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 Sujet du message: Re: John Frankenheimer
MessagePosté: 19 Aoû 2022, 23:33 
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Du grand-spectacle (1966-1969) :


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Grand Prix (1966) : un Ricain, un Rital, un Rosbif et un Froggie participent à des courses de formule 1 chacun attendant que les trois autres s’envoient dans le décor, visiblement le seul moyen de remporter une victoire éclatante. Projet totalement infaisable aujourd’hui, Grand Prix provient de l’amour immodéré de Frankenheimer pour la France, les bagnoles et ce sport sur lequel je ne sais rien. Complètement investi, le réalisateur conçoit des caméras à même de saisir la vitesse en temps réel des coureurs et force les acteurs à risquer leur vie en pilotant eux-mêmes les voitures. L’accent est mis sur le côté mort en sursis des conducteurs et le making-of revient sur le fait que la plupart des véritables pilotes figurant dans la distribution ont trépassé au cours des années suivantes. On y voit également James Garner pourrir un gros rouquin propriétaire de bateau qui bloque une scène alors que Garner, trempé, est en train de se cailler les miches dans un choc des cultures assez significatif.
Ce n’est évidemment pas un film qu’on juge pour sa profondeur mais pour la manière dont on a utilisé le format Superpanavision 70 afin d’autant capter les scènes de courses que la gravité des conversations entre les différents protagonistes (vous n’avez jamais vu un jardin aussi grand et verdoyant que celui où Garner et Toshiro Mifune papotent). Du grand spectacle qui devient de l’hénaurme spectacle au gré des compétitions dont aucune n’est filmée comme la précédente, chacune se portant sur un aspect bien précis (le suspense, l’euphorie, le danger) relié à une fonction précise dans l’intrigue (l’exposition des différents coureurs, un amour naissant, la mort qui rode sous la pluie). Les trois heures de sa durée en font évidemment un film de digestion d’après-rôti du dimanche mais si on se laisse porter, on retrouve des sensations et de l’intérêt digne de certains classiques qui voient des hommes, des vrais, poussés dans leurs derniers retranchements, affronter les limites de leur âge et leur physique, avec une petite rasade de névrose (l’Anglais qui vit littéralement dans l’ombre de son frère mort et dans une chambre devenue mausolée à sa gloire), de glamour (on visite les vraies écuries Ferrari) et de fautes de goût (François Hardy qui joue aussi bien qu’elle chante). Et l’un dans l’autre, Frankenheimer fait le job et assure un film bien meilleur sur son propre terrain que le navet de Hawks (le seul de sa carrière) Ligne Rouge 7000 avec ses stock-shots foireux et ses romances de prod AB. « On n’en fait plus des comme ça, du CINEMA » nous dit le petit Martin de Flushing, New York.

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The Fixer/L’homme de Kiev (1968) : autre grand spectacle mais bien plus sérieux celui-ci, adapté d’un Prix Pulitzer (s’il vous plaît) et scénarisé par Dalton Trumbo qui rejoint la longue liste de professionnels bien embêtés la décennie précédente qui bossent avec le réalisateur, et qui relate l’emprisonnement d’un artisan juif dans la Russie du début des années 1910 après que celui-ci a tenté de se faire passer pour un gentil afin d’occuper un emploi pour un riche notable, a été démasqué et accusé du meurtre d’un enfant et de viol. Le propos du film tient dans la deuxième partie assez insoutenable sur la longueur, puisqu’on assiste à tous les sévices que les gardiens et les services secrets lui infligent alors que sa défense se fait éliminer dans des circonstances mystérieuses et que l’espoir même d’un procès s’éloigne au fil du temps. Inspiré d’une histoire vraie, le film évite la redite par rapport au Prisonnier d’Alcatraz, Frankenheimer profitant du fait que les événements se situent en Russie pour faire un parallèle avec le traitement des opposants politiques de l’URSS à l’époque mais également avec la manière bien plus générale dont un état peut se servir de l’intolérance primaire pour nier des droits fondamentaux. Oui, en gros, ça parle d'antisémitisme.

La question du judaïsme est assez intéressante puisque Yakov, le Fixer du titre explique dès le début qu’il n’a ni religion ni croyances politiques ni attachement quelconque. Son dilemme, on l’apprendra, sera plutôt celui d’une faille concernant sa virilité (il n’a pas pu avoir d’enfant avec son épouse). Et au cours de son emprisonnement, il étudiera la philosophie de Spinoza pour apaiser sa peine. Frankenheimer expliquait dans plusieurs interviews qu’il avait été élevé dans la religion chrétienne (celle de sa mère, son père juif allemand) avant de s’en détacher à la fin de son adolescence et cette remise en cause parcourt toute son œuvre jusque dans le dernier film, Sur le chemin de la guerre, avec une séquence qui désacralise une visite à l’église.
Thoret notait sur Seconds une similitude avec le style de Polanski, on peut également le déceler dans certaines séquences de The Fixer (le chien des notables qui le harcèle tandis que la fille infirme cherche à l’amener dans son lit). Le film réussit peut-être trop bien à plonger le spectateur dans l’état d’étouffement et de claustrophobie que le prisonnier subit et on est un peu soulagés de retrouver l’air libre au final.

The Extraordinary Seaman (1969) : pas vu celui-ci qui a une réputation abominable (fait pour payer un divorce, charcuté par la production) et situé dans un genre pour lequel Frankenheimer n’a, si j’en crois le reste de sa filmo, aucune aptitude : la comédie.



