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MessagePosté: 14 Déc 2021, 16:58 
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Dans ce film Pedro tente de mêler l'histoire de l'Espagne et plus précisément les fosses communes durant la guerre d'Espagne et ce qu'il connaît mieux, le grand mélodrame féminin. Le résultat est assez inégal avec d'un côté des choses très plaquées comme des morceaux de dialogues informatifs qui semblent sortir de nulle part du genre "tu sais que le gouvernement Rajoy a decidé de couper toutes les subventions pour l'excavation des fosses communes ?". Et ce sujet historique semble vraiment accessoire, présent au début et à la fin mais totalement absent du coeur du film.

C'est finalement là, et sans surprise, que se joue le film. Dans ce mélodrame sur la maternité. Un mélodrame tout Almodovarien, infiniment bourgeois. Tout est bourgeois jusqu'au ridicule, que ce soit les costumes tous issus de grands couturiers (j'apprends d'ailleurs que le tee shirt un peu grotesque de Penelope Cruz, we should all be feminists vient de chez Dior), dans les appartements cossus remplis de meubles de designers et d'oeuvres d'art, dans cette façon d'avoir toujours des domestiques, comme si d'ailleurs une mère célibataire ne pouvait pas s'occuper de son enfant seule. Alors chez ce réalisateur c'est plus une espèce de volonté de transmettre un inconscient de cinéma, avec ce que ça implique de glamour et de richesse visuelle. Parfois cela vient se confronter à une espèce de réalité concrète, Pénélope Cruz qui dit avoir besoin d'argent. Ca crée une espèce de schizophrénie entre un univers totalement fantasmé et des préoccupations matérielles qui paraissent hors-sujet. Le personnage de la jeune femme est serveuse et cherche à s'en sortir seule mais ça l'empêchera pas de porter du Miu Miu et des fringues qui valent un smic. C'est à la fois agaçant mais ce qui donne aussi au film un côté un peu étrange, comme hors du monde.

A l'image de la photographie du film et de sa mise en scène. Des dialogues filmés dans des champs contrechamp avec une profondeur de champ toute "plate". C'est assez bizarre, pas forcément très beau mais à l'usure ça finit par donner au film son caractère, une personnalité particulière. Alors plus que jamais le cinéma d'Almodovar ressemble à du soap-opera, mais curieusement ce n'est pas vraiment péjoratif car vient se mêler à ce plaisir très primaire d'un romanesque flamboyant et tragique, quelque chose de plus trouble, à la fois dans l'exploration de l'histoire et de la culture espagnoles et dans l'exploration de la mémoire cinéphile d'Almodovar. D'une certaine manière ce n'est pas si éloignée du côté porno chic/cheap de [b]Passion[b] de De Palma.

Et quoi qu'on en dise, je crois qu'Almodovar est le réalisateur homme (voire réalisateur tout court) qui a su le mieux filmer les femmes et qui a une filmographie toute entière tournée vers elles ce qui en soit est déjà bouleversant. Là encore Pénélope Cruz est sublime et sublimée. J'ai d'ailleurs été assez déçu par la fin où j'aurais adoré
que les deux femmes restent ensemble et décident d'élever l'enfant ensemble. Le retour du mec tout fade là et la grossesse finale de Cruz, bof...


Un Almodovar mineur selon moi mais ça reste un beau film et Pedro continue de creuser son sillage si particulier.

4/6

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MessagePosté: 14 Déc 2021, 17:07 
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Moi qui ne suit pas un grand admirateur d'Almodovar le fait qu'il instille une profondeur politique dans celui-ci m'aura probablement aider à passer outre les conventions dont tu parles très bien (c'est tout de même le cinéma bourgeois par excellence, et jamais autant que dans celui-ci n'ai-je aussi facilement accepter l'aspect soap). Et j'ai beaucoup aimé cette jeune actrice également, pas vraiment belle mais profondément touchante. Par contre de là à faire d'Almodovar celui qui a le mieux filmé les femmes, je ne sais pas, il y en a d'autres qui l'ont parfaitement fait par le passé il me semble (Lubitsch, von Sternberg, Wilder sont les premiers qui me viennent en tête).


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MessagePosté: 14 Déc 2021, 17:16 
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Art Core a écrit:
D'une certaine manière ce n'est pas si éloignée du côté porno chic/cheap de Passion de De Palma.

C’est le même chef-op’, De Palma avait pris celui d’Almodovar.

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MessagePosté: 14 Déc 2021, 17:22 
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Ah c'est marrant je savais même pas. Tout s'explique.

Sinon oui évidemment que c'est pas le seul à savoir filmer les femmes mais là tu me cites des réalisateurs qui datent. Lui il a fait de son œuvre une ode aux femmes contemporaines, leurs fêlures, leurs désirs et sans jamais les objectifier (d'ailleurs c'est intéressant parce qu'il est gay, donc il n'est pas perturbé par son propre désir).

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MessagePosté: 14 Déc 2021, 17:28 
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Exactement ce que font Lubitsch et Wilder dans la majeure partie de leurs films (ce qui n’enlève rien à Almodovar).


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MessagePosté: 14 Déc 2021, 17:30 
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Tu as sans doute raison, je connais assez mal les deux en fait :oops:. Mais our rester dans les vivants, je vois personne d'autre qui le fasse aussi bien et surtout avec autant de constance.

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MessagePosté: 14 Déc 2021, 17:35 
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Vu hier soir, je m'apprêtais à ouvrir un sujet.

Pour dire en gros ce que vous dites, rappeler les qualités de cinéaste d'Almodovar, sa capacité à entrelacer les histoires et les destins, mais en terminant par une question : à quoi bon ?

