Forum de FilmDeCulte

de base, je suis le bon public pour stéphane.
film de procès pour le premier, thriller / film de faits divers pour le deuxième : des genres qui me plaisent, des profils de films toujours trop rares ici. une volonté de faire des films totalement ancrés dans la société française et le cinéma français, sans se référer aux normes américains bien établies pour ces genres. je peux même ajouter ses castings en dehors des 10 mêmes sempiternels noms.

et pourtant, j'avais bien noté les limites de la fille au bracelet, plein d'intentions que j'aime mais qui ne se concrétisaient jamais vraiment totalement. j'avais l'hypothèse qu'il n'était juste pas assez talentueux, ou peut-être que c'était simplement son premier film, ou que simplement l'alchimie ne se faisait pas : ça restait trop petit, terre à terre, ça n'osait pas viser très haut et du coup ça restait collé au sol.

et je peux du coup dire plus ou moins la même chose, mais avec un diagnostic plus clair : oui, il n'est juste vraiment pas assez talentueux.
le film parle d'un fait divers, dans le milieu carcéral, mais qui se pose donc la question habituelle : comment raconter une histoire dont seule la chute est intéressante ?
question à la con, incontournable, à laquelle il n'y a pas vraiment de bonne réponse. mais ici, dans sa volonté d'ancrer le film dans le moule français, il se contamine volontaire à la maladie pénible du cinéma d'auteur : le scénario dont chaque scène fait avancer la psychologie du personnage et pas l'intrigue. et qui la fait avancer de 0,001%, qui s'accumulent patiemment pour arriver à la situation finale. sur 2 heures. alors on se retrouve avec 50 bonnes minutes d'exposition, puis la situation évolue vaguement, puis plus concrètement à 1h10, avant de rentrer dans le vif du sujet à 1h30 sur 2 heures extrêmement longues et assez difficilement justifiables. l'idée est donc de rendre tangible et concret le glissement qui semblait inimaginable au début, de plonger dans les complexités de chaque situation et du cerveau humain... sauf que comme disait christine boutin, "dans tout excès il y a une forme d'erreur" et à un moment tu as quand même envie de lui dire d'arrêter de tergiverser et de la raconter, sa putain d'histoire, ou comme disaient les robins des bois "bon tu vas la chier ta chiasse ?!". sachant que la chute n'est par ailleurs pas si extraordinaire que ça, et tout ce méticuleux processus de construction ne rend pas la situation finale plus "compréhensible".

c'est dommage, hein. parce que le thème du film est passionnant, les acteurs sont absolument tous excellents y compris dans les petits rôles, le milieu corse et fascinant et terrifiant et semble décrit de manière très juste. mais ça ne peut pas compenser cette histoire diluée à l’extrême, cette piteuse tentative de construction pour pimenter, cette image numérique dégueulasse et cette mise en image assez plate, cette absence de scènes vraiment marquantes...

alors je m'en suis un peu voulu de souhaiter un peu plus d'efficacité américaine là dedans, un récit plus nerveux, un peu de "thrills" dans un "thriller" ça n'a jamais fait de mal, des dynamiques narratives un peu plus changeantes...
en l'état, ce n'est pas un mauvais film, je ne doute pas que hafsia herzi suffira à 'faire' le film pour des gens - elle a une présence assez folle et qui change vraiment du tout venant - mais bon tout ça est mineur et il n'en restera rien.

La Fille au bracelet était son 3e long.

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ah dis donc c'est vrai, je savais pas du tout. alors j'ai regardé et aucune idée de ce que sont les deux premiers, aucun souvenir d'avoir vu sortir ça.

du coup :

Pas vu le premier.
Le second, qui fait genre 1h à peine, était mignon.

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Qu'il y ait des personnes aussi peu talentueuses que Stéphane Demoustier dans le cinéma français franchement si c'est possible j'en redemande. Parce qu'autant Allons enfants était tout de même très anecdotique, par contre La Fille au bracelet était un très solide film de procès (entre autre), laissant suffisamment de part d'ombres, et sur bien des aspects assez largement supérieur à Anatomie d'une chute. Et Borgo est vraiment dans la même lignée, un film avec beaucoup de qualité, une structure très intelligente que l'on met beaucoup de temps à saisir pleinement (la double temporalité entre la vie de matonne et celle de l'enquête), des personnages finement brossés qui une nouvelle fois garde une zone d'indiscernabilité bienvenue.


Le problème c'est l'inverse, qu'il n'ose pas rester dans le quasi insignifiant, rester au plus près des milieux qu'il décrit. Le principal défaut de Borgo, c'est qu'il est marqué du saut de sa référence, le cinéma de Thierry de Peretti (à ce point qu'il reprend l'un de ses acteurs et rejoue intégralement une scène des Apaches). Demoustier est un copiste avec du talent, mais ça reste un copiste. De Peretti dans ses premiers films (même s'il y a une tentative de sortir de la niche dans laquelle il était dans son dernier long, curieux de voir ce que donnera le prochain), à l'instar d'un autre réalisateur français qui aime à frayer avec le milieu (Rabah Ameur-Zaïmeche), c'est un cinéma profondément naturaliste, sans le sou, qui capte des moments de pures vérités de par leur mode de production même. J'imagine que Demoustier ne veut pas se lancer là-dedans (ce que je peux comprendre, cinéma trop confidentiel qui doit faire trop peu d'entrées et rapporter peau d'zob), et s'arme d'un scénario en béton armé, qui objectivement est très bien écrit, mais joue contre le naturalisme du film. Au final ça a un côté brillant, Herzi est comme d'habitude époustouflante, mais c'est également trop bien huilé, trop corseté, ça annihile la respiration que par ailleurs il avait réussi à capter. Dans tous les cas un film largement digne d'être vu, et qui je l'espère saura trouver son public.


