[Info modo : post en réponse à un premier message effacé]Un de mes films préférés, je le trouve sublime.
Voilà ce que j'en écrivais sur un autre forum :
Je viens de découvrir ce film et ce réalisateur (qui n'a à son actif qu'un deuxième long-métrage,
The Passion of Darkly Noon de 1995) et j'ai l'impression d'avoir deterré tout seul un chef-d'oeuvre du cinéma. Ethiquement je me dois d'en parler ici et d'en faire la promotion.
C'est en tombant sur un vieux numéro de Mad-Movies et en relisant une interview passionnante du réalisateur que j'ai eu envie de partir à la découverte de sa filmographie. Le film n'existe malheureusement pas en DVD (à part au Japon apparement
) et c'est grâce à Internet que j'ai pu le voir (dans d'excellentes conditions en outre).
Qu'est-ce donc que ce film me direz-vous ? C'est un film nous racontant l'histoire de Seth Dove, un jeune enfant vivant dans une amérique profonde et particulièrement coupée de tous liens avec la civilisation. Il vit dans une énorme maison de bois au milieu d'étendues infinies de champ de maïs. Le petit Seth évolue entre un père moralement absent, une mère hystèrique et un frère (Viggo Mortensen) qui revient de la guerre. Il a une voisine anglaise dont il est rapidement persuadé qu'elle est une vampire. Mais voilà des meurtres d'enfants vont survenir venant chambouler toutes la perception de Seth.
Bon je raconte mal mais ce film est un chef-d'oeuvre qui m'a frappé violemment au coeur. Un film tout d'abord très étrange, installant d'emblée une atmosphère pesante et inéluctable. On y voit se débattre des personnages prisonniers d'un décors pourtant totalement vide et ouvert vers le monde mais dont les derniers artefacts sont en pleine déliquescence. Ce monde desespéré (car il l'est de la première à la dernière minute) et dont il semble impossible de pouvoir sortir enferme les personnages et les torture jusqu'à l'explosion.
C'est tout simplement le film sur l'enfance le plus douloureux qu'il m'ait été donné de voir. De la cruauté primaire de l'enfant (qui au début du film s'amuse à faire exploser des grenouilles) à la cruauté des hommes reporté sur lui il va perdre toute possibilités d'innocence. Il est condamné à vivre dans ce monde douloureux et à l'accepter.
Le film distille une ambiance étrange limite fantastique, très evanescente. On touche parfois à une certaine bizarrerie mais qui jamais ne deconnecte le spectateur du point de vue de Seth. Et lorsque le film verse dans l'horreur pure, ce n'est pas de la peur ou du dégoût que l'on ressent mais une émotion mélancolique devant cet enfant dont l'imaginaire est si douloureusement violé.
Et puis le titre en VO est
The Reflecting Skin et c'est donc bien une histoire de peau, de chair. Car tout fantomatique que le film soit, il s'incarne dans ces personnages et leur donne des corps pourissants comme les fruits verolés d'un arbre malade. C'est là aussi que le film fait mal, à la surface de la peau dans les chairs.
Un petit chef-d'oeuvre d'une force exemplaire et qui ose aller très loin dans ce qu'il dit et ce qu'il montre. Aidé par des décors monstrueux (inspiré notamment d'Andrew Wyeth et de Hopper), le film est esthétiquement magnifique. Xertains plans se composent comme de véritables toiles. On comprend d'autant moins sa disparition du marché et le peu d'intérêt qui lui est porté.
Un dernier element à noter est la B.O. Elle est absolument GIGANTESQUE
! Dès le générique du début elle prend à la gorge et sa grandiloquence (beaucoup de choeurs) m'a fait vibrer comme rarement. Vraiment c'est extrêmement rare qu'une B.O me fasse autant d'effets. Elle est (bien sûr
) introuvable que ce soit en CD ou même sur Internet. Son auteur est l'inconnu (c'est d'autant plus surprenant), Nick Bicât qui travaille essentiellement pour la télévision.
A ranger à côté de
Cria Cuervos,
Paperhouse ou le récent (raté mais très similaire)
Tideland de Gilliam (qui s'en inspire beaucoup pour être totalement honnête).