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MessagePosté: 13 Nov 2024, 17:51 
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Joan n'est plus amoureuse de Victor et souffre de se sentir malhonnête avec lui. Alice, sa meilleure amie, la rassure : elle-même n’éprouve aucune passion pour Eric et pourtant leur couple se porte à merveille ! Elle ignore qu’il a une liaison avec Rebecca, leur amie commune... Quand Joan décide finalement de quitter Victor et que celui-ci disparaît, la vie des trois amies et leurs histoires s’en trouvent bouleversées.

Toujours un certain plaisir de regarder un Mouret avec cet entrelacs de situations amoureuses épineuses, qui se répondent l'une l'autre voire s'emmêlent. Il y a ici une dimension tragique et une gravité qui ont visiblement touché la critique au point qu'elle en fait l'un des meilleurs films de l'année. Je suis un peu mitigé sur l'utilisation somme toute très classique
du procédé du fantôme, tant visuellement que conceptuellement.


La grande qualité de ce réalisateur, c'est de faire vivre pleinement l'humanité des personnages à travers leurs stratégies, déceptions et errances sentimentales, et il y a ici des moments savoureux où Mouret déjoue les codes et les fausses pistes qu'il aura semées. L'amour se manifeste souvent où on ne l'attend pas.

Là où en revanche je suis toujours un peu perplexe, c'est dans cette possibilité toujours renouvelée de rencontres. La protagoniste est déçue par tel ou tel "prospect"? Pas grave, elle a une soirée avec moults prétendants de son milieu social quelques jours plus tard.


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MessagePosté: 17 Nov 2024, 12:28 
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Inscription: 30 Déc 2015, 16:00
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J'avais pour ainsi dire fait le deuil du cinéma de Mouret, son dernier qui m'avait pleinement convaincu remonte tout de même à 2009, les deux derniers encensés par la critique m'étaient assez largement passés au-dessus de la tête, j'étais donc parfaitement préparé à une nouvelle déconvenue... qui n'est cette fois-ci pas survenue. En l'espèce, je ne sais pas si cela tient aux qualités intrinsèques de Trois amies, ou à mon propre regard sur ses films. Possible que j'ai enfin accepté ne plus pouvoir retrouver la fraîcheur de ses premiers films, que le ton soit dorénavant plus grave, que Mouret se soit embourgeoisé. Jusqu'à Fais-moi plaisir ! ce qui caractérisait ses personnages s'étaient leur peur de l'engagement, ce que le couple peut signifier en terme de perte de liberté, de s’ôter la possibilité de trouver encore mieux. De fait ce qui les anime maintenant va au-delà de cela, ils ont un regard plus mature sur ce qu'est la vie de couple, et Mouret de sonder alors ce que l'Amour signifie pour tout un chacun.

De cela il tire un scénario ciselé mais aussi extrêmement théorique, construit comme un origami que l'on déplie pour mettre à jour toutes les facettes du couple. Ce que j'y ai trouvé de particulièrement beau dans son écriture, c'est la justesse des sentiments exprimés dans chacune des situations, ainsi que leur singularité. Au fond ce que nous dit Mouret c'est que l'amour c'est essentiellement une question de timing, la rencontre de deux individualités qui nécessitent chacune d'être dans les meilleures dispositions pour que l'alchimie fonctionne. Le plus souvent ça ne prend pas, et ce pour de multiples raisons. Pire cette alchimie peut s'étioler avec le temps chez l'un des deux partenaires, sans qu'il réussisse à pouvoir identifier une cause véritable.

Ressorte de l'ensemble deux magnifiques personnages. Celui d'India Hair d'un côté, impeccable sur toute la longueur, qui porte sur la quasi totalité du film l'amour comme un fardeau (la douleur de ne plus aimer celui avec lequel elle vit, son impossibilité par la suite pour se rendre disponible à de nouvelles rencontres), et lorsqu'elle pense enfin avoir fait le deuil et trouver une nouvelle personne pour laquelle elle ressentirait des sentiments, c'est pour se voir entendre dire que ses sentiments ne sont pas partagés. J'avoue que la cruauté (mais aussi sa profonde véracité) de cet instant m'a profondément serré la gorge... Et celui de Sara Forestier de l'autre, parfaite en professeur d'art plastique délurée (avec ses décolletés toujours plus plongeant) en quête de sa moitié, qui enchaîne les déconvenues avec dignité (la scène de sa séparation avec Ludig est pareillement émouvante). Dans l'ensemble, un kaléidoscope de que sont les rencontres amoureuses et la vie de couple, dont il est difficile devant cette exhaustivité qu'elle ne décrive pas chez chacun des spectateurs un moment ou une situation qu'il aura lui-même vécu.

Pour autant, je sens une petite réticence pour que le film m'emporte pleinement. Peut-être cette musique un peu pompière, quand bien même sur la longueur elle finit parfois par toucher juste. Peut-être la photo un peu plate. Certainement pas la délicatesse de la mise en scène en tout cas, jamais extravagante mais très élégante, qui use avec intelligence du travelling comme d'un fil narratif que Mouret déroule à l'infini.