À la campagne (1969-1974) :

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The Gypsy Moths/Les parachutistes arrivent (1969)
I Walk the Line/Le pays de la violence (1970)


De loin, mes films préférés du réalisateur, souvent associés parce qu’ils semblaient entamer une mue chez leur auteur qui n’a jamais vraiment eu lieu. Deux drames champêtres menés avec des anciennes stars vieillissantes, qui ne dépareillent pas dans le cadre du Nouvel Hollywood mais qui ont une certaine épure et un rythme remarquable avec des ruptures de ton, une liberté dans les enchaînements et un regard sombre et désabusé mais jamais pontifiant.

Un weekend de fête nationale, un spectacle complètement suranné et inutilement dangereux (des démonstrations de saut en parachute), le contraste entre la vie bourgeoise frustrée et les bars à striptease sordides, Gene Hackman jeune : pas de doute, tu es bien avec Les parachutistes arrivent dans un film américain de la fin des années 1960.
Trois casse-cou errants s’offrent une visite dans la petite ville natale du plus jeune d’entre eux alors qu’ils préparent une représentation risquée et menacée par des averses. Un drame va survenir alors qu’on apprend en filigrane la triste histoire du jeunot (un très bon Scott Wilson qu’on retrouve aussi dans Les Flics ne dorment pas la nuit de Fleischer) et dont l’idylle avec la future Holly McClane, Bonnie Bedelia, est assez touchante. Frankenheimer parvient à magnifier la présence de Burt Lancaster en mâle alpha rien qu’en le faisant s’asseoir dans un salon et filme une scène de sexe assez inattendue entre lui et sa partenaire fanée de Tant qu’il y aura des hommes, Deborah Kerr, mais c’est pour mieux mettre en scène sa chute dans tous les sens du terme plus loin. Les symboles d’all-american hero laissent la place à une jeune génération plus humaine. Gene Hackman tire d’ailleurs son épingle du jeu en bateleur soiffard, dragueur… et croyant, tandis que Frankenheimer parvient à restituer la mollesse des weekend de fête dans un bled paumé (avec la fanfare qui s’entraîne tout du long pour finalement jouer dans le vide), qui contraste avec l’énergie des sauts assez impressionnants.

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De chute et de bled paumé, il en est aussi question dans Le Pays de la violence, mais avec l’ampli sur 11. Gregory Peck incarne un shérif complètement lessivé qui tombe amoureux de la fille d’un trafiquant d’alcool jouée par la lumineuse Tuesday Weld. Frankenheimer prend sur le vif la désolation du patelin et de ses habitants, une assemblée de spectres de la Grande dépression qu’on aurait oublié de prévenir de leur décès. Tout le rêve américain semble être devenu une sorte de songe abrutissant dans lequel les maisons, les voitures et les êtres ont prématurément vieilli.

Alors que le titre VO fait référence à l’accompagnement musical du film par Johnny Cash, le titre VF est trompeur car il n’y a en tout et pour tout qu’un coup de feu et une poursuite en voiture mais les deux scènes cruelles surviennent naturellement tellement le bourbier moral dans lequel surnage un temps le shérif est inextricable. Souvent critiqué, le choix de Gregory Peck pour tenir la vedette du film après que le studio a refusé l’embauche de Gene Hackman, participe à la désolation ambiante. Dans une scène où sa femme tente tant bien que mal (et plus mal que bien) de renouer avec son mari volage on voit sur la table derrière elle un portrait de Peck du temps de sa splendeur, en contrechamp on aura le même Peck rougeaud, le cheveu gras et la mine défaite, les épaules tombantes alors qu’il ne semble pas avoir ni la capacité ni les mots pour exprimer le tourment qui l’habite (voir la scène pathétique où il décrit à la jeunette tous les meubles et toute la déco d’un tribunal).
Le voir courir jusqu'à l'épuisement à travers une demeure vide alors qu'un bruit sourd emplit la bande-son est déjà glaçant mais la séquence suivante avec une caméra aérienne pour saisir sa fuite en avant en bagnole fait partie de mes passages préférés de cette filmo. La poursuite devient le dernier ressort d'un corps vidé de tout : esprit, moralité, dignité, on a juste envie d'abattre la bête pour mettre fin à sa souffrance et même ça ça lui sera nié.

Et si d'aventure, vous regardez le film, venez me dire si on ne débute pas avec l'impression que Gregory Peck filmé de dos face au barrage qui jouxte la ville, est en train de pisser sur le bas-côté ?

The Horsemen/Les Cavaliers (1971) : Omar Sharif, le tiercé, le quarté, le quinté, c’est son dada, mais ça ne l’empêche pas d’être remplacé sur de nombreuses scènes à cheval par une doublure. Son perso lui se vautre après une partie de bouzkachi et il va mettre tout le film à se rendre compte que les pages du Coran ne l’aideront pas à guérir sa jambe blessée si bien qu’on l’ampute prouvant par là-même que :
1/ tous les synopsis trouvés sur le net ou les jaquettes vous racontent le film.
2/ il n’y a pas grand-chose à retenir de cette adaptation de Joseph Kessel dont la trame équivaut à un quart de Grand Prix (celui consacré à l’Anglais).
En tentant de renouer avec la grande aventure, Frankenheimer accouche d’un ratage où les scènes intérieures (tournées en Espagne et assez toc) tranchent constamment avec les prises de vue extérieures et où on a droit à une vision documentaire précieuse de l’Afghanistan de l’époque. Par exemple, la scène de bouzkachi qui ouvre le film rivalise avec la course de char du Ben-Hur de Wyler et l’opposition ancien/moderne fonctionne bien en toile de fond. Mais l’interprétation hésitante ruine notamment un triangle passionnel pas très passionnant, et on a l’impression que le réalisateur a tenté de singer Kurosawa pour n’aboutir à la place qu’à faire jouer ses acteurs en mode théâtral et grandiloquent. Également victime d’un montage qui a visiblement été très long et pénible, le film aurait mérité à être muet et entièrement tourné en extérieurs.