C'est en tout cas celle que je me suis posée en sortant de la salle. Et je n'ai toujours pas trouvé la réponse.


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MessagePosté: 14 Déc 2021, 17:48 
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Art Core a écrit:
Tu as sans doute raison, je connais assez mal les deux en fait :oops:. Mais our rester dans les vivants, je vois personne d'autre qui le fasse aussi bien et surtout avec autant de constance.

Si je ne devais en citer que deux (pour que tu puisses te faire une idée rapidement), Ange pour Lubitsch et Embrasse moi idiot pour Wilder.


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MessagePosté: 14 Déc 2021, 17:50 
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Je les note, je les ai pas vus.

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MessagePosté: 14 Déc 2021, 17:53 
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Art Core a écrit:

C'est finalement là, et sans surprise, que se joue le film. Dans ce mélodrame sur la maternité. Un mélodrame tout Almodovarien, infiniment bourgeois. Tout est bourgeois jusqu'au ridicule, que ce soit les costumes tous issus de grands couturiers (j'apprends d'ailleurs que le tee shirt un peu grotesque de Penelope Cruz, we should all be feminists vient de chez Dior), dans les appartements cossus remplis de meubles de designers et d'oeuvres d'art, dans cette façon d'avoir toujours des domestiques, comme si d'ailleurs une mère célibataire ne pouvait pas s'occuper de son enfant seule. Alors chez ce réalisateur c'est plus une espèce de volonté de transmettre un inconscient de cinéma, avec ce que ça implique de glamour et de richesse visuelle. Parfois cela vient se confronter à une espèce de réalité concrète, Pénélope Cruz qui dit avoir besoin d'argent. Ca crée une espèce de schizophrénie entre un univers totalement fantasmé et des préoccupations matérielles qui paraissent hors-sujet. Le personnage de la jeune femme est serveuse et cherche à s'en sortir seule mais ça l'empêchera pas de porter du Miu Miu et des fringues qui valent un smic. C'est à la fois agaçant mais ce qui donne aussi au film un côté un peu étrange, comme hors du monde.
[/hide]


Ce t-shirt m’a amusé, non par ce qui y est écrit, mais par le contexte dans lequel il est porté. Il arrive pile au moment où Penelope Cruz apprend à la jeune fille à faire la cuisine notamment la tortilla, pour le foyer. Associer féminisme et tâche ménagère, je ne peux pas m’empêcher d’y voir de l’ironie de la part d’Almodovar.

Sinon le film m’a bien fait pleurer mais j’ai la larme facile.


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MessagePosté: 14 Déc 2021, 17:55 
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Lohmann a écrit:
Exactement ce que font Lubitsch et Wilder dans la majeure partie de leurs films (ce qui n’enlève rien à Almodovar).


Lubitsch, oui. Wilder, c'est plus discutable (Certains l'aiment chaud et la Garçonnière, par exemple).

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MessagePosté: 14 Déc 2021, 17:59 
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elmergantry a écrit:
Ce t-shirt m’a amusé, non par ce qui y est écrit, mais par le contexte dans lequel il est porté. Il arrive pile au moment où Penelope Cruz apprend à la jeune fille à faire la cuisine notamment la tortilla, pour le foyer. Associer féminisme et tâche ménagère, je ne peux pas m’empêcher d’y voir de l’ironie de la part d’Almodovar.


Oui peut-être en effet mais il est pas du genre à ridiculiser ses personnages. En tout cas tu vois que ça.

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MessagePosté: 14 Déc 2021, 18:11 
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Castorp a écrit:
Lohmann a écrit:
Exactement ce que font Lubitsch et Wilder dans la majeure partie de leurs films (ce qui n’enlève rien à Almodovar).


Lubitsch, oui. Wilder, c'est plus discutable (Certains l'aiment chaud et la Garçonnière, par exemple).

Pour les deux il y a des contre exemple, mais chez Wilder Ariane, Embrasse-moi idiot ou La Scandaleuse de Berlin sont de magnifiques portraits de femme


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MessagePosté: 14 Déc 2021, 18:13 
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Des 3, je n'ai vu que la Scandaleuse, mais je trouvais justement que ça faisait très fantasme de mec sur ce qu'est une femme. Après, ça veut pas dire que ça n'a pas de valeur, hein, mais bon, je trouve pas Wilder exceptionnel à ce niveau-là.

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MessagePosté: 14 Déc 2021, 18:14 
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Dsns le ciné classique américain ce serait plutôt Sirk qui developpe le plus des perso féminins. Lubitsch filme en effet plutôt le couple que la femme, même s'il est relativement féministe dans Angel ou Heavens can Wait. Cukor un peu, je le connais mal, les femmes de A Double Life sont géniales mais c'est l'histoire de la psychose d'un homme qui les réifie complètement, de son point de vue. Sirk ce n'est plus la représentation du remariage mais de mésalliance non avouée.

La Scandaleuse de Berlin de Wilder c'est genial mais Dietrich et Joan Arthur sont avant tout des symboles nationaux, et avec une large dose de caricature politique (Joan Arthur c'est la vieille film paumée républicaine de l'Iowa avant d'être la maîtresse possible. Bon c'est un peu plus compliqué car elle a en même temps un poste politique assez important où elle ne se montre dès le début du film pas non plus complètement conne)

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Mais peut-être la nécessité accrue de faire confiance incite-t-elle à la mériter davantage

Erving Goffman


Dernière édition par Vieux-Gontrand le 14 Déc 2021, 18:41, édité 6 fois.

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