Forum de FilmDeCulte

Anna Karenina en VO.



Russie, 1874. La belle et ardente Anna Karénine jouit de tout ce à quoi ses contemporains aspirent : mariée à Karénine, un haut fonctionnaire du gouvernement à qui elle a donné un fils, elle a atteint un éminent statut social à Saint-Pétersbourg. Lors d'un voyage à Moscou, son regard croise celui d'un charmant officier de la cavalerie.


Joe Wright, c'est comme un pote que je reviens visiter avec plaisir tous les ans, pour voir comment il s'en sort. Accroché à l'espoir de le voir renouer avec la (très relative) simplicité de son premier film lumineux... Mais à chaque visite je le vois de plus en plus ambitieux et nerveux, s'enfoncer petit à petit dans ses impasses, tout en devenant incontestablement de plus en plus doué.

Car question virtuosité, on atteint des extrêmes. Tous les jeux entourant les relations entre théâtre et décors réels, croquées à coup de plan-séquences impossibles, crée un tourbillon magicien qui colle au fauteuil. Sans être débile, cette maestra ne semble malheureusement qu'assez rarement servir une implication accrue dans le récit, ni un surplus de sens. On sent des choses poindre, des choses générales tenant d'avantage au concept qu'à ses applications : l'importance du paraître dans une noblesse littéralement au théâtre, les pauvres qui envahissent les coulisses et greniers, les besoins de respirations en fuyant dans les décors réels enneigés... Cette agitation ne parvient cependant pas à attirer l'attention sur autre chose qu'elle même, la peur du vide de ce réal prenant le pas sur tout le reste. Et comme Wright court également après une flamboyance graphique (non dénuée de kitsch et d'une certaine vulgarité, parfois), transformant son héroïne en poupée à qui on va faire essayer toute la collection automne-hiver, le film n'en devient que plus glacé.

Au final, on ne retient pas grand chose une fois passée l'expérience agréable de montagnes russes. Cela fait maintenant trois films que Wright glisse sur cette pente baroque, et j'ai toujours de l'affection pour ce réal surdoué tellement plus ambitieux et passionné que la plupart de ses contemporains. Mais je m'inquiète de le voir un jour dépasser ce besoin de légitimité (peut-être né de la réception mitigée de son premier) pour laisser respirer et s'épanouir les récits amples qu'il entend adapter.

Tu as vu Le Soliste ? C'est mon préféré de lui.

Ah non, tiens, je l'avais oublié, le seul qui me manque. De loin ça faisait pas très envie.

Reviens-moi, c'est une petite merveille.
Celui-là il me fait assez peur.

Si tu as aimé Reviens-moi (qui déjà dans son style se la jouait très virtuose), tu devrais aimer celui-ci.

De toute façon, si vous avez le temps, allez-y quand même faire un tour, c'est vraiment impressionnant, y a une folie et une démesure dans le concept qui vaut le coup d’œil - même si au final ça ne produit pas grand chose de durable.

Découvert dans un avion. Aimé. Revu. A-doré. Il m'a donné envie de faire ce type de journalisme - que je ne fais pas du tout d'ailleurs.

Dans le genre classique littéraire, je te recommande d'aller voir Les hauts de Hurlevent. La première moitié assez virtuose vaut vraiment le coup d'oeil, la seconde partie ne fonctionne pas.

Ouais c'était prévu (et ce sera l'occasion d'inaugurer Arnold) - quoiqu'en fait j'aimerais peut-être mieux me réserver l'intrigue pour le bouquin avant.

Le livre est génial (le Brontê) mais je crois qu'on peu vraiment en faire ce qu'on veut, de Bunuel à Kate Bush ça a très bien été compris Puis ça a une telle capacité de projection, tout le monde peut vraiment y mettre quelque chose.

Ah mais j'entends bien, mais si je lis le bouquin je préfère le faire sans avoir été spoilé.

Je te trouve indulgent parce qu’effectivement l'ouverture du film est très prometteuse, il y a notamment un incroyable plan-séquence où l'on change de décor en direct avec des personnages qui se croisent dans tous les sens et qui font vivre la scène à la manière d'un ballet. Mais rapidement Wright abdique plus ou moins et retombe dans quelque chose de finalement assez académique même si bien évidemment on retrouve ça et là des plans et des séquences sortant du lot (la course, le feu d'artifice, toutes les scènes dans les coursives...). Et au final j'ai plus l'impression d'un réalisateur galvanisé par son concept ténu et par ses quelques idées visuelles que véritablement impliqué dans la complexité de son récit et de ses ramifications. D’ailleurs sans avoir lu le roman, j'ai vraiment le sentiment d'une adaptation totalement ratée, ne sachant pas trancher, introduisant des personnages d'une manière très superficielles (le frère de Levin) et tentant des sous-intrigues mal digérées (Levin et Kitty surtout qui semblent avoir une histoire passionnante [plus même que le récit principal] mais dont on a du mal à voir l'intérêt dans le film présent).

