Forum de FilmDeCulte

Un peu dur (notamment pour moi qui ne connais quasi rien du ciné chinois actuel) de ne pas jouer au jeu des 7 différences avec A Touch Of Sin. Et de décalquer les intentions de l'un sur l'autre...

Dès le début, dans cette chambres où l'amour se joue entre les signes abscons des cartes éparpillées sur le lit, le film lance en parallèle deux types d'enquête. La première, passablement confuse et remplie de trous (et pour cause : ce n'est pas elle qui intéresse le film) est l'intrigue policière. La seconde, mystérieuse et globalisante, est celle de l'énigme de cette Chine contemporaine : quel est ce territoire apocalyptique, qu'est-ce que ce monde en forme de bug (mélange de far west sans loi et de néons criant leur modernité), et ainsi de suite...

Les indices collectés sont déroutants, parce qu'ils sont moins des indices servant le polar que des indices collectés dans ce portrait global du pays. Par exemple ce qui lie le Charbon et les explosion diurnes, comme le démontre très bien Baptiste. Mais aussi ce que dit cette traque au ralenti dans le bus, dans la marée des corps avalant et intégrant l'arme du crime, face à ces avenues et tunnel à l'abandon ; ou cette patinoire nocturne, presque OVNI, face à sa version diurne où le petit carré semble ouvrir sur un no man's land infini ; ou cette fumée pulsionnelle et bordélique, qui envahit une pièce sagement remplie d'écran d'ordinateur ; et ainsi de suite...

Ce que je reproche au film, un peu comme vous, c'est qu'il ne sait pas trouver le rythme pour amener ce bouillon à maturation. Ce n'est pas là la lenteur-dispositif, scellée et sévère, du film de Jia Zhangke (que j'aime moins, pourtant), dont on ne retrouve ici trace que dans le plan-séquence du carnage au salon de coiffure. Black Coal semble plutôt fragmenté, fulgurances aussi éparpillées que ces morceaux de corps qu'on dissémine à travers le territoire chinois. Un peu comme une opération chimique qui aurait raté parce qu'on aurait négligé de la porter à sa température d'ébullition, j'ai le sentiment que le film, trop dilué, pas assez rythmé ni nerveux, n'arrive pas à faire naître quelque chose qui dépasserait son alignement de signes étranges, qui mènerait à un élan plus vaste et à un film plus marquant. Reste l’atmosphère générale, chine glaciale où la pureté de l'hiver et la sophistication de son héroïne mort-vivante côtoie un monde sale et chaotique, dépressif et perdu...

En partie raté, donc, mais je découvre là un excellent réalisateur dont j'irai voir motivé les prochains films.

Délire interprétatif. C'est quoi votre drogue?

Je ne serais pas aussi définitif que Baptiste sur l'interprétation à en tirer, mais un film qui s'ouvre le nez dans le charbon (le titre du film, tout de même !) avec les hurlements des hommes en fond sonore, et qui se ferme par


faut vraiment le vouloir pour refuser d'en déduire quelconque lien...

Le titre original est Feux d'artifice en plein jour.

C'est pas le titre international ? (un peu comme les double-titres d'HHS ?)
Enfin bon, même sans ça...

C'est le sens du mot chinois.

Sinon, je te conseille la lecture de l'interview de la productrice sur FilmDeCulte quand il remarchera.

Mmm je viens de le faire mais j'y vois rien en rapport à notre discussion (ou tu me la conseillais juste comme ça ?)

Je parlais plutôt de l'approche fragmentée de l'intrigue.

"après 8 ans d’écriture et de réécriture"

Ah oui, ça, ça a pu avoir son importance.



Déjà sur son précédent apparemment il y avait un manque de maîtrise narrative dans le processus productif. C'est peut-être un symptôme de ça qu'on retrouve dans son nouveau film. Quelque chose qu'il cherchera à gommer, ou à assumer pour en faire une singularité mieux exploitée? Ca reste à voir pour la suite. Reste qu'écrire et réécrire un film pendant huit ans, ça ne peut que favoriser l'éparpillement et le manque de cohérence dans l'intention.

J'ai revu Train de nuit, tu vois bien les problèmes de narration, avec les scènes totalement déconnectées où tu vois le veuf bosser à l'usine. Dans Black Coal, j'ai ressenti les soucis quand il revenait à l'intrigue policière, au 2/3. La première heure, en revanche, je trouvais ça extraordinaire, la gestion de l'ellipse est folle, les apparitions presque fantomatiques de la jeune fille fascinantes... J'aimerai bien lire le script initial.

Perso, j'ai l'impression qu'il fait exprès de brouiller son scénario... Surtout après 8 ans à avoir travailler dessus, ca me semble peu crédible que cela ne soit pas volontaire... J'ai même l'impression qu'il collectionne tous ces "effets-types", un peu clichés, des films chinois/asiatiques indépendants que les festivals sur-adorent :
- les jeux de lumières voyants
- le rythme lent
- les scènes de violence
- les ellipses narratives
- des personnages en marge, un peu anti-sociaux
- Et tout ca bien sur pour afficher la terrible réalité de la vie chinoise où règne l'indépendantisme et la violence

Sinon, je vous rejoint pour Train de nuit.

Tout pareil que Tom et Art Core.

J'ai lutté contre le sommeil durant les trois premiers quarts d'heure et me suis fait bien chier pour l'heure restante face à cette enquête jamais engageante et pourtant pas inintéressante et plutôt belle par certains aspects de ses révélations.
Visuellement, il y a de bonnes choses dans cette esthétique crado-néoneuse d'une Chine pourrie jusqu'à l'os mais narrativement et émotionnellement, c'est pénible...

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Bon, je viens de regarder après l'avoir vu dans plusieurs top sur le forum. La photo est classe (j'aime bien les néons) Art Core parlait de Only God Forgives, mais moi ça m'a plutôt fait penser au film mal-aimé de Coppola "One from the Heart". Donc oui, c'est assez soigné, il y a de bonnes idées de mises en scènes et tout ça mais le film a un gros problème de rythme et le spectateur ne rentre jamais totalement dans l'histoire. Autre remarque, même si je suis loin d'être un spécialiste du cinéma chinois, je trouve que pour le coup on aurait plus dit un film coréen avec du plomb dans l'aile.

le rythme est flottant, on va dire. Perso je l'aime de plus en plus.