Cagliostro - Liebe und Leben eines großen Abenteurers en VO.
Grâce à ses tours de magie, le compte de Cagliostro s'introduit au sein de la noblesse française. Disgracié par Louis XVI après une représentation à la cour ayant tourné au scandale, il met sur pied l'escroquerie du collier de la reine pour se venger… Un peu frustrant de découvrir le film via cette reconstitution de 58 minutes sur-charcutée, qui laisse seulement entrevoir quelques grandes scènes (qui, en l'état, courent à toute vitesse). Rien à redire, globalement, ça reste tout à fait dans la veine de ce qu'on nous a laissé de la fin du muet (la capture est pas très représentative de l'aspect du film, tout compte fait) : classe, lyrique, et légèrement onirique.
La période Louis XVI / révolution française est géniale au cinéma, parce qu'elle est toujours approchée via des points de vue radicalement différents qui trahissent quelque chose du réal, de son pays, de son époque (de
Lady Oscar au film de Coppola, on pourrait se faire un éventail sans fin). Chez Griffith, dix ans plus tôt, la cour prenait l'allure d'orgie romaines décadentes. Ici, elle emprunte le visage de ces grandes soirées riches et cyniques qui pullulent dans le cinéma des années 20 (et évidemment de leur parfum de luxure et de vulgarité, comme en témoigne le nu aux diamants), l'architecture immense du palais rappelant moins Versailles que les grandes réceptions art deco que fantasmaient les capitales européennes d'alors. Comme dans
L'Argent et bien d'autres films contemporains il me semble, des petits corps arpentent des décors trop immenses pour eux, des pièces sans fin qu'on traverse pour aller saluer une visite. Il y a dans ce rapport obsessionnel (la richesse + le vide) comme la vision d'une société évidée de ses sentiments élémentaires et de ses émotions humaines.
En l’occurrence, cette tendance est sans doute la plus belle ligne narrative du film, qu'on ne fait malheureusement que deviner : la transformation de Cagliostro, de connard cynique à amoureux idéaliste. Le dernier quart du film est du coup le meilleur, renouant avec une veine mélodramatique sans rien perdre de sa démesure formelle (qui donne à tout le passage en prison un côté particulièrement mental, d'ailleurs). Mais c'est une hésitation plus générale dans la façon de peindre ce personnage qui en fait tout l'intérêt : charlatan nous dit-on, mais dont le film ne dévoilera jamais les trucs, et qui n'aura cependant aucun mal à prédire l'échafaud à la Reine. La cohabitation d'un personnage cynique et de l'envie pourtant d'y croire est résumée par l'excellente ouverture : un homme qui fait des tours d'ombre et de lumière, devant une assemblée de pauvres hébétée qui l'observe en silence... Une image simple et assez terrible du cinéma.
Concernant le DVD : très bel objet de la part de Potemkine, et une image très correcte, mais il y a un truc un peu merdique dans la conversion de framerate, qui donne le sentiment continu d'une saccade. J'ai aussi bien du mal à comprendre la présence du film deux fois sur le DVD.