Story of a Love Story/L’impossible objet (1973)
The Iceman Cometh (1973)
99 and 44 % Dead! / Refroidi à 99% (1974)

Vu aucun des trois : L’Impossible objet est une tentative de marcher sur les traces des auteurs européens et Coursodon et Tavernier en parlent comme d’un ratage complet malgré une belle ambition. The Iceman Cometh adapte une pièce du répertoire pour une série éphémère de longs-métrages reprenant les textes classiques in extenso, il semblerait que ce soit le meilleur de la série mais que l’exploit n’était pas trop difficile. La distribution est assez fortiche dont Lee Marvin, Jeff Bridges et Robert Ryan et Fredric March en fin de vie. Pour Refroidi à 99%, même motif même punition que The Extraordinary Seaman, c’est une comédie, mais aurait-elle été aussi drôle que la coupe de cheveux de Scott Glenn dans The Challenge ? Vous le saurez dans le prochain épisode (pas avant deux semaines).

Citation:
On peut le voir sur Paramount Channel en ce moment. Je crois que s’il est si raté c’est surtout à cause du monstre, espèce de « salami géant » comma l’a qualifié un critique, qui bouge comme les créatures des films de la Toho.


J'aime bien le look du monstre, il y a un côté un peu craspec mais Frankenheimer ne sait absolument pas comment le filmer sauf dans une séquence où on essaie d'avoir pitié pour le bébé monstre, ce qui est intéressant dans un film de ce genre. Mais oui, entre ça et A armes égales (que j'apprécie un chouia plus), on est dans le creux de la vague du réal (enfin un des creux).

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 Sujet du message: Re: John Frankenheimer
MessagePosté: 20 Aoû 2022, 07:55 
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Il va falloir que je matte les parachutistes et le pays de la violence


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 Sujet du message: Re: John Frankenheimer
MessagePosté: 20 Aoû 2022, 17:10 
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Intéressant, merci Lepers. Par contre, ça me donne pas envie de découvrir plus avant sa filmographie ou les films que tu préconises, qui ont l'air d'être dans une veine Robert Mulliganesque. J'aime beaucoup Ronin et je serais curieux de découvrir The Story of a Love Story, ne serait-ce que parce que j'aime bien le roman de Nicholas Mosley dont c'est une adaptation.


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 Sujet du message: Re: John Frankenheimer
MessagePosté: 03 Nov 2022, 12:00 
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Bon, deux semaines, deux mois, quatre… hein, tout ça…
Reprenons avec la carrière de Frankenheimer qui n’est pas au beau fixe.

Santé ! (1975-1985)

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French Connection II (1975) : a la lourde tâche d’être, comme son nom l’indique, la suite du premier et on est bien évidemment loin du shoot d’adrénaline de Friedkin. Gene Hackman, devenu entretemps une superstar, a dû souffler le nom de Frankenheimer pour lui permettre d’imposer ses conditions, à savoir passer 80 % du film allongé ou assis en plein trip ou en cure de désintox, ce qui donne un film un peu pété au niveau du rythme, avec un ventre mou depardieusien dans lequel Popeye devient, gasp !, son pire ennemi, un pauvre junkie en manque.
Frankenheimer réussit néanmoins une vendetta brutale qui débute par notre héros foutant le feu au lieu de son emprisonnement puis une traque dans les rues de ce dépotoir à ciel ouvert qu’est Marseille pour finir sur le port dans une tentative de tenir la dragée haute au final ténébreux du premier film avec un climax sec comme une balle perdue. De plus, comme d’autres séquelles, Gremlins 2, Les Derniers Jedi, on est dans une déconstruction du héros (un facho inefficace) et une critique de ce qui a fonctionné et fait le succès de l’original : en terre inconnue, Popeye n’arrive à rien avec ses méthodes de SS : le speech de Poughkeepsie ne fonctionne pas parce que le prévenu bite que dalle à l’anglais, et même la méthode de drague fait chou blanc. Super séquence d’ailleurs dans le bar, un peu traînante et qui retranscrit bien le choc des cultures.
Toujours dans un souci de coller au plus près de la réalité, on notera que Philippe Léotard fait partie des truands.

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Black Sunday (1977) : après le succès modeste mais avéré de French Connection II, Frankenheimer retombe dans les bonnes grâces des studios et c’est le chien fou Robert Evans (Le Parrain, Chinatown) qui lui confie l’adaptation d’un roman de Thomas Harris (après l’abandon du projet par je-ne-sais-plus-qui, j’ai oublié de le noter). Conçu comme un mélange entre les films-catastrophe qui font florès sur les écrans et le méga-carton de Jaws qui a tout chamboulé, Black Sunday est un film qui a le cul entre au moins quatre chaises mais qui, personnellement, m’a bien botté. On y suit la traque par deux agents du Mossad d’une terroriste palestinienne qui s’acoquine avec un vétéran traumatisé du Vietnam. Le duo a prévu de détourner le dirigeable qui va filmer le Superbowl (et que le vétéran est censé piloter) et de le transformer en bombe à fragmentation géante.
Comme l’on est chez Thomas Harris, on passe autant de temps avec les chasseurs qu’avec les proies et le montage enlevé ainsi que la description méthodique de l’enquête en alternance avec la planification de l’attentat semblent inspirer Frankenheimer qui emballe le tout avec un punch absent de ses films depuis un bail, aidé par une photo à l’avenant de John A. Alonzo (Chinatown bis, Scarface mais surtout Commando sur les stups de Sidney J. Furie avec Billy Dee Williams et Richard Pryor). On peut noter ainsi la fusillade en pleine rue de Miami, l’assassinat dans l’hôpital, et le test de la bombe à fragmentation qui rappelle également les envies de métamorphoses de Buffalo Bill et du Dragon Rouge dans les autres récits de Harris.
Frankenheimer se flanque même d’une apparition à la Hitchcock lors du Super Bowl, mais malgré l’aspect impressionnant de la retranscription du match et des projections-test enthousiastes, le film est un bide sévère.

