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 Sujet du message: Re: Les films "lovecraftiens"
MessagePosté: 01 Déc 2021, 18:42 
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Mother d'Aronofsky sans doute aussi (et plus diffusément tous ses films).

Je me demande si antichirst de Lars von Trier ne pourrait pas aussi s'y rattacher?

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Sur un secrétaire, j'avise deux statuettes de chevaux : minuscules petites têtes sur des corps puissants et ballonés de percherons. Sont-ils africains ? Étrusques ?
- Ce sont des fromages. On me les envoie de Calabre.


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 Sujet du message: Re: Les films "lovecraftiens"
MessagePosté: 01 Déc 2021, 22:49 
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The Mist un peu, peut-être ?


Pour les monstres gigantesques et partiellement invisibles, oui. Pour l'accent sur la famille, en tout cas la relation père/fils, et tout le huis clos en mode micro-société qui se polarise, on est dans de la tambouille King/Darabont.

Citation:
Le film le plus lovecraftien que j’ai vu, qui distille cette horreur métaphysique qui lui est propre, mettant aussi en scène le combat rationnel de ses héros face aux forces de l’irrationnel et de l’insondable, c’est Prince of Darkness.


Oui, et d'ailleurs c'est ce qui a toujours fait pour moi le charme unique de ce Carpenter pourtant timide, voire même paresseux dans ses effets horrifiques. J'aime beaucoup le duo Pleasance/Wong et leurs dialogues, la terreur sourde, sidérée et défaitiste du prêtre, l'enthousiasme assuré mais tout de même inquiet du prof (et ce mullet, la vache), toute la tension qui s'en dégage et qui évite très soigneusement la fadeur qu'on aurait pu attendre de la sempiternelle opposition entre foi et science. C'est le plus densément écrit de ses films, niveaux dialogues, voire monologues, et ça contribue grandement à l'atmosphère pré-apocalyptique du film. Beaucoup plus que ces faux zombies manneken pis.

L'au-delà de Fulci tape dedans aussi, avec sa vague histoire de livre maudit. Frayeurs également.

En tout cas on voit bien que ça vient surtout colorer par touches chaque film, c'est jamais vraiment un travail d'ensemble. Les nouvelles de base ne sont pas cinégéniques.

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 Sujet du message: Re: Les films "lovecraftiens"
MessagePosté: 01 Déc 2021, 22:57 
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Pour Lars von trier : life on earth is evil et we are alone (Justine dans melancholia) donc non.
Et je vois pas le rapport avec Mother


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 Sujet du message: Re: Les films "lovecraftiens"
MessagePosté: 01 Déc 2021, 23:35 
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Müller a écrit:
Oui, et d'ailleurs c'est ce qui a toujours fait pour moi le charme unique de ce Carpenter pourtant timide, voire même paresseux dans ses effets horrifiques. J'aime beaucoup le duo Pleasance/Wong et leurs dialogues, la terreur sourde, sidérée et défaitiste du prêtre, l'enthousiasme assuré mais tout de même inquiet du prof (et ce mullet, la vache), toute la tension qui s'en dégage et qui évite très soigneusement la fadeur qu'on aurait pu attendre de la sempiternelle opposition entre foi et science. C'est le plus densément écrit de ses films, niveaux dialogues, voire monologues, et ça contribue grandement à l'atmosphère pré-apocalyptique du film. Beaucoup plus que ces faux zombies manneken pis.


En tout cas on voit bien que ça vient surtout colorer par touches chaque film, c'est jamais vraiment un travail d'ensemble. Les nouvelles de base ne sont pas cinégéniques.


Color of out of space est raté mais à cause d'un grotesque qui n'est pas dans les bouquins (que je connais mal mais que j'apprécie). Pour moi, c'est un matériau cinématographique mais c'est peut-être trop abstrait pour rentrer dans les clous de ce qu'est un long-métrage classique, avec développement narratif, psychologie relatable etc. The Endless, peut-être déjà évoqué, creusait cette forme d'angoisse sourde même si j'étais pas fan mais typiquement le film qui plaît aux fans de Lovecraft.


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 Sujet du message: Re: Les films "lovecraftiens"
MessagePosté: 02 Déc 2021, 20:12 
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Oui, j'ai mentionné The Endless à la page précédente. J'en garde le souvenir d'un film un peu long et chiant, mais sans être agaçant non plus, porté par des acteurs, une écriture et une intentionnalité agréables et sincères. Et les incursions lovecraftiennes sont pas mal, voire même marquantes (ex : ce qui tire la corde pendant le "jeu"). Toute la séquence de la
boucle fatale où les personnages finissent toujours par mourir
est apparemment la suite directe du premier film de ce duo de réalisateurs, que je n'ai pas vu.

