Forum de FilmDeCulte

Kate et Geoff Mercer sont sur le point d’organiser une grande fête pour leur 45e anniversaire de mariage. Pendant ces préparatifs, Geoff reçoit une nouvelle : le corps de Katya, son premier grand amour, disparu 50 ans auparavant dans les glaces des Alpes, vient d’être retrouvé. Cette nouvelle va alors bouleverser le couple et modifier doucement le regard que Kate porte sur son mari…

Un drame délicat traité comme un thriller psychologique et qui se révèle par de minuscules touches ça et là. C'est sa plus grande réussite en même temps que son plus grand défaut. On aimerait quand même que le drame éclate, que l'abcès soit percé et que les sentiments sortent aussi violents soient-ils mais Haigh nous le refuse et préfère travailler une matière secrète et indicible. A l'image du personnage de Charlotte Rampling qui refuse d'aborder le coeur du problème après avoir senti qu'une fissure, la même qui a emporté Katya, vient déchirer son confort petit-bourgeois et ses certitudes. Et c'est probalement le plus réussi dans le film, le portrait de cette femme qui, soudain, est perdue, n'a plus aucun repère. Qui voit les fondements de sa vie, de 45 ans de sa vie, s'effriter doucement. Cette manière qu'à Charlotte Rampling d'être à la fois présente et totalement absente d'elle-même est magistrale, une grande performance psychologique si l'on peut dire où on la voit peu à peu s'effacer derrière un semblant d'apparence.

Le film réussit justement très bien cette narration de gestes, de regards, de silence. Comme cette scène centrale, sans doute la meilleure du film, terrifiante par le silence qui l'entoure et par ce que les images recèlent, Il y a là quelque chose de profondément terrifiant dans ce vacillement, dans ce secret qui remet tout en cause.

Finalement rien n'explose, tout reste en sourdine, dans une montagne de non-dits qui condamne les personnages à l'amertume et aux regrets. Comme cette dernière scène d'une folle cruauté où

J'étais assez mitigé en sortant de la salle mais plusieurs jours après, le film vieillit très bien. Il a quelque chose d'assez glaçant dans le portrait de cette femme qui perd pied mais qui refuse de le montrer, quelque chose de presque horrifique là-dedans, comme une impression poisseuse et mortifère.

4/6

_________________
CroqAnimement votre

Oh, un film avec Charlotte Rampling.

_________________
"Je vois ce que tu veux dire, mais..."
"Je me suis mal exprimé, pardon."

J'ai trouvé ça absolument remarquable.
La quintessence du less is more, c'est fou comme énormément de choses passent avec pas grand chose... D'un pitch tout con, on reçoit une radioscopie terrifiante et glaçante sur le couple, la fissure qui telle une crevasse va aspirer le doute pour ne jamais le libérer.. (cfr l'avis d'Art Core)
Cela grâce à un script exemplaire, aux petits oignons, et, surtout, deux comédiens d'exception, deux stradivarius, Rampling est franchement incroyable, elle mérite 1000 fois ce putain d'Oscar qu'elle n'aura pas, mais Tom Courtenay est génial lui aussi.

Bref, petit film en apparence, grand film en vérité, très subtilement mais profondément bouleversant.

5/6

_________________
Ed Wood:"What do you know? Haven't you heard of suspension of disbelief?"

Il est intéressant de voir Haigh effectuer, si ce n'est un virage, un "saut" de la sorte, passant de la relation naissante à la relation vétéran, délaissant la jeunesse pour le troisième âge, et montrant que son cinéma ne se cantonne pas à relater l'expérience homosexuelle explorée dans ses deux premiers longs. J'ai retrouvé la même sensibilité dans la peinture de ce couple installé, loin du tumulte (le cinéaste s'éloigne cette fois du décor urbain comme pour illustrer cette réalité), les échelles de plans sachant conjuguer distance et intimité, la durée et l'immobilité des plans exploitant la pesanteur des non-dits, et j'apprécie que le film ne perde pas de temps à planter le ver dans le fruit, avec cette histoire de corps retrouvé.

Mais je mentirais si je disais que je trouvais convaincant ou satisfaisant ce que le film en fait. Il est évident que je me suis échafaudé des potentielles révélations de véritable thriller ("va-t-on apprendre que c'est elle qui l'a tué?" puis "va-t-on apprendre que c'est lui qui l'a tué?") avant de comprendre que le film n'était pas dans cette optique (et ce n'est évidemment pas un souci), préférant montrer la façon dont ce passé subitement ressurgi va amener une femme à se décomposer.

Et le problème, c'est que je n'y crois pas.
Je reconnais l'originalité de montrer que ce type d'insécurité peut miner même une personne en couple depuis 45 ans, mais très sincèrement, on parle d'une ex morte il y a UN DEMI-SIÈCLE et d'un couple solidement resté ensemble depuis autant de temps alors voir cette rombière prise de jalousie puérile mal digérer que son mari puisse être secoué par la nouvelle n'éveille aucunement mon empathie.

Cela n'empêche pas des scènes fortes, déjà évoquées ici (le diaporama, même si j'ai du mal à croire que le mari n'ait pas évoqué la grossesse de son ex, et le dernier plan) mais j'achète pas vraiment le postulat de base donc ça n'a pas la résonance voulue chez moi.

Déso mes deux Ar(tCore et notte).

_________________

Ah, dommage...

_________________
Ed Wood:"What do you know? Haven't you heard of suspension of disbelief?"