Déjà, on peut noter que le sujet est pour le moins problématique, même si Frankenheimer fait un beau travail en révélant petit à petit les passés du perso de Robert Shaw (dont on nous explique à demi-mot et par un détail visuel que toute la famille a été exterminée dans les camps) et de celui de Marthe Keller qui a vu elle aussi sa vie dévastée dans les camps de réfugiés palestiniens. Cerise sur le gâteau, le tueur du Mossad qu’incarne Shaw est surnommé « la solution finale » et semble totalement déshumanisé, son seul acte de bonté ayant été d’épargner la terroriste qu’il a surpris sous la douche en état de vulnérabilité totale.
Tout ceci rend d’autant plus décevant le final où on tombe en plein Irwin Allen avec le dirigeable qui manque de se crasher sur la foule, le tout à coups de transparences dégueulasses. Cinq minutes minables sur 2h23 mais qui laissent un sale goût à l’arrivée, c’est la cruelle incertitude du sport. Mais surtout, ça transforme l'acte final en aventure super-héroïque là où le film montrait que l'agent secret plongeait définitivement dans un cercle de vengeance sans fin.

Enfin, pour attirer le chaland, on a piqué à Jaws Robert Shaw et John Williams, autrement dit personne pour le grand-public, et pour le vétéran traumatisé, au lieu de Robert Redford, on a Bruce Dern qui s’en tire dans son style habituel à cracher ses répliques la mine défaite, ce qui en fait un personnage convaincant mais plus pathétique que sympathique.
Si on ajoute à ça que 1977, c’est l’année de Star Wars, que veux-tu ma pauvre Lucette, ne serait-ce pas un peu son Sorcerer ? Bon, on va pas aller jusqu’ici mais quand même il y a de ça.
Pour le reste, vous aurez évidemment tous noté la présence de Walter Gotell, inoubliable Général Gogol de L’espion qui m’aimait, Rien que pour vos yeux, et autre Dangereusement vôtre. Serviteur.

Prophecy (1979) : celui-ci, on en a déjà parlé au-dessus avec bmntmp, c’est une plantade d’autant plus rageante que Frankenheimer, le nez dans une bouteille de gin, foire ce qu’il réussissait sans peine vingt ans auparavant, à savoir les débats entre factions.
Ici, des autochtones et une compagnie de papier qui s’en donne un peu trop à cœur joie dans la déforestation et la pollution des eaux sur le mode « on s’en fout, on déverse tout dans les règles ». Tout le monde se prend donc un sévère retour de bâton par Dame Nature et des animaux mutants un poil énervés. Il y a aussi Talia Shire et son mari, assez péteux, qui ne veut pas faire de gosses alors qu’elle si, mais voilà elle tombe enceinte et boit la flotte empoisonnée et… rien, le final c’est juste eux et quelques survivants qui tentent d’échapper aux streums dans des séquences heureusement assez muettes et mouvementées. Au passage, Talia Shire aura pris sous son aile un bébé monstre mais il essaie de la bouffer donc je ne sais pas trop où veut en venir le film. Nulle part, sûrement.
En revanche, concernant les scènes dans l’usine, elles sont pour une fois crédibles puisque loin de l’imagerie de mecs qui n’ont jamais mis un pied dedans : on voit juste des gars au boulot avec tout l’équipement de sécurité nécessaire.



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The Challenge / À armes égales
(1982) : ça aussi, ce n’est pas très bon, un des rares films (le seul peut-être) produit par une branche ciné de la chaîne de télé CBS, avec, trivia, John Sayles qui a réécrit le film pour le situer au Japon et non plus en Chine, et Steven Seagal qui a géré les combats. Toshiro Mifune et Scott Glenn ont visiblement bien accroché et déploré la qualité médiocre de l’ensemble qui se suit tout de même sans déplaisir quand on est crevés et qu’on n’a pas envie de zapper. L’exposition est assez enlevée bien que confuse (deux frères qui sont à la recherche de deux sabres mais on commence avec la mort de son fils handicapé ou je ne sais quoi… bref). Il y a aussi un gamin horripilant qui semble avoir été intégré au forceps à la dernière minute pour qu’on ressente quelque chose. Ce sera de l’agacement.
Comme Scott Glenn a une tête de vieux, on lui a fait une coupe de jeune et ça ne fonctionne pas. Ce qui marche le mieux c’est une séquence dans un bar au Japon, on sent que l’esprit de Frankenheimer était quelque part mais où… allez savoir.

The Rainmaker (1982) : captation d’une pièce complètement poussiéreuse de (copier/coller) Richard N. Nash, un auteur dont je ne sais rien sinon qu’il avait déjà écrit le scénario du film tiré de son œuvre en 1956 avec Burt Lancaster et Katharine Hepburn (réal : Jospeh Anthony, le frère de Richard).

