Forum de FilmDeCulte

En 1999, un employé d’une carrière minière est retrouvé assassiné et son corps dispersé aux quatre coins de la Mandchourie. L’inspecteur Zhang mène l’enquête, mais doit rapidement abandonner l’affaire après avoir été blessé lors de l’interpellation des principaux suspects. Cinq ans plus tard, deux nouveaux meurtres sont commis dans la région, tous deux liés à l’épouse de la première victime. Devenu agent de sécurité, Zhang décide de reprendre du service. Son enquête l’amène à se rapprocher dangereusement de la mystérieuse jeune femme.

L'Ours d'or du dernier Festival de Berlin est un sacré morceau de mise en scène qui rend hommage aux polars ricains des années 50 mais aussi à un certain cinéma est-européen contemporain. Il y a des scènes absolument sublimes - la présentation du héros, la scène du patin à glace, la scène de la roue - mais le scénario a quelques faiblesses (pas pigé le coup du bus, qui lui donne l'info ?), mais j'aime beaucoup ce portrait de la Chine en creux, où l'on tue pour une poignée de yuans, où être flic n'est pas un métier durable...

ça méritait un prix de la mise en scène, je trouve que l'Ours plus le prix d'interprétation c'est un peu beaucoup.
5/6

Je trouve le film très beau, la mise en scène est vraiment splendide dans une sophistication légère et pas ostentatoire mais pourtant d'une précision remarquable. La photo est également splendide oscillant sans cesse entre une froideur hivernale blanche et grise et le reflet colorés des néons de la ville (ça m'a d'ailleurs souvent évoqué Only God Forgives)
Après j'ai jamais réussi à rentrer dedans, à comprendre vraiment les enjeux. L'intrigue est évidemment un prétexte, elle est confuse, très elliptique voire incohérente (le truc du bus en effet j'ai rien compris) mais finalement il n'y a quasiment rien derrière. Une relation trouble entre l'ancien flic et la femme fatale ? Ca reste en surface. Un portrait de la Chine contemporaine ? Je trouve que d'autres films y parviennent beaucoup mieux (Mystery par ex). Une ballade poétique ? Trop distendu, trop inégal pour ça. Dans le genre polar chinois d'auteur désespéré j'avais finalement préféré le moins ostentatoire mais finalement beaucoup plus fort People Mountain People Sea.
Du coup je m'y suis beaucoup ennuyé sans jamais m'accrocher aux personnages. J'ai un peu l'impression que c'est un bel exercice de style mais c'est tout avec quelques éclats magnifiques (le plan de la fusillade génialissime au début, les feux d'artifices en plein jour). Ceci dit le réalisateur a un talent évident et pourrait faire des merveilles un jour. A suivre.

3/6

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CroqAnimement votre

C'est le même chef op que pour People Mountain People Sea. Dong Jinsong

Marrant.

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CroqAnimement votre

Il est très fort. Je suis sûr que les endroits sont glauques et gris au possible.

ce qui est marrant c'est que j'aurai pu écrire la même chose que toi sur People Mountain People Sea justement. Je suppose que tu entres ou pas dans le film, avec cette caméra un peu "flottante".

Oui ce sont deux films très similaires au fond avec cette même approche fragmentaire et opaque au niveau de l'intrigue.

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CroqAnimement votre

d'ailleurs, à ma grande surprise, le film a très bien marché en Chine.

D'accord avec Art Core.

Ca démarre très fort avec ce premier plan où le charbon semble pulser comme si cette matière noire était vivante et que c'était elle qui avait avalé le membre humain; bonne idée aussi des pastèques que mangent les ouvriers, similaires à des parties humaines sanglantes. Je pourrais de toute façon lister pas mal de fulgurances de mise en scène tout au long du film - poursuite en patin à glaces, le tueur filmé comme dans un slasher, la violence qui surgit dans la torpeur générale, cette belle et originale séquence de fin, etc.

Le souci, c'est que tout cela gravite autour de l'intrigue policière, sans réellement la nourrir. Quantité d'idées formelles ne trouvent aucun écho dans le parcours des personnages qui sont peu consistants et dont on se fout un peu. Le rythme et le ton du film sont très plats sans qu'on y trouve une justification dans la trame narrative. Pas convaincu non plus que cela serve l'atmosphère du film, qui est indéniablement réussie mais qui ne dépend pas de cette lenteur pour dépeindre cette Chine sordide où la folie dépasse de toutes parts.

C'est vraiment dommage que l'intrigue policière ne suive pas, que les enjeux humains des protagonistes soient réduits à leur plus simple expression, parce que le tableau brossé par Diao Yinan de la Chine contemporaine est glaçant et singulier. Un peu étonné, quand même, que le filme obtienne l'Ours d'or, et l'acteur l'Ours d'argent; ça devait vraiment être la dèche dans la sélection.

Au contraire, la sélection était plutôt riche cette année avec le recul. Sinon laissez le film infuser en vous... Je comprends les défauts que vous énoncez mais je vous assure que deux mois après le film est vraiment marquant.

C'est parti pour ma première critique sur ce forum, je me lance direct dans le bain (soyez indulgents).