En y repensant, il y a pas mal de points communs avec Midsommar, que j'avais trouvé à chier. Donc un bon point de plus.

Citation:
Pour moi, c'est un matériau cinématographique mais c'est peut-être trop abstrait pour rentrer dans les clous de ce qu'est un long-métrage classique, avec développement narratif, psychologie relatable etc.


En effet, Lovecraft mise toujours sur un narrateur qui n'est jamais défini autrement que par son déroulé de plus en plus suffocant de l'abomination dont il a été témoin (d'ailleurs, quand on y pense, toutes ses nouvelles sont des call out). Le cinéma, rien que par le casting, dissipe déjà ce dénuement en attirant l'attention sur une voix, un style, les manniérismes d'un acteur, va chercher à étoffer l'aridité originale en créant des enjeux plus classiques (famille, valeurs, civilisation)... On sort fatalement du dispotif du lanceur d'alerte seul face à son journal intime, dernier recours avant la mort, ultime tentative de témoigner. A la rigueur, le format found footage... Si tu ne l'as pas encore fait, je te conseille de jeter un oeil à Banshee Chapter qui joue un peu formellement avec tout ça.

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 Sujet du message: Re: Les films "lovecraftiens"
MessagePosté: 03 Déc 2021, 12:22 
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IGN a écrit:
Guillermo del Toro Wants to Make a Weirder Version of At the Mountains of Madness With Netflix

Del Toro could finally capture his eldritch whale.

Director Guillermo del Toro has tried a couple of times to bring H.P. Lovecraft’s At the Mountains of Madness to the big screen but was foiled by unknowable powers from beyond the cosmos (studio executives). Now, del Toro’s relationship with Netflix could revive the project once more.

Speaking on Fangoria’s Stephen King podcast the Kingcast, del Toro was asked whether his new partnership with Netflix could open the door for another try at bringing the eldritch horror story to life.

“Take a wild guess which were the first projects I presented [to Netflix], you know? I went through the cupboards and found [The Count of] Monte Cristo, [At the] Mountains of Madness. Those were a couple of the ones I presented first,” del Toro says.


The 31 Best Modern Horror Movies

While del Toro didn’t reveal the response to his presentation, he said that the project would change considerably from when he first tried to develop At the Mountains of Madness as a movie, saying the script he co-wrote 15 years ago “is not the screenplay I would do now, so I need to do a rewrite.”

“Not only to scale it down somehow but back then I was trying to bridge the scale of it with elements that made it somewhat be able to go through the studio machinery. You know?” del Toro explained.

The director says without the need to go more “blockbuster-y” he is free to make “a far more esoteric, weirder, smaller version of it.” del Toro adds that he can restore scenes that were left out and do away with big set pieces he has “no appetite for.”

“Like, I’ve already done this or that giant set piece. I feel like going into a weirder direction… I know the ending we have is one of the most intriguing weird, unsettling endings, for me.”


H.P. Lovecraft’s horror classic is something of a white whale for director Guillermo del Toro. del Toro and Matthew Robbins wrote a screenplay back in 2006 and it was announced in 2010 to be nearing production with Tom Cruise as the star. But hesitancy over the R-rating and similarities to Ridley Scott’s Prometheus scuttled del Toro’s plans.

Whether or not Netflix will rescue del Toro’s project or not remains to be seen. In the meantime, he has assembled a talented group of collaborators for a new Netflix horror anthology called Guillermo Del Toro’s Cabinet of Curiosities. Also coming to Netflix is del Toro’s stop-motion adaptation of Pinocchio. Furthermore, his next movie, Nightmare Alley, premieres this week in theaters.


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 Sujet du message: Re: Les films "lovecraftiens"
MessagePosté: 03 Déc 2021, 13:08 
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Lovecraft lui-même a donné lieu en tout cas à un nombre hallucinant d'adaptations, télévisuelles ou autres, et de documentaires, souvent désargentés il est vrai et à l'aspect douteux, ce qui va de pair (l'absence de budget, le côté z de l'entreprise) avec un côté expérimental, loin des sentiers battus.


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 Sujet du message: Re: Les films "lovecraftiens"
MessagePosté: 03 Déc 2021, 22:53 
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J'aime pas ce que fait Del Toro, même si j'ai un agréable souvenir de Hellboy II et Pacific Rim.