La tu dis carrément n'importe quoi.

Grave. Je n’ai pas encore vu Borgo mais je n’ai pas oublié La Fille au bracelet, on se demande d’où sort cette attaque personnelle.

je n'ai pas dit qu'il n'était pas talentueux, j'ai dit qu'il ne l'était pas assez pour transformer son matériau que je trouve riche et prometteur en grand film. et de fait :






ça ne veut pas dire que tout ce qui arrive avant est inintéressant, ça veut dire que la structure classique d'une histoire c'est que le gros événement perturbateur arrive au début tandis que dans un film de faits divers il arrive logiquement à la fin. ce qui pose des défis de structure. et à peu près tous les films comme ça se débattent avec ce défi, ici il propose la double temporalité, s'il le fait c'est bien parce qu'il se rend compte que sinon on regarde une histoire sans enjeu apparent pendant 1h20.
(mais je pense que tu as compris que je disais que tout ce qui se passait avait n'avait pas d'intéret, ce n'est pas ce que je voulais dire.)

lol

Attention, spoilers !

Je suis moi non plus pas vraiment d'accord avec Fingers car au final ce qui est intéressant n'est pas tellement le fait divers ou le thriller qu'il y'a dans le film, mais plutôt tout son décor justement. Moi j'ai vraiment aimé toutes les scènes de prison, la façon de peindre avec le plus de naturel possible tout ce qui a trait à la mythologie corse, ces personnages aux apparences à la fois sympathiques et terrifiantes, c'est franchement pas évident mais je trouve que Demoustier s'en sort très bien et c'est fascinant à regarder.

Hafsia Herzi (et tous les acteurs corses) est géniale, et j'aime beaucoup comment son personnage se fait happer par le milieu petit à petit, presque sans s'en rendre compte et la finalité de toute cette histoire quand même c'est qu'elle est clairement complice d'un meurtre mais on est malgré tout très heureux qu'elle s'en sorte.

Finalement, c'est au moment où le film s'attarde sur le fait divers en question que le film me lâche un peu parce qu' à ce stade on sait déjà tout: le film se termine sur une longue séquence d'interrogatoire où l'on peut anticiper chaque question et chaque réponse, à ce moment là j'ai vraiment eu envie que le film abrège et se termine, ce qui est un peu dommage. Globalement, tous les moments avec la police sont vraiment pas terribles et purement fonctionnels, et j'ai souvent eu envie de retourner le plus vite possible en prison.

4/6

j'ai souligné les mêmes bonnes choses que toi hein ^^

le procès s'ouvre aux assises, du coup article dans le monde sur l'affaire. c'est très fidèle, à 3 points marquants près :

Sinon c'était prévu que le film sorte au moment du procès j'imagine ?

un pari audacieux que de compter sur la capacité de la justice française à tenir des délais...!
mais oui sûrement.

Oui ça me semblait comporter un assez gros lot d'aléatoire pour réellement miser dessus.

Toussotements sur ta remarque sur Anatomie d'une chute. Justement quand on parle de trop "corseté", c'est ce que j'ai ressenti sur La jeune fille au bracelet qui n'est pas un film déshonorant mais vite oublié pour ma part. Là j'ai été charmé par Borgo et surtout sa structure intelligente. Et contrairement à Fingers, je trouve bien que l'assassinat soit présenté dès le début. Demoustier pose justement les enjeux et attise la curiosité : "que s'est-il passé?". Procédé narratif assez classique mais qui fonctionne bien ici.
Je n'en rajoute pas plus mais je me reconnais globalement dans ton avis et celui de Mickey.

Beaucoup aimé, j'aime bien le ton du film, son espèce de nonchalance qui cache de vraies dégueulasseries et l'ambiance carcérale est excellente. Je trouve qu'il y a un vrai angle mort dans le scénario sur les raisons des agissements de Hafsia Herzi (qui décide pour le fun d'aller tirer avec des armes lourdes avec d'anciens détenus) c'est dommage. Surtout que ça aurait rendu le personnage bien plus intéressant si on avait senti un désir de pas de côté ou de parasiter sa hiérarchie mais là elle paraît juste un peu bête et passive. Mais ça ne m'a pas gâché le film qui trouve un bel équilibre entre un certain naturalisme et une tentation plus franche du thriller. Hafsia Herzi est excellente, toujours dans ce jeu en dedans, un peu atone mais finalement émouvant. J'aime beaucoup le personnage du mari aussi, très réussi. Bref, bonne surprise.

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