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How Green Was My Valley en VO.



Dans une petite ville du Pays de Galles, un père et ses cinq fils travaillent à la mine de charbon et la vie quotidienne s’écoule paisiblement, rythmée par des habitudes devenues de vrais rites. Mais les conditions de travail deviennent de plus en plus difficiles et les fils décident de faire grève, contre l’avis de leur père…


Je sais qu'il s'agit pour beaucoup de fans du joyau de sa carrière. Effectivement, c'est du pur John Ford : l'humanisme droit de son cinéma y est comme mis à nu, central et soudain sujet en soi, offrant directement au spectateur, presque crûment, tout ce qui fait l'essence de cette filmo. Mais ce "concentré de Ford" atteint du coup pour moi une certaine limite, comme un risque d’écœurement. Ce n'est plus la touche intense qui vient poindre comme une évidence de péripéties plus brutales, mais un cadre constant, et désormais un peu étouffant.

Évidemment, le film envoie régulièrement des gifles : il y a toujours la précision des situations et leur pureté formelle, le point de vue qui se cristallise sans prévenir en tableaux fulgurants, la force de la scénographie (cette mine au sommet qui semble petit à petit contaminer le village en contrebas, au rythme d'un scénario qui détruit méthodiquement cette famille). Mais dans ce maelström où s'affrontent religion et capitalisme, on commence à percevoir les contours d'un système. La relation entre l'enfant à sa famille (ses frères notamment) met par exemple un certain temps à réellement exister au-delà de l'entente béate du foyer autoritairement idéalisé. L'amour de la tradition se fige parfois en dogmes, qui ont besoin de leurs méchants manichéens et caricaturaux. Le lyrisme m'y semble un peu crispé. En fait, plus la situation se dégrade, plus j'ai l'impression de voir le film se libérer de ses carcans. Il faut vraiment attendre les dernières visions d'apocalypse pour que le film respire complètement. Pour que la nostalgie puisse prendre corps dans l'expérience de la perte : sa figuration littérale dans la première partie du film me semble être une impasse.

Pour reprendre un film quasiment jumeau, je crois que je préfère sur ce coup Stars in my crown. Moins ambitieux, moins par éclats, plus sobre, mais finalement plus ample à sa façon.

Après, y a pas à chier, ça reste impressionnant.



Concernant le blu-ray français : contrairement à ce qui est indiqué, la piste mono d'origine est bien proposée (dolby). Pour le reste, restauration impeccable, y a pas la moindre traces de poussière/point/moisissure ou que sais-je, avec un grain conservé. Du très beau boulot.

Souvenir d'un film beau par certains côtés mais pataud par d'autres notamment tout ce qui a trait à la morale sur la famille et la religion, carricaturant le John Ford réactionnaire de certains autres de ses films où la pilule passe mieux grâce à une ambiguité plus travaillée. Là on a l'impression que Ford s'est lâché et est passé outre la touchante pudeur qui caractérise ses plus grands films. Bon il y a toujours cette impression de pureté quasi-originelle et de grande humanité qui transparaît, il est possible que prendre ce film trop littéralement ou trop via ses dialogues soit une erreur.

Je me suis surpris à pas être tant que ça gêné par la religion. Même si ce n'était probablement la volonté d'origine, il y a aujourd'hui un côté quasi-ethnologique dans ce portrait du village dont tous les rituels, lectures, comportements, se font en fonction de la bible. Mais Ford prend toujours soin de la présenter soit comme un ciment de la communauté, soit comme un outil de philosophie et de pensée. Du coup son omniprésence est moins gênante : la religion est un des sujets du film, plus simplement.

Pour le reste, assez d'accord avec toi.
Reste à Tetsuo de venir lire le topic et de taper une déprime, tel le maître qui passe à la cave regarder le boulot de ses deux apprentis enthousiastes, et qui se dit que non, il est décidément trop tôt pour qu'il prenne sa retraite...

Même impression sur ce ford là... Faudrait que je retente mais pas envie non plus. En fait, je ne vois plus aucun intérêt et n'éprouve ni plaisir à regarder un Ford aujourd'hui. L'impression de regarder des choses complètement dépassées.

Ah pourtant c'est loin d'être platement archaïque Ford, c'est plus compliqué que ça... Celui-ci c'est peut-être son plus "difficile", en fait.

Dès le départ, le film te casse en deux avec une succession de tableaux en 1.37 qui sont juste à tomber et cristallisent tout le film en une image, avec cette mine tout en haut qui fulmine et le village en aval, le "Pays de Galles d'en bas", où redescendent les travailleurs après chaque dure journée de labeur. Même en N&B, Ford parvient à rendre compte de la nature luxuriante de cette "verte vallée" qui disparaît graduellement tout comme va disparaître la famille et l'innocence du narrateur, encore "vert" à l'époque.

Toutefois, c'est également dès l'introduction que les éléments du film qui me parlent moins font leur entrée, qu'il s'agisse de cette voix off envahissante ou plus largement du fait de suivre non pas une intrigue ni vraiment un personnage, mais une famille, comme une chronique de la façon dont le capitalisme (encore toi!) va le ruiner. En ça, le film m'a paru rejouer, en moins puissant, la même partition que Les Raisins de la colère, qui m'avait semblé plus incarné (même si moins écrasant de beauté formellement).

Néanmoins, le film brasse davantage de thèmes, en s'attaquant non seulement une fois de plus à la question du socialisme mais également de la religion et, contrairement à ce que j'ai pu lire plus haut, je ne trouve pas ça si conservateur. Le film prend bien la peine de faire la distinction entre la religion et l'Église, en montrant cette institution comme inhumaine et archaïque et le personnage de Gruffydd est justement nuancé (cf. ce qu'il dit de la prière à Huw ou ses remontrances à la fin envers les diacres).

J'ai beaucoup aimé le texte également. Je ne sais pas si les dialogues proviennent tous du roman mais il y a vraiment de très beaux échanges, de belles phrases, littéraires mais puissantes.

Depuis le début de cette rétro, je m'amuse à imaginer quels seraient les films-parents de Spielberg que l'on pourrait associer lors de double-feature avec chacun des Ford que je vois et pour celui-ci, l'héritier semble clairement être War Horse, notamment pour la terre comme personnage, sa gangrène par un Mal et ces dernières images sur la compréhension d'un père par son fils.

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