Et At The Moutains of Madness est une des oeuvres de Lovecraft que j'aime le moins : trop de personnages, trop de "concret" (les dissections, les fresques, les Shoggoths etc.), il y a quelque chose de trop didactique, trop évident, c'est à la fois long et plat. Du coup ça correspond bien à Del Toro, je vois tout à fait ce qu'il y trouve et ce qu'il pourrait en faire. Ca donnera sûrement une adaptation fidèle et visuellement saisissante, et qui paraîtra bien datée dans ses mécanismes horrifiques.

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 Sujet du message: Re: Les films "lovecraftiens"
MessagePosté: 05 Déc 2021, 15:42 
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En cherchant un article dans un de mes vieux cahiers, je suis retombé sur cette critique d’Alien par Pascal Bonitzer. Si je la place ici, c’est qu’il y évoque Lovecraft.
Toujours été fan du critique Bonitzer, dommage que son écriture simple et savante se paye ici l’un mes films préférés qui terminera peut-être, c’est sa revanche, en tête de la CDM.
Il m’arrive parfois de revoir certains films, rien que pour le plaisir de lire ensuite un texte qui lui avait été consacré et que j’aime autant si ce n’est plus que le film lui-même. Parmi ces textes, beaucoup ont été écrits par Bonitzer.

Alien (Ridley Scott)

De Alien il n’y a, somme toute, pas grand-chose à en dire, sinon pour formuler un regret et un espoir. Ce n’est, dans son long, ni un excellent film de science-fiction, ni un excellent film d’horreur. Certes, les truquages sont réussis, certes, les images du monde maudit, au début, inspirées de l’œuvre du peintre lovecraftien Giger, sont belles, mais un bon film d’horreur, un bon film de science-fiction, n’ont jamais reposé seulement sur les truquages et les images : toujours d’abord sur un scénario inventif. Or celui-ci est pauvre, fondé sur les matériaux les plus traditionnels de la SF des années soixante, et se résout rapidement – dès la « sortie », indéniablement impressionnante, du monstre, hors du flanc de sa malheureuse mère mâle, et sa fuite vers les conduits d’aération du vaisseau – en un suspense mécanique et répétitif.

Tout se passe en fait comme si les auteurs avaient été eux-mêmes paralysés, du point de vue de l’imagination, par l’immonde Méduse qu’ils ont suscitée. Le secret d’une vraie terreur n’est pas dans l’élaboration réussie d’une créature répugnante, mais dans le défi lancé aux spectateurs d’imaginer ce dont elle est capable, les limites de son pouvoir, les raisons de son action, bref son degré de perversion. Or, la créature d’Alien est précisément faible du point de vue de la perversion : c’est simplement un tueur, un tueur sans doute pourvu d’une quantité de mâchoires et de dents supérieure à la moyenne (bien inutilement au fond, ce qui en fait un organisme plutôt primitif et encombré que marqué de cette « perfection » dont le robot de bord exprime la nostalgie), et pas très joli à voir, mais sans imagination quant à la cruauté, sans grande volonté de puissance non plus : la volonté de puissance, ce trait remarquable des Grands Anciens de Lovecraft, principe de la terreur qu’ils inspirent, plus profonde que l’horreur de leur apparence*. La première créature, le père de la Seconde, est un composé strict de pieuvre et d’araignée, c’est-à-dire des deux formes animales dont la fonction phobique est la plus stéréotypée (compte tenu du fait que la pieuvre « inclut » grâce à ses tentacules la forme vermiculaire ou serpentine). De ce fait même, ça marche, mais pour un temps seulement : il eût fallu, par la suite, raffiner, et raffiner non dans l’apparence du monstre, mais dans son comportement. On laisse entendre qu’il s’agirait d’une créature aussi intelligente que dépourvue (et ça, c’est le trait de la banalité) de sentiments, de pitié, d’âme en un mot, selon la tradition des années 50 (The Thing, Invasion of the Body Snatchers, etc.). Mais où et quand manifeste-t-elle, un tant soit peu, cette intelligence ?

