Forum de FilmDeCulte

Tout va bien (1972)
A l'apparition du titre, tout en lettres capitales colorées en bleu, blanc et rouge, on se dit forcément, pour paraphraser un vieux Télérama des années 90, "Cédugodard". D'ailleurs, les premiers plans qui démontent le financement du système, sur une voix-off qui explique comment produire du cinéma, suivie de la voix d'une Jane Fonda engagée à gauche qui demande à Montand ex-communiste (improbable casting) s'il aime ses jambes, ses pieds, ses fesses, reproduisent en quelque sorte la fameuse ouverture du Mépris, collant ici à la genèse du projet (Rassam qui approche Godard avec l'espoir de le voir sortir de sa parenthèse clandestine Dziga Vertovienne, et revenir vers / reproduire un cinéma plus classique). Et classique, le film l'est, dans un sens, avec sa structure assez linéaire, sa structure binaire sur "un couple en crise dans une société en crise" (je cite la jaquette). Evidemment, ce canevas classique, Godard vient le dynamiter, à coups d'interviews face caméra dans lesquelles les acteurs apostrophent le spectateur (en citant Brecht d'ailleurs), à coups de piques contre Truffaut ("faut vraiment être débile pour adapter Goodis"), de merveilleux travellings où les voitures de Week-end sont ici remplacées par des corps et des caddies, et d'un discours politique clair, qui prend chair dans l'occupation d'une usine et la séquestration d'un patron. Il faut aussi mentionner l'investissement et le rôle de Gorin, qui seconde un Godard diminué par un accident de voiture, et sans qui le film n'aurait pu se faire. C'est une œuvre merveilleuse, dont l'échec plonge Godard dans une impasse, et qui serait encore plus fort si Gaumont avait eu la bonne idée de sous-titrer les dialogues en anglais de Jane Fonda...
6/6


Top évolutif :

Plus beau film du monde :
1963 : Le Mépris

Films magnifiques :
1965 : Pierrot le Fou
1968 : One Plus One
1960 : À bout de souffle

Le très bon :
1962 : Vivre sa vie
1966 : Masculin féminin
1960 : Le Petit Soldat
1966 : Deux ou trois choses que je sais d'elle
1993 : Hélas pour moi
2001 : Éloge de l'amour
1972 : Tout va bien

Le sympa :
1964 : Bande à part
1964 : Une femme mariée
1967 : Week-end
2004 : Notre musique
1965 : Alphaville
1966 : Made in USA
1975 : Numéro deux
1970 : Vladimir et Rosa
1987 : King Lear
1990 : Nouvelle vague


Le bidon :
1967 : La Chinoise
1985 : Détective
1961 : Une femme est une femme
1963 : Les Carabiniers
1995 : JLG/JLG
1996 : For Ever Mozart
2010 : Film Socialisme
2014 : Adieu au langage

Prochaine étape, on attaque les années 80 avec Sauve qui peut (la vie), Prénom Carmen (que j'ai déjà vu mais sans le moindre souvenir), et Je vous salue Marie. Et j'aurai peut-être fait à peu près le tour et vu ceux que je voulais voir.

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Et donc j'en ai toujours vu... aucun.
Paie ton trou béant dans ta cinéphilie. Je comptais rattraper ça, mais après la douche froide Truffaut, qui m'emmerde au plus haut point, c'est redescendu de ma liste des priorités.

J'ai Le Petit soldat dans mes cartons : pour me lancer, ça peut le faire ?

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"Je vois ce que tu veux dire, mais..."
"Je me suis mal exprimé, pardon."

Je trouve Truffaut sans grand intérêt, Godard je pense que c'est vraiment pas la même catégorie, même si c'est souvent fumeux, d'ailleurs je croyais que Tout Va Bien faisait partie des imbitables, mais apparement non, c'est cool.

Pas vu Le Petit Soldat, mais début 60s on ne peut pas trop se tromper, mon préféré c'est Vivre Sa Vie, après y a bien sur les gros classiques Pierrot le Fou et Le Mépris (que j'ai vu jeune et sans doute un peu manqué du coup), et puis pourquoi pas commencer par A Bout de Souffle? J'ai vu recemment Une Femme Mariée et c'est très beau.

