Forum de FilmDeCulte

On a atteint un tel degré d’ineptitude morale que ce genre de film antiraciste, antiségrégationniste, datant des années 60 et commentant la situation dans le sud des Etats-Unis serait qualifié ici par certains de wokiste. On me rétorquerait que le contexte, l'époque importent, mais vraiment ?
Le didactisme du film ainsi pourrait susciter des reproches similaires à ceux qu'on peut entendre aujourd'hui : les noirs de cette petite ville du sud sont d'une dignité sans faille et semblent être idéalisés, tandis que la meute blanche, désignée comme une alliance des white trash, de l'influenceur venu d'ailleurs, et du potentat local feraient figure de caricatures, avides de lynchages.
C'est un contexte spécifiquement américain, ça paraît lointain sauf que... Même si à vrai dire, on a eu un peu des films, en bien moins subtils, comme ça avec Rochdy Zem sur la montée de l'extrême droite.
Mais là, le film, aussi didactique soit-il, est génial et n'a pas pris une ride. Déjà il est filmé dans un noir et blanc sublime, faisant la part belle aux décors, tout simplement réalistes, avec ses papiers peints, ses réfrigérateurs bombés, et ses figurants au poil, mais son espèce d'acuité psychologique, par-delà le didactisme, qui s'exprime par une économie d'effets est génial : ainsi cette scène entre le colporteur et l’agitateur politique, qui est comme un jeu de pile ou face, dont le scénario pourrait se dépêtrer dans l’un ou l’autre cas - sans oublier que l’acuité psychologique dont font preuve les personnages font partie de leur métier, ou de leur technique comme ils disent. Et j’écrivais ça avant d’ailleurs tout en voyant la scène, qui est solutionnée de manière on ne peut plus logique, en fait revue et rebattue depuis lors, à mi-chemin de ce qu'on imaginait.
L'aspect psycho-sexuel freudien, qui sous-tend pas mal de série b de l'époque, est aussi intéressant. Ainsi présenter le personnage de l'influenceur raciste comme un gros queutard ne paraît pas déconnant, d'autant que ça donne lieu à développements des plus intéressants.
Il y a un côté absurde vers la fin, on souhaite une fin qui ne soit pas trop malheureuse, mais on se sent débile, car là n'est pas le sujet.

Entre Un Homme dans la foule (le youtubeur sorti d'une prison du trou du cul de l'Amérique) et Norma Rae (le syndicaliste de gauche qui vient déranger les choses en bien et en mal), un petit chef d'oeuvre qui vient rappeler pourquoi le racisme, c'est mal, ne vous en déplaise. La conversion morale du journaliste, amenée petit à petit, sans effets ni mots, à ce titre est très réussie.

Je suis extrêmement fan de "Un homme dans la foule" et ça fait hyper plaisir de le voir mentionné.

Sinon, j'avais pris une vraie claque en découvrant The Intruder y a une vingtaine d'années, et effectivement, c'est hyper direct et s'assure que le discours ne soit pas incompris.

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