Le récit est ainsi « aliéné », si je puis dire, à la forme de la bête, qui pour muer rapidement et changer de taille et d’apparence, n’en est pas moins toujours la même reptilienne, visqueuse, noirâtre, mandibuleuse et baveuse créature, et lasse probablement depuis un siècle de SF d’être chargée d’incarner la Différence maximale, l’Ecart absolu. Plus intéressant à cet égard est le robot du bord, échappé, lui d’un récit à la Bradbury plutôt qu’à la Lovecraft (malgré Celui qui chuchotait dans les ténèbres), précisément parce que rien ou presque ne le différencie en apparence de ses compagnons de voyage, lesquels en effet s’y trompent.

Contrairement à l’être « Alien », créature sans arrière-plans, sans prolongements, toute entière immanente à son opacité apotropéique**, le robot offre immédiatement des perspectives narratives intéressantes, des aperçus politiques sur la « Compagnie » qui l’a introduit ainsi, à leur insu, au milieu des autres passagers dans un dessein cynique. Mais l’histoire, qui aurait pu alors se compliquer de façon passionnante, en reste à ces aperçus, ces prolongements possibles.

Dans ce programme de cours publié dans le n° 1 d’Ornicar, Claude Rabant écrivait, à propos des automates et de la science-fiction : « Tentons d’imaginer les êtres les plus différents de l’homme : voici la série des mutants. Imaginons au contraire la différence minimale, la différence proche de s’annuler : voici les robots et les androïdes. Des uns aux autres, du maximum au minimum, la variation est continue dans les formes, mais elle produit au passage un changement qualitatif de l’effet littéraire et du sens. Du côté des mutants, l’étalement des formes dans leurs différences maximales fait apparaitre au contraire l’étroitesse des limites auxquelles se heurte l’imagination. (…) Du côté où les formes imaginaires cherchent à ses projeter et à se multiplier, l’imaginaire combinatoire est le plus limité et l’effet littéraire est le plus faible. Du côté au contraire de la différence minimale, l’effet est le plus fort, et en restreignant ses formes l’imaginaire combine davantage : avec les robots et les androïdes, nous voici proches des effets multiples, réels et possibles, de la technique, de la théorie des jeux, de la stratégie politique » (Ornicar1, janvier 1975).

En définitive, l’impression globale que procure Alien est celle d’un film-programme. Les truquages y sont remarquables (pas plus, et pas différemment de ceux de La guerre des étoiles ou de Rencontres du troisième type). Les thèmes les plus aigus et les plus fondamentaux de la SF classique et « intellectuelle » (par opposition aux space-opera) y sont convoqués – mais y font seulement acte de présence, sans donner lieu à une fiction vraiment intéressante. On a l’impression que le succès d’Alien permet de lancer une série (comme les Frankenstein et les Dracula d’autrefois) dont on espère que les scénarios seront plus fouillés et plus exigeants que celui-ci.

*Note de l’auteur : Il semble qu’une première version du scénario allait dans ce sens, ou du moins donnait des aperçus de la culture des « Alien ».
** Pas trouvé le mot apotropéique, seulement celui de apotropaïque (qui a la vertu de détourner des influences maléfiques , comme une amulette par exemple). Du coup, c’est l’expression « toute entière immanente à son opacité apotropéique » qui devient opaque pour moi.


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 Sujet du message: Re: Les films "lovecraftiens"
MessagePosté: 06 Déc 2021, 00:05 
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Remarquable texte, qui décèle quelque chose de fondamental dans les rouages d'Alien (que j'aime pourtant bien). Mais surtout, il pointe du doigt l'espace encore infranchi, et sans doute infranchissable, entre l'oeuvre de Lovecraft et le cinéma... Alors que les deux ont, à mon sens, un point commun : l'athéisme.

Lovecraft, c'est le point culminant du fantastique (au sens large) dépourvu de toute considération spirituelle, voire même carrément hostile à la question. Le cinéma, c'est l'art du divertissement par excellence des sociétés qui ont relégué le "fait religieux" au ban de la vie publique.

Je pense qu'au-delà des questions de portabilité du travail de Lovecraft à l'écran (choix de mis en scène, budget, etc.), ce qui fait frein c'est la différence au coeur de ce point commun : Lovecraft est dans une négation de la religion qui n'a plus aucun sens, plus aucune pertinence dans son univers sans espoir, sans issue face à la menace inconcevable qui pèse sur l'humanité. Ce à quoi sont confrontés ses narrateur est tellement abominable que l'idée de Dieu, d'un au-delà, d'une hygiène de vie de croyant se voit disqualifiée. Le cinéma a plus pour ambition de supplanter les éléments les plus visibles et efficaces de la communion : rassemblement, contemplation, silence, échanges par après etc.