Ah ouais, chaud... Je rejoins Azazello, c'est dommage de se bloquer à cause de Truffaut, ça n'a rien à voir. Mais c'est pas pour autant que Godard va te plaire... Je te conseille de commencer direct par Le Mépris, c'est l'un des plus accessibles et c'est le plus beau.

Commencer par les années 60 me semble préférable en effet. Même là il y a plusieurs périodes. Soit tu attaques par le haut niveau, magnifique mais ultra bourratif (Le Mépris, Pierrot le fou), soit par des œuvres plus modeste, souvent en noir et blanc, qui ont l'air d'œuvres de jeunesse : Le Petit soldat, Masculin féminin, Vivre sa vie... Dans un cas comme dans l'autre, il faut au moins voir Le Mépris.
Après, ce qui est génial chez lui, c'est qu'il y a toujours quelque chose à prendre, même dans ses films les plus obscurs.

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Oui, je sais bien, mais comme ils sont toujours associés, forcément...
Après, c'est vrai que toute la Nouvelle Vague et ses acteurs robotiques, j'ai du mal en général. J'ai La maman et la putain que j'ai déjà lancé trois fois, et que je coupe chaque fois après 5 minutes, pas le courage.

En tout cas, merci à tous.

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"Je vois ce que tu veux dire, mais..."
"Je me suis mal exprimé, pardon."

Masculin féminin est beaucoup plus joyeux, par exemple. J'adore La Maman et la putain, autant que Le Mépris d'ailleurs, mais ce sont déjà des films de vieux. Alors que Le Petit soldat, A bout de souffle, Masculin féminin, Bande à part, Une femme est une femme, ce sont des films vraiment jeunes, comme les premiers Milos Forman. Et je crois d'ailleurs que, malgré la chappe de plomb qui règne sur sa filmo intouchable et qui fait que tout ce qu'il dit/filme doit être religieusement écouté, il y a parfois beaucoup d'humour et de malice là où on croit voir du discours. Quand j'ai attaqué ce rattrapage il y a un an, j'ai véritablement pris plaisir à partir du moment où j'ai osé aussi en rire. J'avais presque le calepin à la main pour noter des répliques, et je conseillais justement à des FF ou QGJ de les regarder à tout prix tant ça me faisait penser à Lose actually.

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Ca c'est très vrai, quand je regarde ces Godard là je rigole beaucoup, parfois sur le mode "ouais c'est ça Godard allez arrête ton char" mais c'est un plaisir. Jusqu'à ce que ça m'agace dans certains films (voir-ci dessous).

Car j'avais pas fait de top:

1- Le Mépris : dans mon top 10 de tous les temps. J'ai dû essuyer une première vision un peu ennuyée avant de retenter par fascination pour la plastique du film et de prendre une énorme claque. Ce qui hausse le film au-dessus de tous les autres Godard, pour moi, c'est la douceur que le cinéaste associe à sa liberté chérie. Le film est baigné d'une vibration chaleureuse et mélancolique qui me prend le coeur... Je l'ai vu sept ou huit fois et il y a à chaque fois un petit détail, un enchaînement ou l'intensité d'un plan qu'on découvre sous une lumière nouvelle. On peut reconnaître à Godard un certain courage mais aussi peut-être du snobisme de s'être ensuite détourné de ce lyrisme grâce auquel il aurait sans doute attiré beaucoup plus de monde en salles que For ever Mozart...

2- Vivre sa vie
Masculin féminin: deux films où l'on ressent clairement le désir de liberté de cette époque, et le prix à payer. Mais je descends déjà à 5/6.

4- A bout de souffle: je n'aime pas trop Belmondo mais c'est un film assez jouissif sur le plan formel avec ces fameux vrais-faux raccords.

5- Weekend: un vrai foutoir grisant.

6- Bande à part: drôle et léger.

7- Film socialisme: pas mal mais trop foutraque pour moi. Je me rappelle y avoir emmené une fille tout juste rencontrée devant la bibliothèque universitaire de Bron dans la banlieue de Lyon, qu'on avait trouvée fermée. Avec le recul elle était sacrément ouverte cette fille, pour venir avec moi voir un Godard tardif!

