Forum de FilmDeCulte

Grégoire Canvel a tout pour lui. Une femme qu'il aime, 3 enfants délicieuses, un métier qui le passionne. Il est producteur de films. Révéler des cinéastes, accompagner les films qui correspondent à son idée du cinéma, libre et proche de la vie, voilà justement sa raison de vivre. Sa vocation. Grégoire y trouve sa plénitude, il y consacre presque tout son temps et son énergie. Hyperactif, il ne s'arrête jamais, sauf les week-end, qu'il passe à la campagne en famille : douces parenthèses, aussi précieuses que fragiles. Avec sa prestance et son charisme exceptionnel, Grégoire force l'admiration. Il semble invincible. Pourtant sa prestigieuse société de production, Moon Films, est chancelante.

J'ai toujours une appréhension à découvrir les films d'ex critiques qui valent rarement un kopek et j'avais même zappé à l'époque Tout est pardonné devant l'affreuse impression de jouer faux donnée par sa bande annonce. Surprise, MHL se révèle une excellente directrice d'acteurs, avec une prédilection toute particulière sur les voix graves, éraillées, avec un accent, et ses dialogues assénés avec douceur. Louis-Do de Lancquesaing (physique de Frédéric Lefebvre apaisant) avec ce rôle inspiré d'Humbert Balsan, donne un sens particulièrement touchant à la paternité, l'amour pour ses filles, l'amour pour le cinéma. Que sa déchéance financière et ses angoisses ne plombent pas le film dans une dramaturgie de pisseuse est une grande qualité du film, tout comme son suicide arrive d'une manière presque trop rapide pour qu'on puisse avoir prévu le coup.

La deuxième partie, l'après, est sans doute un peu trop foutraque et feuilletonnante, notamment dans sa manière de réutiliser une scène anodine de discussion avec un technicien pour révéler un secret enfoui, mais Mia Hansen-Love réussit un drame digne sans apitoiements inconsidérés ni formules toutes faites, avec une belle place pour tous ses comédiens dont Eric Elmosnino le Gainsbourg de Joan Sfar. Les gamines sont fabuleuses aussi, tout comme cette belle ligne de dialogue au début où de Lanqusaing dit à sa fille aînée (d'ailleurs la comédienne l'est également dans la vraie vie) qu'il serait temps qu'elle se décide à être heureuse.

4/6

Un film très délicat qui m'a beaucoup touché humainement, surtout dans la première partie (je trouve la deuxième osée, mais elle "prend" moins), mais aussi cinématographiquement, vu que le récit plonge de manière vraiment pertinente et détaillée sur ce qu'est le véritable travail d'un producteur aujourd'hui.

J'avais peur que cet aspect soit un peu balayé mais au contraire, pas du tout, on rentre bien dedans... et Bela Tarr prend violemment cher sous l'apparence d'un cinéaste suédois exigeant.

J'avais un tout petit peu connu Balsan et sa famille dans les dernières années de sa vie et le portrait qui en est dressé est assez troublant.

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Liam Engle: réalisateur et scénariste

Un beau mélodrame, dont le meilleur est certainement la grande direction d'acteurs ainsi que la description quotidienne de la vie de prod' fauché, extrêmement bien rendue. Pourtant, malgré toutes ces qualités, le film ne m'a pas totalement convaincu, peut-être parce qu'il joue trop la sobrieté et le refus absolu des grosses ficelles, sans jamais risquer un élan émotionnel qui aurait pu dépasser cette impression de prudence vis-à-vis du sujet. Mais Mia-Hansen Love est à 28 ans une jeune cinéaste sensible et intelligente, et donc à suivre de près (ce que j'ai failli faire à la rue d'Antibes, où elle était très sexy avec sa belle robe).

4/6

Je ne suis pas un grand adepte de Tout est pardonné, que je trouve délicat mais trop retenu.

Là, c'est probablement le sujet qui me touche, mais ça m'a profondément retourné. La première partie du film est un plongée absolument troublante dans ce que c'est que de faire du cinéma avec foi. Je sais plus qui disait que le cinéma est plus important que la vie, et MHL illustre comment cet état de fait pour certaines personnes peut plonger dans le désarroi le plus profond. Parce que quand on est producteur et qu'on veut faire des films, à un moment on est rattrapé par les risques qu'on prend. Les risques financiers et évidemment les risques humains. Et quand l'échec point, quand le sentiment que tout le monde vous déteste malgré le bien que vous pouvez faire, le bonheur n'est plus visible. Cette ambivalence est assez admirable dans le scénario et au niveau de la mise en scène, la délicatesse et la très grande direction de comédiens, permettent de rendre cette première moitié sublime. Non pas que je m'identifie, mais des prods comme le perso du film, j'en croise régulièrement et j'ai une réelle admiration pour ces types.

Ensuite, c'est plus convenu. La vie reprend ses droits et y'a quand même de très belles choses, mais c'est en deça.

Je bossais au CNC à l'époque ou on soldait les comptes de Balsan et le film de MHL est un bel hommage, assez saisissant.

Enfin c'est vraiment un très chouette film !

Et j'ai d'excellents echos du suivant (dont le scénario était encore une fois très beau), qui sera très probablement à Cannes.