Et je regrette du coup de ne pas avoir lu le roman parce que j'ai vraiment eu le sentiment d'une vulgarisation un peu synthétique. On pressent la profondeur de certains personnages sans jamais vraiment la pénétrer (notamment le fascinant personnage de Jude Law). Et puis au final c'est quelque chose de très classique, la passion dévorante puis le poids des conventions qui vient tout gâcher. Le film a du mal à sortir de ça, à voir plus loin, plus grand. C'est dommage. D'autant que le casting est vraiment bien, notamment Jude Law qui est génial (une nomination pour l'oscar du second rôle serait pas volée) et même Keira Knightley qui ne m'a pas toujours convaincu mais qui est tragique à souhait.

Bref on se retrouve avec un film très inégal et un réalisateur qui semble vraiment avoir du mal à trouver ses propres sujets. C'est exactement le même problème qu'avait son précédent, Hanna. Visuellement à tomber mais paradoxalement totalement vide. Reviens-moi est vraiment le sommet de sa carrière où il a parfaitement réussi à fusionner le souffle de sa mise-en-scène au souffle romantique). Alors il reste de biens belles images (Levin voyant passer une calèche debout sur un tas de foin, les plans finaux) mais tout ça est un peu vide, un peu artificiel et c'est bien dommage.

3/6

PS : je me demande sincèrement comment Raphaël Personnaz s'est retrouvé dans ce film (pour trois quatre plans).
PS2 : Tom tu es anti notes ? (je viens de réaliser que tu notais pas les films)

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CroqAnimement votre

Oui certes mais je trouverai toujours bizarre de caster le mec à Paris, le faire venir à Londres (ou aux States je sais pas) pour le faire tourner 4 plans dans lesquels personne (ou presque) va le reconnaître.

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CroqAnimement votre

Le tourbillon du début sert à présenter le concept, mais je suis pas sûr que j'aurais adoré 2h de film à ce rythme... Après c'est vrai qu'à partir grosso-modo de l'accouchement, le film se calme méchamment. Mais les scènes les plus belles sont pas forcément les plus virtuoses (la toilette du grand frère, par exemple).


Je pense qu'ils sont là pour faire un contrepoint moral à toute l'histoire (amour sain, simple, rural). Mais c'est vrai, j'ai aussi l'impression de rester en surface d'un roman touffu - sauf que je met plutôt ça sur les épaules de Wright que du scénariste.


Je suis le seul à préférer son premier de loin ? Moi Reviens-moi ça me semble déjà un poil artificiel et vitrifié... J'aime qu'Orgueil et préjugés soit le seul où il cherche moins à faire le beau qu'à raconter son histoire.


Quasi depuis le début du retour sur le forum. Enfin anti- j'en sais rien, en tout cas moi ça me lourdait, je trouvais bizarre à foutre 4,5 à un film sympa d'aujourd'hui et la même note le lendemain à un grand classique, je pensais à la note toute la séance... enfin bref, ça me faisait chier j'ai arrêté.

Globalement même avis et même note qu'Art Core. Les trois premiers quarts d'heure j'étais quasi à fond, j'y croyais, j'étais ébahi par la virtuosité et j'étais assez fasciné par cet étrange film, par l'audace, etc. Puis sans m'en rendre compte j'ai décroché, jusqu'à trouver le temps long et regretter, finalement, de ne pas être ému une seule seconde par une histoire qui avait pourtant démarré sur les chapeaux de roues. Gros blocage, aussi, avec Keira Knightley... J'ai de plus en plus de mal à supporter ces grimaces.
Je reste un immense fan de Atonement (5,5/6), qui est pour moi un quasi chef-d'oeuvre. Et curieusement, ses autres films de marchent pas trop sur moi (2/6 pour Pride... et Hanna).

3/6 donc pour celui-ci.

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Ed Wood:"What do you know? Haven't you heard of suspension of disbelief?"

Je me situe quelque part entre Arnotte/Art Core et Tom. Ils ont tous déjà tout dit. C'est bluffant, parfois électrisant, mais aussi souvent un peu vain, à distance. Et chuis d'accord avec Art que la sous-intrigue est mieux que l'intrigue principale (la scène des cubes tue).

En tout cas ce Joe Wright est vraiment un drôle d'énergumène et je suis curieux de voir ce qu'il va faire après.

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Liam Engle: réalisateur et scénariste