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MessagePosté: 17 Déc 2024, 00:02 
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Inscription: 17 Juin 2021, 13:07
Messages: 1491
mouret et moi c’est marrant, parce que je n’aime pas du tout ses premiers, vraiment cette fantaisie décalée cnc là je trouve ça absolument horrible et épouvantable. puis, des choses qu’on dit… coup de coeur absolu et total. et il devient d’un coup un de mes cinéastes contemporains préféré. improbable.

du coup c’était une de mes plus grosses attentes. l’absence de selection cannoise m’a un peu inquiété, puis cet accueil que j’ai perçu comme poli mais indifférent, et au final ça finira dans les 300k, exactement comme les deux précédents.

et j’ai retrouvé cet univers qui me plait tant. à commencer par ce niveau de langage, cette langue soutenue, la plus belle de tous les dialogues français, ces phrases me ravissent, ce vocabulaire me caresse, c’est si beau, si élégant, drôle parfois, décalé car personne ne parle comme ça mais dans ses films tout le monde parle comme ça, avec le miracle que ce soit si naturel dans la bouche de tout le monde, et ça suffit à créer un monde. ce langage extraordinaire n’est pas que formel, ce sont des films sur des gens qui parlent beaucoup, qui ne font d’ailleurs que ça, pour analyser chaque évolution de leur âme et de leurs sentiments et savoir formuler ses sentiments et ses pensées c’est le remède à tous les maux et à la violence, et c’est donc essentiel à ce monde qu’il construit. parce que donc ce monde c’est un monde de gens intelligents, cultivés (il y a des livres partout, etc), qui se parlent, présentent des excuses pour des emportements mineurs et parfaitement légitimes, qui se respectent et tentent de se comprendre, même lorsqu’ils sont en proie aux affres des sentiments qui font que l’on peut trahir, décevoir, blesser. tout cela s’accompagne de cet espace public « apaisé », calme, où tout est beau, tranquille - je suis d’ailleurs surpris qu’il ait filmé, à deux reprises en plus, graffités. et dans ce monde où personne n’est pressé, où les enjeux de travail et de carrière sont tout à fait secondaires, ces ‘first world problems’ célèbrés, le luxe de vivre dans un pays riche, où l’on peut se payer le luxe de se consacrer à ses états d’âmes, qui ne sont pas grand chose d’autre mais qui contiennent les vérités sur soi et sur les êtres, un peu. il y a un aspect caricaturalement français dans tous ces marivaudages intellectuels et bavards, ce que j’adore en soi, mais j’ai l’impression qu’il ne le fait pas en ‘référence’, il en est simplement l’héritier. et donc, de tous les movie-verses, je crois que celui d’emmanuel mouret est un de ceux que je préfère, peut-être celui dans lequel je voudrais vivre, en vrai. vraiment le stade ultime de la civilisation, une celebration de l’intelligence, de l’élégance, de la culture, de la liberté, des sentiments humains dans toutes les richesses et dans toutes leurs complexités - les gens (se) font des sales trucs dans ses films, mais la vie c’est ça aussi. c’est une joie et un bonheur que de passer deux heures là-dedans.


et ce film-là, précisément.
c’était déjà très vrai, mais on est vraiment dans la lignée de woody allen. toute la storyline de camille cottin (que je ne peux plus voir, elle fait tellement comédienne parisienne friquée flottant dans la stratosphère je ne vois plus rien d’autre) fait vraiment « idée sur un post-it » comme des trucs de woody, une petite storyline marrante de 30 minutes.
le coeur du film, c’est bien sûr l’histoire d’india hair (qui est formidable, ne ressemble à rien d’autre sur le marché des actrices, est tellement un vrai être humain, et ici tellement douce sensible et émouvante). c’est bouleversant du début à la fin, chaque évolution de l’histoire déchire le coeur, sans en faire des caisses, comme dans les rêves de woody à travers juste les aventures sentimentales d’une personne ça dit mille choses sur les gens, sur l’amour, sur la vie, c’est hyper joli et réussi. j’ai aussi aimé sara forestier, sa place dans le film qui correspond à sa place dans le cinéma français - un peu la cinquième roue du carrosse, ou au moins la troisième du trio, quoi. j’ai trouvé sa prise de poids émouvante, j’ai aussi vu dans les difficultés de son personnage un reflet de ses difficultés personnelles, j’ai trouvé assez drôle - sans savoir si c’était volontaire ou non - ses tenues régulièrement immondes, et là dedans son sourire, son énergie, sa sympathie, son optimiste et sa force d’avancer. sa storyline est forcément très mineure, mais ça tenait pour elle, je l’ai trouvée vraiment sympathique et émouvante.

c’était un petit film, pas à la hauteur des précédents, mais avec plein de petites choses formidables partout, tout le temps, parfois un simple plan qui paye pas de mine mais qui est splendide et émouvant, parfois une petite idée géniale, parfois un personnage qui dit « cependant » et alors que je trouve l’acteur vilain j’ai juste envie de crier fuck me now tellement je trouve ça génial. je trouve marrant que tout ça se développe alors qu’il est déjà bien avancé dans sa carrière, je ne sais pas si ce sera juste une phase et qu’il évoluera comme il l’a déjà fait, si c’est désormais son style qui nous accompagnera pendant 30 ans, je ne sais pas combien de films comme ça il en a lui, mais c’est vraiment une rencontre rare et précieuse et folle et c’est magique quand on commence à vieillir un peu de trouver un univers artistique dans lequel se sentir si profondément bien et heureux.


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