8- Pierrot le fou: peut-être le film le plus encensé après Le Mépris mais il m'a prodigieusement agacé et au final ennuyé. Ce Godard facétieux me plaît moins, les personnages me semblent un peu débiles.

9- For ever Mozart: derrière le titre attirant, le Godard poseur et imbitable à la limite du supportable. Quel sens donne-t-il à tout ça en dehors de vouloir être indéchiffrable?

Tout va bien et Le Petit soldat: m'en souviens plus.

Tout va Bien et le Petit Soldat ce sont deux très bon film, et on voit la rapidité des changements dans le cinéma ces années là, à peine 10 ans entre les deux, Godard permet de sentir ce qui travaillait dans le réel à cette epoque.

Tout va Bien est indissociable à la lettre à Jane Fonda où io se paye son actrice, autour de la confusion entre engagement mediatique pro Vietnam et une forme de Charity Business. La lettre est brillante, mais on ne peut se defendre d'une mauvaise foi, où il transfert sur l'actrice des critiques qui sont plus diffusement liées à la production plus classique et commerciale de son film.

Pour moi je me demande si son film que je préfère n'est pas Sauve qui peut (la Vie). J'aime bien sa periode de la fin des années 70, début des années 80, mais la connais mal.

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Mais peut-être la nécessité accrue de faire confiance incite-t-elle à la mériter davantage

Erving Goffman

Prénom Carmen (1982)
Il se passe un truc bien triste avec Godard au tournant des années 80, il devient plombant, tout simplement. Je ne dis pas que ses films sont mauvais pour autant (même si je peine à comprendre ce qui a valu à celui-ci un Lion d'or à Venise - la troisième place au top annuel des Cahiers me surprenant déjà moins), mais je les trouve bien plus vides (et non simplement dépouillés, épurés), moins captivants, moins frappants, moins ludiques, et sans même le prétexte de l'opacité. Je crois même que je préfère un Vladimir et Rosa ou un Numéro deux à Détectives, Forever Mozart ou ce Prénom Carmen. Ici, j'ai même du mal à piger de quoi ça parle. Je comprends l'histoire dans ses grandes lignes, mais je ne trouve pas le moindre intérêt à chaque scène isolée. Je ne pige pas ce qu'il nous dit, cette histoire d'amour déchirée, ce flic égaré, ce vieux cinéaste dans un asile (joué par Godard lui-même qui tente le burlesque avant Soigne ta droite), cette scène de branlette sous la douche, cette omniprésence de Beethoven... Et le texte de Bergala fourni avec le DVD n'aide guère.
2/6

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Assez d'accord, le Godard tardif c'est souvent un mélange de fumisterie et de fulgurances , et là j'ai pas trouvé les fulgurances.

Je crois quand-même qu'à partir d'Eloge de l'Amour , quand il commence l'Histoire du Cinéma, ses films deviennent de plus en plus cohérents (mais peuvent êtrevus comme des amorces et annexes de l'histoire), un peu à la Chris Marker d'ailleurs, même s'il maintient de façon ténue l'idée d'acteurs et de personnages de fiction.

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Mais peut-être la nécessité accrue de faire confiance incite-t-elle à la mériter davantage

Erving Goffman

MERCI.
J'avais trouvé ça pratiquement irregardable (d'une laideur et d'une chianteur absolue) et ça m'a dégoûté de Godard du coup je n'ai quasi rien vu...

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Ed Wood:"What do you know? Haven't you heard of suspension of disbelief?"

Ahah, merci beaucoup !!!

Oui je me rends compte que c'est une avalanche de 3/6 (environ), et que les bonnes surprises sont rares. Je ne sais pas encore ce que je regarderai ce soir du coup. Faut pas que je me loupe

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Tu as vu Le Mépris tout de même? Et A bout de Souffle? Ils sont vraiment importants et pourraient te plaire je pense, surtout le premier comme tu aimes la bonne musique Sinon Masculin féminin se regarde très bien aussi.

Et bon anniv Cosmo!