Je prends pas beaucoup de risques, je partage les avis postés. J'avais plutôt bien aimé son film précédent, Train de nuit, très noir, mais pareil que dans Black Coal, le fil narratif avait quelques imprécisions qui nuisent au film.

Des bouts de corps sont retrouvés dans du charbon un peu partout dans la région. L'inspecteur Zhang s'occupe de l'affaire. Le film est découpé en deux périodes 1999 et 2004 superbement raccordé par Zhang foncant en moto dans un tunnel. Zhang quitte la police pour reprendre l'enquête à titre non professionnel après de nouveaux meurtres. Tous ces meurtres sont liés à une femme et une relation ambigüe nait entre l'ex flic et elle.

On est dans la Chine provinciale, en plein hiver dans un décor industriel. Tous les personnages sont assez misérables, laissés à eux mêmes. L'inspecteur devient alcoolique, seul, plaqué ridiculement par sa femme. La jeune femme est aussi souriante que mon banquier et travaille dans une teinturerie plutôt minable avec un patron limite pervers qui abuse d'elle. Une femme qui est un peu Hichcockienne (Vertigo like) par ailleurs... Les quelques scènes d'amour ressemblent plus à des recherches sauvages d'affection qu'à des moments de tendresse. Les flics se trompent de coupables, les autorités se trompent de mort. On reprend les codes des polars/film noir : filature, relation entre la femme fatale et le flic, mais sans jamais vouloir en faire un élément pesant, tout reste très froid. Le rythme est très lent, empêchant qu'on rentre complètement dans l'intrigue policière.

Diao Yinan s'amuse un tout petit peu avec les codes:
Des poursuites un peu bizarres : dans le bus, on ne sait plus si c'est Zhang qui pourchasse le tueur ou le tueur qui pourchasse Zhang... ; on a droit à poursuite en patin a glace et une filature de la jeune fille avec une mobylette toute pourrie
Une arme un peu ridicule : patin à glace
Il y a quelques scènes ironiques qui viennent ponctuer l'histoire et redonner le sourire : l'exercice d'incendie, le vol de la moto, ...

Mais bon, il ne va pas assez loin... On reste dans un film finalement un peu impersonnel, il reprend les codes des polars sans jamais jouer complètement avec eux. Pas de véritable vision. Et puis, je l'ai trouvé un peu m'as-tu-vu... On embrouille le spectateur de façon délibérée, mais bon ca ne suffit pas pour faire The Big Sleep...

Après formellement, je trouve ca plutôt réussi. Il y a de bonnes idées. Sa façon de cadrer m'a parfois fait pensé à Bresson, bouteille qui tombe des marches au tout début, scène où le serial-killer met ses mains derrière son dos,... Il y a de belles séquences : celle de patinage, la séquence de fin, celle de danse (danser pour oublier ?), de beaux travellings.

Pas mal de contraste/rupture dans ce film :
sur les lumières/couleurs : on oscille entre des scènes très grises/blanches (commissariat) et des scènes aux couleurs très crillardes et kitsch (scène du salon de coiffure, de la boîte de nuit, grande roue).
rupture dans le rythme: passage très lent et parfois brusque accélération
théoriquement : Les corps passent de la glace du camion au charbon du train. On commence avec du charbon : de la matière brute, de l'énergie future. On finit avec les feux d'artifices (énergie transformée). A la base, les feux d'artifices étaient réalisés avec du charbon...

Je trouve qu'il manque une pensée globale pour le film. Sinon, moi aussi, j'ai du mal à voir une véritable chronique sociale de la Chine actuelle... Il y a quelques éléments intéressants mais pas de quoi s'extasier non plus. Ca reste pas bien méchant. Surtout après avoir vu A touch of Sin... C'est un film qui s'inscrit plus dans une lignée occidentale qu'orientale et c'est peut être même la raison de son succès en Chine...


3,5/6 peut mieux faire

ça a l'air d'un bon film noir et c'est bien plus tentant que le dernier Jia-Zang Khe.

Aaah, intéressant ça. En fait, le film fait son miel de l'éruption intermittente de la folie présente dans tous les recoins de la société chinoise. Mais la fin semble prédire, à travers un feu d'artifice en plein jour, que la folie ne va pas tarder à exploser. Que le boom économique euphorique de ces dernières années (le charbon) ne conduit qu'à une fête grotesque et ratée, le feu d'artifice en plein jour, qui finit par être dangereux.

Le problème c'est que le film a du mal à relier l'histoire de ses personnages à son constat politique: tout part d'un type qui veut être payé en nature et qui va finir tué, mais en quoi ceci est-il propre à la Chine actuelle?

Super idée que je n'avais pas perçu.

Oui, très juste.
Il veut faire des ponts entre son polar et la Chine actuelle.

Idem, on peut faire d'autres rapprochements :
- les corps sont découpés / morcellés comme la Chine actuelle : nouveaux riches/travailleurs pauvres - campagne/ville - communisme/capitalisme
- un peuple endormi (?): les Chinois seraient aussi froids que le paysage aux alentours