Après avoir échoué à se caser une vieille fille revient dans son foyer auprès de son père à la ramasse et ses frangins dont un sale con réac, avant de se laisser séduire par un bonimenteur qui prétend, en plein sécheresse, être capable d’invoquer l’orage. Une fois qu’ils ont batifolé dans le foin, les grandes eaux se déclenchent. Comme vous voyez, c’est assez subtil. Frankenheimer trousse tout ça avec les moyens du bord (une dramatique télé pour la prestigieuse HBO) et s’en sort assez bien, puisque ses cadrages sauvent le tout de l’ennui. On note par exemple que lorsqu’arrive la pluie on se trouve pour la seule fois en dehors de la maisonnée, ce genre de trucs… La pièce est dispo sur YouTube, ça fait deux heures et quinze minutes, je mouille ma chemise pour vous, j’espère que vous le noterez.
Le casting aide aussi à faire passer la pilule même si c’est du grand n’importe quoi : l'adorable Tuesday Weld fait la vieille fille et le sympathique Tommy Lee Jones le bonimenteur, tandis que James Cromwell joue James Cameron.

The Holcroft Covenant/Le pacte Holcroft
(1985) : pas vu, y a Michael Caine, c’est tiré de Robert Ludlum et c’est produit par la Cannon, donc on peut imaginer sans peine le résultat.

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 Sujet du message: Re: John Frankenheimer
MessagePosté: 03 Nov 2022, 14:37 
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Très cool ce compte rendu merci. Je suis allé voir 5mn de The Rainmaker et je sais pas comment tu as tenu 2h15 :mrgreen:.

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 Sujet du message: Re: John Frankenheimer
MessagePosté: 03 Nov 2022, 14:51 
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 Sujet du message: Re: John Frankenheimer
MessagePosté: 03 Nov 2022, 16:16 
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Art Core a écrit:
Très cool ce compte rendu merci. Je suis allé voir 5mn de The Rainmaker et je sais pas comment tu as tenu 2h15 :mrgreen:.


J'avoue que moi aussi, mais j'étais vraiment intéressé par le fait qu'il retrouvait un exercice de ses débuts.

Mais oui, plonger dans la filmo de ce réal, même si c'était passionnant et étrange... j'en ai chié.


Hop, je finis le tour d'horizon :


Sobriété (1985-1991)

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52 Pick-Up/Paiement Cash (1987) : toujours pour la Cannon, Frankenheimer adapte un roman d’Elmore Leonard que les margoulins Golan et Globus avaient déjà demandé à l’auteur de transposer dans le contexte israélien avec The Ambassador. Frankenheimer capte particulièrement bien le style de l’écrivain dans la première moitié du film qui conte comment une bande de truands dirigée par un pornographe (l’excellent John Glover) tente de faire chanter un industriel (Roy Scheider) qu’ils ont filmé en flagrant délit d’adultère. Situé dans un Los Angeles crapoteux, le film s’enfonce progressivement dans le glauque réactionnaire au fur et à mesure que le « héros », un vétéran de la Corée, retourne la situation en foutant le binz au sein du petit groupe de criminels. Représentatif de son époque reaganienne, le final voit Roy Scheider retrouver son mojo en explosant aux quatre vents l’engeance des proxénètes, des strip-teaseuses, des blacks, des gays, des drogués et de tous ceux qui cochent toutes les cases du bingo insécurité de cette fin de décennie. Et si on sent bien que Frankenheimer a essayé de soigner le portrait de son épouse jouée par l’ex-sex-symbol Ann-Margret, celle-ci finit également droguée et dans la fange.

D’ailleurs, c’est à cette époque, il semblerait, que Michael Bay tente d’enquêter sur ses géniteurs et le film dépeint John Glover comme un aspirant-vidéaste qui donne dans le porno et qui va essayer de soutirer son argent rudement gagné et convoité par le fisc à un honnête et ingénieux self-made man tout en foutant le bazar dans son couple. Mais si ça se trouve, c’est une coïncidence, j’en sais rien.

Riviera (1987) : signé Alan Smithee, toi-même, tu sais.

Dead Bang (1989) : polar bizarroïde dans lequel Don Johnson enquête sur un braquage qui a mal tourné et causé la mort d’un flic. En remontant le fil des indices, il met à jour une conspiration d’extrême-droite en plein cœur des États-Unis… mais alors littéralement, parce que tout finit dans une mine, la même que vous voyiez toutes les semaines dans MacGuyver ou l’Agence tous risques. Oui, Ken Adam ne s’est pas fait chier ce coup-ci (d’ailleurs, on ne trouve trace d’aucune référence dans le bouquin qui lui a été consacré il y a quelques années).
Le fait que le film enchaîne différents sidekicks au héros sans jamais en garder aucun et qu’ils disparaissent tous après lui avoir donné un indice (sauf William Forsythe en fédéral cul-serré) renforce l'aspect branlant et amateur de l’ensemble (l’histoire a été fournie par un véritable flic qui n’avait aucune expérience auparavant). En revanche, le décorum de Noël et le côté loser de Don Johnson (il vomit sur un suspect en essayant de le pourchasser) apportent un petit côté Shane Black pas désagréable.
Il y a aussi Penelope Ann Miller pour donner un aperçu du problème.

The Fourth War/La quatrième guerre (1990) et Year of the Gun/L’année de plomb (1991) : j’ai vu le premier mais aucun souvenir et pas le second.


Fin de parcours(1992-2002) :

Maniac at Large/À la place du mort (1992) : un épisode des Contes de la Crypte tiré de la quatrième saison et basé sur l’histoire d’ouverture de Crime Suspenstories #27 (dessins de George Evans). Une bibliothécaire apeurée est persuadée qu’un tueur qui sème la panique dans le quartier se trouve dans la bibliothèque alors qu’elle fait des heures sup’. Un épisode très réussi dans lequel Frankenheimer utilise avec brio le lieu unique où se déroule l'action dont il montre rapidement toute la topographie. Le retournement final est attendu mais bien troussé et rentre dans son thème de la société qui broie l'individu. On y retrouve aussi Salome Janes de Seconds en supérieure acariâtre.