Lovecraft est trop radical, trop écrasant, trop dans la négation de ce que le cinéma vise à émuler. C'est pourquoi même les pires monstres de cinéma sont bien souvent de gros prédateurs qui jouent sur la peur d'être chassé et dévoré. Les monstres de Lovecraft contaminent le narrateur et dissolvent toute possibilité d'envisager une solution, un combat, la moindre explication, la moindre action.

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 Sujet du message: Re: Les films "lovecraftiens"
MessagePosté: 07 Déc 2021, 12:47 
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Müller a écrit:
Le cinéma, c'est l'art du divertissement par excellence des sociétés qui ont relégué le "fait religieux" au ban de la vie publique.
Marche pas pour l'Inde. Peut-être pas pour les US non plus.


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 Sujet du message: Re: Les films "lovecraftiens"
MessagePosté: 07 Déc 2021, 13:40 
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Citation:
Marche pas pour l'Inde.


C'est vrai. Je n'ai strictement aucune connaissance en la matière. Est-ce que comme le cinéma occidental, qui est une extension de la pensée occidentale, le cinéma indien à des prétentions à l'universalisme ?

Citation:
Peut-être pas pour les US non plus.


La défiance vis à vis d'Hollywood émane surtout du fondamentalisme chrétien, mais en termes de consommation de masse et d'impact culturel, le cinéma l'emporte haut la main et ce phénomène va de pair avec la sécularisation croissante de la société, des pouvoirs publics et de le mentalité de la population.

Fait amusant : le spécialiste incontournable de Lovecraft en particulier et de toute la weird fiction en général aux US est un fils d'immigrés Indiens, S.T. Joshi.

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 Sujet du message: Re: Les films "lovecraftiens"
MessagePosté: 09 Déc 2021, 09:55 
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Müller a écrit:
Est-ce que comme le cinéma occidental, qui est une extension de la pensée occidentale, le cinéma indien à des prétentions à l'universalisme ?
Le cinéma indien est traditionnellement (est-ce que téléchargements et streaming ont changé la donne ?) très populaire dans les pays musulmans.
Est-ce que c'est par une volonté indienne ou par une volonté de gouvernements ultraconservateurs qui apprécient la pudibonderie indienne ?
Ou est-ce qu'il faut remonter beaucoup plus loin et à l'immense influence de la civilisation indienne sur des terres qui ont été islamisées depuis qui sert de relai au cinéma indien actuel ?
Est-ce que les prods indiennes prennent en compte le marché égyptien ou se satisfont-elles de leur immense marché intérieur ?

Müller a écrit:
La défiance vis à vis d'Hollywood émane surtout du fondamentalisme chrétien, mais en termes de consommation de masse et d'impact culturel, le cinéma l'emporte haut la main et ce phénomène va de pair avec la sécularisation croissante de la société, des pouvoirs publics et de le mentalité de la population.
Si tu compares Europe de l'ouest avec des pays chrétiennement assez disparates comme l'Allemagne et la France en passant par l'Italie, leurs cinémas tenaient la dragée haute aux US jusqu'à la crise de 29 sans que les sécularisations respectives semblent jouer.

Le Japon est un pays très consommateur d'audiovisuel, très sécularisé aussi, mais où un certain sens du surnaturel a l'air d'être plus prégnant que chez nous (notamment dans l'incarnation des objets).

Plus que la pure sécularisation, il y a peut-être plutôt une évolution culturelle de l'importance des symboles et de l'anthropomorphisation des puissances divines (avec le christianisme étant allé le plus loin; en Extrême-Orient, il y a un lien à l'image très lié à l'écriture) qui accordent une place essentielle à l'iconographie.
Forcément, dès que tu as une technique qui te permet d'enregistrer des images, ça répond à un besoin. Qui peut par ailleurs être totalement au service de la religion: voir les productions des sectes américaines.

Et puis il y a beaucoup plus simplement la capacité hypnotique d'une "lumière imagée": met n'importe quel mioche, baptisé ou non, devant un écran, tu verras.
Par extension, met n'importe quel écran avec du Bollywood dans un bouiboui de Kathmandou ou BFM dans un PMU, les yeux seront attirés pareils.
Sauf qu'à Kathmandou, tu n'as pas de télé dans tous les foyers (mais des smartphones dans toutes les mains). En France, les appartements avec paraboles sont souvent occupés par des foyers en demande de programmes en accord avec les morales musulmanes.

