Et donc tant attendu le palmarès
Etats-Unis (4) 5/6 First Cow Très beau film qui explore l'histoire américaine non pas par le mythe viril du cowboy mais par l'esprit d'entreprise des simples pionniers.
3/6 Paranoia de Steven Soderbergh Un "petit" Soderbergh, qui ne vaut pas pour son originalité (même si la première partie est bien menée) mais pour son actrice, Claire Foy, déjà remarquable dans First Man. Bref, moyen mais pas déshonorant.
4/6 90’s de Jonah Hill La tagline complètement débile. Beau film sur l'apprentissage par la skate à la vie américaine. J'aime beaucoup le travail sur l'image, le soin apporté à la mise en scène pour se différencier à la fois de Gus van Sant et de Larry Clark (un peu moins). Le film subit un petit coup de mou au 2/3 mais la fin est très belle. Non, vraiment je conseille, un très bon film de Deauville (sauf qu'il n'y était pas, haha).
3/6 Don't Worry, He Won't Get Far on Foot de Gus van Sant Curieuse trajectoire que celle de Gus Van Sant, roi du cinéma indépendant américain dans les années 2000 et depuis rentré dans le rang. Ses films sont encore sélectionnés dans les grands festivals mais ne génèrent disons-le qu'un ennui poli. C'est encore le cas ici. J'aime bien la douceur avec laquelle il s'empare du sujet, la performance de Joaquin Phoenix. Mais ça reste très sage, très scolaire, malgré une construction narrative plutôt complexe.
France (3)
2/6 Jessica Forever de Caroline Poggi et Jonathan Vinel Premier film français d'un couple multi-primé pour ses courts, Jessica Forever, hélas, est un court métrage étiré, sans vrai fil conducteur malgré une idée de départ intéressante (une armée d'orphelins guidée par une femme qui les recueille) et une esthétique très travaillée. Malgré quelques fulgurances (l'histoire d'amour), on s'ennuie ferme.
4/6 Le sel des larmes de Philippe Garrel Un garçon rencontre trois filles, les charme et la morale finit par se retourner contre lui. Du Philippe Garrel pur jus, avec un beau travail sur le noir et blanc, des instants fragiles, des scènes ratées (la méthode en une seule prise sans doute), mais il suffit d'une séquence sublime (la danse) pour que les maladresses soient oubliées Plutôt conquis donc... (par contre les filles sont nues et le garçon garde son caleçon, hum).
4/6 Effacer l’historique de Benoit Delépine et Gustave Kervern Une comédie très drôle mais bien sûr un peu inégale sur la folie consumériste de notre époque ultra-connectée (le début est mieux que le milieu qui est mieux que la fin) avec ce fameux rire malaisant propre au duo. Les acteurs sont parfaits de bout en bout et l'évocation des gilets jaunes m'a marqué.
Europe (8)
4/6 Malmkrog de Cristi Puiu (Roumanie) Commençons par ordre de visionnage mon tour au Festival de Berlin. Et donc ce film roumain de 3h20, pièce d'orfèvrerie de mise en scène, avec des (très très) longs plan-séquences dialoguées, un travail sur le cadre, les entrées et les sorties dans le plan. J'ai été plus sensible à l'exercice de style qu'au texte - la philosophie à l'écran cela m'épuise souvent. Mais c'est du très haut niveau, assurément.
2/6 Hidden Away de Giorgio Diritti Un biopic sur un peintre sculpteur italien malade mental de son état. Pendant une heure pourquoi pas, mais le film répète ses motifs narratifs et cela finit par lasser tellement rien n'est subtil. Point de détail, je trouve les toiles du peintre horribles, ce qui n'aide pas.
5/6 Ondine de Christian Petzold Coup de foudre pour ce conte romantique moderne qui lie l'histoire de Berlin au mythe d'Ondine. Acteurs incandescents, mise en scène d'une classe folle, cela manque juste un tout petit peu de scénario sur la fin (disons qu'il faut parfois pas trop réfléchir à l'enchainement des choses).
4/6 Vingt mille jours sur Terre de Iain Forsyth et Jane Pollard (Angleterre) Nick Cave est le grand chanteur de mes années Dark, découvert en concert à l'âge de 19 ans et qui m'a longtemps hanté nuit et nuit. Cela reste - avec Bowie et parfois Depeche Mode - le seul vestige musical de mes années étudiantes, même si j'écoute surtout les BO écrites avec Warren Ellis. J'étais donc en terrain conquis et pourtant je suis longtemps resté à quai - je n'aime pas trop le côté fausse discussion avec un psy de la première partie. Mais ça finit par prendre chair et le concert final m'a donné des frissons.