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Against the Wall/La Révolte d’Attica (1994) : Frankenheimer se refait définitivement une santé en retournant à la télévision. Échoué sur le projet parce qu’il ne trouvait plus de boulot sur grand écran, le réalisateur retrouve la patate avec selon ses termes une petite équipe particulièrement motivée. Un maton (Kyle MacLachlan) et un prisonnier (Samuel L. Jackson) débarquent le même jour dans la prison d’Attica quelque temps avant que les mauvais traitements infligés aux prisonniers et le refus de la direction de négocier un iota ne conduisent à l’embrasement du pénitencier.
HBO oblige, et quelques années avant Oz, les sévices et le train-train quotidien agressif de la prison sont retranscrits sans fard tout comme la révolte réellement brutale. Frankenheimer assure autant le spectacle que le propos comme ce plan-séquence qui, après le premier jour d’émeute, montre l’étendue des dégâts en suivant plusieurs personnages dont Samuel Jackson qui contemple le paysage, des flammes se reflétant dans ses lunettes. Il réussit même certains passages obligés lourdingues comme l’inévitable engueulade entre le maton et sa copine hippie, dans un bar. Frankenheimer joue sur la disposition du bar et la distance entre le comptoir et la porte en faisant revenir le maton auprès de ses collègues appâté par leur chant comme celui des sirènes.
Loin de verser dans le sentimentalisme, le film nous épargne l’amitié entre le gardien et le prisonnier mais montre qu’une fois en charge les détenus sont aussi tyranniques que leurs oppresseurs. Le final voit la charge des autorités évoquer les interventions armées au Vietnam avec ces hélicos et ses fumigènes, et si l’on réunit le gardien et le prisonnier c’est par une rafale des balles qui les atteint de concert.

The Burning Season: The Chico Mendes Story/La forêt de tous les dangers (1994) : moins réussi, le téléfilm suivant met en scène le regretté Raul Julia, en pleine souffrance physique due au cancer, qui incarne une figure historique et martyr de la contestation au Brésil contre la déforestation. Là, où Against the Wall allait à cent à l’heure et droit au but, Burning Season est alourdi par les anecdotes personnelles sur le héros, mais est assez efficace sur la dénonciation de la collusion entre les intérêts capitalistes et les politiciens véreux dans la région. Le personnage de « méchant » de Tomas Milian est d’ailleurs plutôt intéressant quand il est montré comme un rancher qui défend ses terres, perverti par l’avidité au gain, mais qui est en fait un pion, le bras armé des vrais magnats. Dès que le tvfilm emprunte au western, il monte d’un cran comme avec la répression brutale d’une manifestation pacifique remarquablement troussée.


The Island of Dr Moreau/L’île du Dr Moreau (1996) :
pas revu mais je suppose que Müller et QGJ ont tout dit.

Andersonville (1996) et George Wallace (1997) : pas vu ces deux mini-séries pour la tv.



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Ronin (1998) : dernier bon film de Frankenheimer, certains disent "grand film" et il est vrai que la récente sortie chez Arrow d’une restauration en blu ray rendant justice au travail du directeur photo apporte de l’eau au moulin de ses laudateurs. Une équipe de mercenaires doit récupérer une mallette mais est trahie par l’un d’entre eux. Canevas classique et hautement évocateur, renforcé par le très bon boulot, non crédité, de David Mamet. Le commentaire audio est passionnant puisque Frankenheimer revient sur tous les choix de montage et de cadrage, privilégiant notamment des plans rassemblant l’équipe. Les cascades et les poursuites sont réputées à juste titre, la sensation de vitesse réelle étant palpable, et quelques plans se retrouvent même dans Mission: Impossible : Fallout.
Le souci c’est justement l’envie de faire un Mission: Impossible taillé pour De Niro, et que lui et Jean Reno deviennent les deux personnages les moins intéressants du film, constamment bringuebalés à droite à gauche pendant que le camp adverse fait sa popote (dont un très bon Stellan Skarsgard en tueur crapoteux). Dommage aussi de ne pas avoir gardé la fin alternative qui voit une sentence de plus s’abattre sur un membre du groupe et qui achève de dépeindre la dangerosité du milieu.


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Reindeer Games/Piège fatal (2000) : pas revu, trouvé ça pourrigolo avec ses twists à n'en plus finir, mais je me souviens de m’être dit qu’après Mon ami Joe, on tenait une star avec Charlize Theron. Le futur ne m’a pas donné tort.


The Hire: Ambush (2002) : fait partie d’un ensemble de courts-métrages publicitaires réalisés par un pot-pourri de metteurs en scène, dont Tony Scott, John Woo, Wong Kar-Wai, Guy Ritchie ou Alejandro Gonzales Inarritu. Frankenheimer en réalise le premier qui introduit le personnage du Driver, joué par Clive Owen, qui parvient ici à flouer des poursuivants en se dissimulant dans l’obscurité. Sympa, comme une scène coupée de Ronin.


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Path to War/Sur le chemin de la guerre (2002) : dans le bouquin de Gerald Pratley consacré à la première partie de sa carrière (The Cinema of John Frankenheimer, publié juste avant Les Parachutistes arrivent), Franknheimer revient sur son soutien politique aux Kennedy et notamment à Robert Kennedy pour qui il devait servir de cinéaste officiel. Les propos sont ceux d’un libéral upper-class bon teint, qui déclare ne pas avoir voté lors de l’élection de 1968 malgré son mépris envers Nixon et qu’il est un peu circonspect concernant le tournant radical de la lutte pour les droits civiques et l’émergence des Black panthers. Bref, l’Amérique et son cinéma vont se prendre le tournant des années 70.