Et au-delà de l'évidence du cinéma utilisé comme softpower, je pense qu'il faut d'abord voir la dimension industrielle du cinéma. Les productions dans leurs majorités visent d'abord et avant tout à faire de l'argent en se basant d'abord sur son marché domestique.
Le marché domestique américain étant plus grand, il a permis des productions plus spectaculaires, donc séduisantes, donc dominantes etc. Phénomène sur lequel se greffent plein d'idéologies, de messages, de propagandes etc. mais qui sont certainement secondaires.
Je suis plutôt convaincu que le cinéma occidental n'a pas de prétention universaliste, en dehors d'une certaine arrogance d'un côté et naïveté de l'autre mais une logique de marché.

Ca fait 20 ans que la Chine est entré à l'OMC et s'il y a 20 ans des Occidentaux prétendaient que leur modèle avait la place de s'imposer là-bas, c'est qu'ils n'avaient vraisemblablement les capacités analytiques pour faire de leur désir une réalité.
C'est surtout que la majorité des Occidentaux ayant eu le pouvoir de décision a vu du fric à se faire à court terme et trouvé quelques hypocrites ou gogos pour enrubanner ça d'universalisme démocrate et droidelomiste.

Mais c'est vrai que les religions étant très liées à la Lumière, une technologie projetant de la lumière animée est forcément bien placée dans une société matérialiste.
Le jeu avec le soleil et les vitraux d'une église est limité en comparaison.

Un pote m'avait fait remarquer (avant les smartphones donc je ne sais pas si sa théorie reste valable): les PC émettent de la lumière ET un doux ronronnement renforçant leur pouvoir de fascination.

Müller a écrit:
Fait amusant : le spécialiste incontournable de Lovecraft en particulier et de toute la weird fiction en général aux US est un fils d'immigrés Indiens, S.T. Joshi.
Peut-être que l'esprit indien est plus souple pour accepter l'étrangeté à plusieurs dimensions cosmiques de Lovecraft mais je pense que son univers ne prend pas au cinéma parce qu'il n'est simplement pas assez visuel.
Ou peut-être parce que, un peu comme Dick ou Asimov en SF, les inspirations et postulats de bases sont prometteurs mais le livre fini n'est finalement pas terrible.
Quand un King, pas original pour un sou voir souvent ridicule dans ses points de départs, a une chair plus consistante (bon, son écriture étant inluencée par le cinéma,logique qu'il soit adapté facilement aussi).


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 Sujet du message: Re: Les films "lovecraftiens"
MessagePosté: 09 Déc 2021, 15:02 
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Tu soulèves des pistes intéressantes, merci.

Citation:
je pense que son univers ne prend pas au cinéma parce qu'il n'est simplement pas assez visuel.


Pas assez porteur de lumière, non plus, bien au contraire.

Citation:
Ou peut-être parce que, un peu comme Dick ou Asimov en SF, les inspirations et postulats de bases sont prometteurs mais le livre fini n'est finalement pas terrible.


Je goûte peu Asimov (aussi bien le personnage que son travail), et c'est vrai que la plupart des romans de Dick ne sont pas à la hauteur de la réputation de l'auteur. Sauf Ubik, son seul vrai chef d'oeuvre romanesque, hautement transposable au cinéma de par la précision de ses descriptions, ses dialogues percutants et sa nomenclature très "noir". Trop kitsch sans doute pour Nolan, trop sardonique aussi, et c'est dommage, mais les quelques similitudes dans l'approche du voyage dans le temps et ses faux-semblants sont frappantes.

Par contre, ses nouvelles sont incroyables de vivacité.

Citation:
Quand un King, pas original pour un sou voir souvent ridicule dans ses points de départs, a une chair plus consistante (bon, son écriture étant inluencée par le cinéma,logique qu'il soit adapté facilement aussi).


Il faudrait s'amuser à compter, mais je suis quasi certain qu'il est pas loin derrière Shakespeare en nombre d'oeuvres adaptées, pour un nombre presque aussi impressionnant de merdes, ce qui me désolait plus jeune, jusqu'à ce que je comprenne ce qui se jouait.

Citation:
Mother d'Aronofsky sans doute aussi (et plus diffusément tous ses films).


En quoi ? Pas vu Mother.

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STAYCOOL

11

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07 Mar 2012, 17:07

Marlo Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Films inachevés

Mr Chow

4

1199

03 Aoû 2012, 15:17

Film Freak Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Recherche de films

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Brice712

17

2546

27 Juil 2013, 18:36

Mayouta Voir le dernier message

 


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