Art Core a écrit:
C'est très juste ce que tu dis mais tu es dans une réflexion globale écologique et c'est très différent du veganisme. Quand je dis à quelqu'un que je suis végétarien j'ai droit toujours à la même phrase . Mais le curseur est pas là du tout. Un animal égorgé est un animal égorgé petit producteur ou abattoir industriel (même si le premier a sans doute eu une meilleure vie que le deuxième). Je veux dire j'ai l'impression qu'il y a une incompréhension à ce niveau là comme si le veganisme était un pur mouvement écologique (ce qu'il est indirectement).
Sur le côté "j'ai arrêté de manger de la viande industrielle, je vais chez le boucher qui travaille avec des petits producteurs", il faut aussi avoir en tête la notion de saisonnalité qui est aussi importante pour la viande que les fruits et légumes.
Ça pourra toujours te faire un argument si t'as envie de pousser ton interlocuteur dans ses retranchements.
Les fêtes type du cochon ou du mouton sont des bons repères à ce niveau.
Les jeûnes religieux aussi (plus ou moins dévoyés, le ramadan contemporain pratiqué par la majorité est une aberration environnementale et sanitaire, comme les fêtes de Noël qui sont profusion de tout alors qu'à une époque, c'était synonyme de clémentine, pas de foie gras).
Ceci dit, si tu ressens le besoin de présenter ton véganisme sur le plan moral, c'est difficile de ne pas y voir (à tort ou à raison, consciemment ou inconsciemment) une dimension égotique pour celui qui est en face.
Pourquoi ne pas se concentrer sur la dimension écologique, qui est comme tu dis, directement liée ? Même si c'est vrai que je constate qu'une motivation morale est plus efficace pour tenir une ligne végane. Reste que soutenir d'abord la dimension environnementale laisse une plus grande place au rationnel et facilite les interactions. Et in fine, qu'on te lâche la grappe.
Ceci dit, et pour le plaisir de polémiquer, le véganisme amène quelque part à isoler l'homme de l'animal, en brisant un lien que l'exploitation permet.
J'aime bien le végétarisme hindou en ce sens, sacralisant la vache (nonobstant le dévoyement moderne qui les laisse faire les poubelles), comme compensation de tirer quand même son lait.
Disons qu'un "newborn vegan" fait un travail. Mais qu'est-ce que serait une société végane ? Quelle serait la place de l'animal chez un enfant élevé avec, a priori dans nos sociétés urbaines, aucun rapport avec l'animal (parce que la logique végane est de ne pas avoir d'animaux de compagnie je suppose)? Alors qu'une éducation rappelant qu'il faut justement finir sa viande parce que c'est un cadavre, qu'on a pris une vie et que ça se respecte a un côté transcendantal.
Bon, la transcendance est sans doute pas obligatoire hein. Mais pourtant, elle existe chez beaucoup de gens et doit quand même avoir une certaine part dans la démarche végane.
Quand aux produits non-alimentaires carnés, ils sont pour la plupart dérivés de la production alimentaire. Ne pas manger de viande suffit largement pour s'y opposer. S'acheter un portefeuille en cuir n'a pas provoqué la mort de l'animal.
Reste la logique capitaliste qui voudrait que si personne ne voudrait manger de viande mais des portefeuilles en cuir, on tuerait quand même des animaux.
C'est dans ce sens, je pense, qu'argumente Castorp. Le système capitaliste est fondamentale dans les proportions délirantes de l'exploitation animal. Et rien que d'en sortir relativiser ait énormément cette exploitation.
Même si bien sûr, l'Homme ne l'a pas attendu pour maltraîter l'Animal et qu'on devait facilement trouver des Amérindiens qui se moquaient de leur dernier bison tué comme de leur dernière chiasse.