Situé entre la représentation idéalisée de la série en cours The West Wing (plein de gens super concernés qui bataillent dur pour faire valoir leurs points de vue), et celle plus cynique qui allait naître avec Mad Men (les mêmes sont en fait complètement à la ramasse sur ce qui se passe autour d’eux), Path to War a pour lui une distribution plus que solide (Gambon, Sutherland, Baldwin… on a connu pire) et un sujet qui est assez étonnant dans la tradition du ciné américain : celui de montrer le président comme un perdant absolu.

Le traitement de la présidence Lyndon Johnson dans Path to War tient en effet sur deux trames qui, tels deux trains sans conducteur, vont être amenées à se percuter : l’une est l’escalade dans l’intervention armée au Vietnam qui va grever le budget alloué aux dépenses sociales, l’autre est la surdité dont est victime Johnson envers ces mêmes revendications qu’il pense contenir en jouant à chaque fois sur deux tableaux. Voir ainsi sa roublardise quand il tente de convaincre le gouverneur ségrégationniste George Wallace (interprété par Gary Sinise comme dans la mini-série déjà réalisée par Frankenheimer) de laisser la garde nationale intervenir dans son état de l’Alabama. Dans les deux cas, Johnson ne comprend ni son pays de l’intérieur ni à l’extérieur. Le tournant advient quand un Quaker appelé Norman Morrison s’immole devant le Pentagone en protestation contre la guerre au Vietnam. Le téléfilm suit petit à petit le délitement du mandat Johnson qui finit par son retrait de la campagne en 1968, et son allocution qui pue la défaite. Est-ce qu’il y a également une part d’autoportrait dans cette histoire d’un homme qui débute au sommet dans les années 60, président le mieux élu et qui a toutes les cartes en main pour changer le pays, et qui finit terrassé dans l’ombre son prédécesseur, rongé par les mauvaises décisions et des erreurs de timing ? Toujours est-il que la dernière image que filme Frankenheimer est celle de Johnson hagard et encadré par les caméras et une équipe technique, qui quitte cette mise en scène. Le tout via une plongée qui le montre sortir, soutenu par sa famille. Une sortie par la petite porte.

Top :


1. Le Pays de la violence
2. Les parachutistes arrivent
3. Black Sunday
4. Le Train
5. Sept jours en mai
6. Paiement Cash
7. Grand Prix
8. Seconds
9. Ronin
10. La révolte d’Attica

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 Sujet du message: Re: John Frankenheimer
MessagePosté: 25 Déc 2022, 10:26 
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En effet Le Pays de la Violence est un chef d'oeuvre. Proche de ce qu'Altman va faire peu après, mais plus âpre, plus classique, (bien qu'Altman soit aussi plutôt un concurrent qu'une figure représentative du Nouvel Hollywood) et moins cynique. C'est aussi une transition avec le cinéma d'Arthur Penn (Estelle Parsons superbe, par exemple quand elle amène la réplique dans un monde où la mort existe, il ne devrait pas y avoir de place pour la haine qu'elle a soi-disant lu dans un "magazine féminin", son personnage est beaucoup plus fort que dans Bonnie and Clyde) mais sans la démagogie du recours à Warren Beatty, à l'idée d'une rédemption par le désir, qu'il concerne le personnage fictif ou le statut d'artiste écrivant réellement ce personnage (le désir devient ainsi une sorte de métalangage sur l'origine du film et sa fonction à la fois de critique et de remplacement du réel). On peut aussi penser à la Dernière Corvée d'Hal Asbhy (qui est en fait un peu plus vieux que Frankenheimer) pour le regard politique et social, mais chez Ashby la psychanalyse est une explication, une mise à distance extérieure au film, ici elle produit les situations, les personnages sont joués par des mythes qu'ils connaissent moins bien que le réel social.
Comme le dit bien Lepers Gregory Peck est en effet emprunté et grotesque dans la scène du tribunal. Tuesday Weld ne l'est d'ailleurs guère moins en épeluchant benoîtement les symboles et sous-entendus phalliques omniprésents oh vous savez je sais reconnaître le drapeau américain, mais c'est vrai que je n'en ai jamais vu un aussi gros, oh je crois que votre Dr Pepper revient dans les narines :mrgreen: (bien qu'elle soit peut-être déjà dans la manipulation et la comedie). Mais il faut dire que quand Peck explique au mec de Washington pourquoi les gens trafiquent ici de l'alcool, qu'il n'y a pas beaucoup de différence entre la peur du déclassement social et l'ennui, il a (pour la seule fois du film) les idées claires et le sait.

Personnage fascinant que Peck autiste avec un pouvoir qui ne représente plus rien pour lui, capable de ne parler (ou plutôt de répondre) aux femmes que depuis la dernière marche des escaliers (la parole est ici le contraire de l'érotisme, il faudrait que le monde reste silencieux pour être sauvé, pré-politique, plutôt que rebelle), sans rien qui ne soit chez lui intermédiaire entre les souvenirs d'une enfance dont il ne perçoit pas l'amertume et le désir de tout recommencer ailleurs. Et Frankenheimer parvient à faire d'intriguants plans du point de vue des fantômes (ceux du nationalisme-régionamisme terrien), où la caméra enveloppe et tourne dans le silence autour de maisons entières, à reconstruire les images primitives d'un paysage aussi oedipien que la famille, élégantes, morbides et précises, après lesquelles David Lynch a couru toute sa vie.