5/6 Montag d’Ulrich Kohler (Allemagne) Que c'est bon de découvrir une filmographie à l'envers... Je n'avais jamais vu de film d'Ulrich Kohler avant In My Room, l'un de mes films préférés de 2019. Et voilà que je découvre Montag, pas moins beau, qui me hante depuis sa découverte. J'aime comment le récit bascule d'un personnage à l'autre, d'une ambiance à l'autre, comment le film questionne le quotidien d'un couple, ne cherche jamais à montrer les muscles (alors que la mise en scène est très élaborée). Un petit bijou qui confirme qu'il faut que je rattrape tous ses films (je découvre aussi qu'il est monsieur Maren Ade à la ville).
3/6 Les premiers, les derniers de Bouli Lanners (Belgique) Mon film du dimanche soir. Western surréaliste qui prend son temps à se déployer mais dont l'originalité finit par séduire. Surpris aussi par l'impeccable casting (avec un guest inattendu), c'est là encore sur Netflix et ça vaut le coup d'oe
3/6 Mr Holmes de Bill Condon (Angleterre) Un film bouillotte agréable à suivre, qui vaut principalement pour l'interprétation de Ian McKellen. Tout est bien propre, la zik de Carter est toujours aussi élégante mais ça manque de nerf, d'aspérité... C'est sur Netflix pour les curieux.
5/6 La Beauté des choses de Bo Widerberg (Suède) Je n'avais jamais vu de film de Bo Widerberg, dont je connaissais juste le nom et la réputation. J'avais l'impression lointaine que c'était un "Ken Loach suédois", peut-être que ce film-ci est un leurre, chronique adolescente érotique et incandescente, avec de la grande musique (le sublime Lascia ch'io pianga repris dans Antichrist). J'ai beaucoup aimé, le mélange de rage et de candeur, l'ambivalence des personnages, le simplicité de la mise en scène. Malavida Films le ressort au cinéma, si vous avez l'occasion.
Amérique du Sud 3/6 Todos los Muertos de Caetano Gotardo et Marco Dutra Un ambitieux film brésilien sur la question de la race, de l'esclavage, de l'Histoire. Cela met beaucoup de temps à se déployer, c'est sans doute trop explicatif mais le propos est vraiment fort - et la fin marquante.
Asie (5) 4/6 The Hunter de Rafi Pitts (Iran) J'avais bien aimé Soy Nero, du même cinéaste, plus ample sur le plan thématique. Là c'est de l'exercice de style, brillant et nihiliste, un thriller embrumé sur la (sombre) nature humaine, peut-être un peu trop sec sur le plan émotionnel.
4/6 An Elephant sitting still de Hu Bo (Chine) Une fresque de 3h44 réalisée par un jeune cinéaste chinois qui s'est suicidé après le tournage. Il faut dire que c'est une odyssée du désespoir qu'il déploie ici, très (trop) inspirée du cinéma de Béla Tarr (boucles narratives, travail sur le flou et même la musique). C'est un peu long (je suis moins fan du personnage de la jeune fille), un peu répétitif, parfois confus mais incontestablement d'une ambition folle.
3/6 Invasion de Kiyoshi Kurosawa (Japon) J'aime beaucoup le cinéma de Kiyoshi Kurosawa mais il faut reconnaitre que sa filmographie comporte des hauts et des bas. Ici, la mise en scène est brillante, j'aime bien quelques idées fortes mais l'intrigue avance lentement, fait du surplace... j'ai eu du mal à le finir, pour être franc (à l'origine le film était une mini-série, on ressent les coupes).
4/6 Inland Sea de Kazuhiro Soda (Japon) Beau documentaire sur la vie simple d'une vieille communauté de pécheurs de Mer Intérieur de Seto. On a l'impression d'un monde qui disparait progressivement mais à l'humanité toujours intacte. Les écoles primaires ont laissé la place aux auberges puis finalement à un hôpital et c'est tout une village qui disparait non pas englouti sous la mer mais oublié de tous. Beau film, vraiment, à découvrir sur UniversCiné.
Ours d'or : Ondine de Christian Petzold Grand prix du jury : Montag d’Ulrich Kohler Ours d'argent du meilleur réalisateur : Hu Bo (An Elephant Sitting Still) Ours d'argent du meilleur acteur : John Magaro (First Cow) Ours d'argent de la meilleure actrice : Marika Lagercrantz (La Beauté des choses) Ours d'argent du meilleur scénario : Effacer l'historique Ours d'argent de la meilleure contribution artistique : la photographie de Christopher Blauvelt (90's) et la composition des cadres de Malmkrog de Cristi Puiu (Roumanie)
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