott est très soucieux de beauté formelle (certains le lui ont reproché au moment de Duellistes) au point qu’à certaines apparitions du monstre - toujours très rapides et montées très court - on se soucie davantage de voir quel aspect il a ce coup ci que des horreurs qu’il commet. N’allez pas croire pour autant que les dites horreurs ne sont pas impressionnantes. Elles le sont. Ceci étant, il est niais de comparer, comme certains, Alien et, par exemple, Psychose. La vieille et magique subtilité avec laquelle Hitchcock a toujours fait entrer une part de culpabilité chez ses personnages menacés, et jusque dans l’estomac du spectateur , est absente d’Alien. Sans personnages vraiment « construits » et presque sans intrigue, pure ribambelle de chocs plastiques et terrifiants, ce film sans esprit est un excellent divertissement. Comme le public s’y écrase, il vaut mieux aller à la première séance de la journée, ou bien attendre quelques semaines, si l’on veut avoir ses aises et éviter autant que possible les gloussements, cris et jacassements des spectateurs modernes, qui oublient en masse qu’ils ne sont pas devant leur télé, ni chez eux, et se conduisent en goujats.
A part la cinéma (ses films, ses livres), il nous parle aussi de temps en temps de politique (voir l’article sur Faurisson et l’extrême gauche) et de littérature. A ce titre, il m’a donné envie de lire un bouquin de Norman Spinrad : Les miroirs de l’esprit. J’en suis à la moitié et c’est vraiment bien.
Tu as aussi son Journal du début des années 66-74 (donc période atérieure) qui est bien, peut-être à la fois plus sincère et plus nuancé sur la politique des auteurs et le gauchisme que les chroniques pour Charlie (même si on sent que l'énergie intellectuelle diminue avec les années, effet du retour à l'ordre post mai 68, ainis que d'un mélange d'embourgeoisement, de reconnaissance et de perte d'influence).
Il y commente aussi pas mal ses lectures de sciences-fictions (ainsi que des productions de l'époque autour du marxisme et de la psychanalyse).
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En matière de cinéma, il a une idée fixe qu’il synthétise parfaitement au début de son papier pour Les aventuriers de Spielberg : « Vous connaissez notre vieux refrain : l’histoire du cinéma comme art est terminée avant 1930 ; le cinéma industriel qui lui succède se désagrège dans les années 1950 ; de sorte qu’à présent, si on veut rigoler derrière la caméra ou devant l’écran, il ne nous reste rien, sauf le revivalisme hollywoodien. S’il y en a deux qui ont compris ça, ce sont les petits malins Lucas et Spielberg »
Il défend "L'arche perdue" mais il dit le plus grand mal de "Star Wars", une "ineptie" et une date dans l'histoire du cinéma : le premier film "volontairement et scientifiquement planifié pourqu'il n'y ait dedans ni sexe, ni violence, ni sentiments d'aucune sorte. L'ennemi n'ose plus que nous vendre un sommeil de plomb" (p.40)
elmergantry a écrit:
Quant à ses jugements, c’est à chacun d’apprécier, moi par exemple quand il termine sa critique élogieuse de 1941 de Spielberg par « Ne pas oublier, à part ça, que 1941 est un film très drôle », je suis consterné. A l’inverse, je me réjouis de lire que Black Jack de Ken Loach et Le loup-garou de Londres de Landis (deux films que j’ai défendus ici) sont à ses yeux respectivement « distrayant, intelligent, solide » et « drôle et futé ».
Mais la légende raconte qu'il ne voyait pas forcément tous les films qu'il chroniquait, il chargeait son fils du sale boulot. lol
Beaucoup aimé ce livre aussi. J'avais enchaîné avec ses chroniques sur les romans policiers et promis de lire certains de ses romans un jour.
Inscription: 25 Nov 2005, 00:46 Messages: 88203 Localisation: Fortress of Précarité
Citation:
« Vous connaissez notre vieux refrain : l’histoire du cinéma comme art est terminée avant 1930 ; le cinéma industriel qui lui succède se désagrège dans les années 1950
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