6/6

Et oui, on voit le geste de relever la braguette et finir la miction au moment où il entend la voix de sa femme au début. Genre tout le propos de Déliverance condensé en 10 secondes.
Et en effet le bruit de bourdonnement radioactif qui inonde tout le paysage quand il comprend enfin qui est le perso de Tuesday Weld est :shock:

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Sinon dans les trucs que j'ai appris aujourd'hui Tuesday Weld avait 27 ans à l'époque (son personnage en a bien 10 de moins) et venait de la branche fauchée par une histoire à la Dickens d'une richissime famille noble americano-britannique (marrant de la voir, d'ailleurs plutôt bien, prendre l'accent du Sud à coup de phrases qui commencent par Ain't sans sujet)

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Dernière édition par Vieux-Gontrand le 26 Déc 2022, 21:26, édité 3 fois.

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 Sujet du message: Re: John Frankenheimer
MessagePosté: 25 Déc 2022, 13:08 
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Ca mériterait d'ouvrir des topics dédiés.

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 Sujet du message: Re: John Frankenheimer
MessagePosté: 25 Déc 2022, 13:12 
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Cela effacerait le geste de Julien Lepers qui doit être de signaler que la politique des auteurs marche en fait particulièrement bien à partir d'une cinéphilie à la Tavernier (à qui ont doit le titre français, qui n'est pas si pourri que cela)

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 Sujet du message: Re: John Frankenheimer
MessagePosté: 09 Mai 2023, 09:14 
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Black Sunday (1977)

Avec retard sur les excellents mises en lumière du regretté JulienLepers je rattrape mes lacunes dans la filmographie de Frankheimer avec un retreint certain.

Je commence donc par ce film d'espionnage préparatif d'attentat dont la grande qualité est de suivre également le parcours à des terroristes et les traqueurs. Il a aussi le mérite de ne pas transformer en monstres ou saints aucun des camps. Robert Shaw est ainsi montré en survivant de l’holocauste ne trouvant goût à la vie que dans la chasse violente et la mise à mort des terroristes. Il a aussi la meilleure scène du film ou on découvre sur un lit d’hôpital et à mots cachés son terrible passé et ce qui est arrivé à sa famille.
Le film n' est pas parfait essentiellement car il est trop long et parce que Bruce Dern manque de subtilité nécessaire dans son jeu pour incarner convenablement son personnage. Ce n'est heureusement pas le cas de Mark Keller dans le rôle de la véritable tête pensante de ce projet d'attentat réussissant à lui apporter un mixte de fragilité, de force, de malice et d'abnégation. Le film parait aussi très crédible donc souvent glaçant. Il est dommage ( même si contrairement à JulienLepers j'apprécie son coté spectaculaire) que le final de la poursuite dirigeable et hélicoptère avec Shaw en équilibre perde ce réalisme pour un coté Jean Paul Belmondo like.
A signaler aussi une bande son parfaitement anonyme de John Williams.

Une bonne découverte


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 Sujet du message: Re: John Frankenheimer
MessagePosté: 08 Jan 2024, 15:23 
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Seconds

Je continue ma découverte assez lente des films de Frankenheimer mis en avant par JulienLepers. La découverte de seconds a été une belle claque. C'est quasi parfait sur tous les points. Superbe générique d'ouverture. Partition musicale très réussie. Une réalisation exmplaire avec un noir et blanc profond, des multiples tentatives d’innovation visuelle toutes réussies. Un casting au petit oignon. Un scénario malin, particulièrement bien mené avec une conclusion forte. Y a pas de gras dans le film. Tout sert au récit. On se croirait dans un épisode réussi de la 4 ème dimension.

Mon film préféré du Monsieur avec le train pour l'instant.


Les cavaliers

L'avis de JulienLepers est assez juste mais je serais moins sévère. Rien que pour les scènes de bouzkachi, le film mérite d'être vu. J'aime les films et récits d'aventure donc j'ai adhéré. Il est juste dommage que tous les personnages soient antipathiques au possible.


Dernière édition par Mr Degryse le 08 Jan 2024, 18:19, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: John Frankenheimer
MessagePosté: 08 Jan 2024, 17:59 
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Inscription: 02 Jan 2024, 18:55
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Bravo pour cette présentation d'un cinéaste "connu" et qui n'as pas, c'est le moins qu'on puisse dire, fait que de bons films, ca serait meme le contraire...
Assez d'accord avec toutes vos critiques concernant son oeuvre.
Néanmoins, je dirais que " Le Prisonnier d'Alcatraz", de 1962, reste pour moi son film majeur, assez fidélement inspiré de la vie de Robert Stroud, incarné içi par un Burt Lancaster au top.
C'est pour moi son meilleur film.
Pour ce qui est de "Ronin", bizarrement descendu a sa sortie, il fut au final une agréable surprise, qu'il est toujours agréable de revoir, avec S.Skarsgard ( le héros du mythique " Refroidis"), entouré de deux vedettes " internationales", et qui envoies quand meme, question action pure, du lourd..Pour le reste, je crois que vous avez tout dit..Avec talent !


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 Sujet du message: Re: John Frankenheimer
MessagePosté: 08 Jan 2024, 18:18 
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Inscription: 14 Déc 2018, 20:03
Messages: 1949
Merci. *vérifie en tapotant avec un petit bâton si ce n'est pas un bot*


Mr Degryse a écrit:

Les cavaliers

L'avis de JulienLepers est assez juste mais je serais moins sévère. Rien que pour les scènes de bouzkachi, le film mérite d'être vu. J'aime les fils et récits d'aventure donc j'ai adhéré. Il est juste dommage que tous les personnages soient antipathiques au possible.


Je sais pas s'ils sont antipathiques ou juste unidimensionnels. (chiants, en gros)

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 Sujet du message: Re: John Frankenheimer
MessagePosté: 08 Jan 2024, 19:59 
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Le mythique Refroidis ? Je suis sans mauvais de mot chauffé mais je sens le mauvais bail.


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