Forum de FilmDeCulte

Les vacances d'été sont enfin arrivées et, comme chaque année, Trish et Darry, deux étudiants, frère et soeur, prennent la route pour rendre visite à leurs parents. Sur le chemin, un routier agressif emboutit l'arrière de leur voiture sans raison apparente.

Quelques kilomètres plus loin, Trish et Darry revoient le même camion, à côté d'une église abandonnée. Ils aperçoivent le conducteur, entièrement vêtu de loques, qui jette un corps dans une canalisation. Malgré les protestations de Trish, Darry veut en avoir le coeur net. Dès que la voie est libre, il va voir et s'engage dans le conduit. Il va y faire une découverte terrifiante.

Je n'avais pas revu le film depuis sa sortie, époque à laquelle je l'avais trouvé moyen, et je n'en gardais en réalité pas de souvenirs spécifiques à l'exception des 10 premières minutes et de la fin. En le redécouvrant hier, j'ai compris assez vite ce qui m'avait gêné la première fois et ce n'est pas négligeable : les personnages prennent à chaque tournant la décision la plus DÉBILE qui soit, à commencer par la première (dans quel monde, après qu'un camion chelou a essayé de t'emboutir et que t'as vu son chauffeur jeter deux corps enveloppés dans des draps tâchés de sang, tu vas vérifier si les gens sont vivants au lieu d'aller chercher les flics?). Les suivants sont un poil plus faciles à avaler mais restent bébêtes (globalement, ils traînent beaucoup, réagissent très tardivement à chaque fois).

Malgré cela, le film fonctionne plutôt. Le tandem de personnages frère/soeur change quelque peu, leurs jeux du début confèrent de l'authenticité à leur relation, et Justin Long est toujours attachant donc on les suit en dépit de leur bêtise.
Mais surtout, c'est la structure qui m'a quelque peu surpris. Le côté épisodique peut paraître maladroit (la route, l'antre, le diner, la route again, la maison de la vieille aux chats, le commissariat) mais le rythme auquel les informations sur le Creeper sont révélées m'a étonné (l'antre, c'est un truc de troisième acte en principe) même s'il y a de l'exposition tardive en info dump avec ce personnage relativement inutile de la médium qui en plus fait un peu double mumbo jumbo (deux éléments fantastiques déconnectés l'un de l'autre, la bête noire de QGJ), même si j'aime bien le caractère inéluctable de sa vision.

D'ailleurs, si le film ne me fait pas flipper, il y a une atmosphère pas inintéressante dans l'imagerie et le décor post-Massacre à la tronçonneuse, entre cette Amérique faite de routes désertes et la "chapelle" du tueur donc.
Et c'est là l'autre grande réussite du film, c'est sans doute le dernier très bon boogeyman imaginé par le cinéma d'horreur, avec un vrai lore et un design pluriel plutôt cool.
Et ça, sans même y rajouter le sous-texte tendu qu'apporte le triste passif de l'auteur/réalisateur (condamné en 1989 pour avoir abusé sexuellement d'un acteur d'un de ses premiers films, âgé de 12 ans, l'avoir filmé en train de le sucer, et possession de pédopornographie), faisant du Creeper un mec qui s'obsède pour un ado dont il a reniflé le slip (et qui roule une pelle à la tête décapitée d'un flic). Le cas Salva est d'ailleurs intéressant dans le débat sur le droit d'exercer des artistes condamnés (il n'a été condamné qu'à 3 ans et n'a fait que 15 mois alors que sa victime a déclaré avoir été groomé dès ses 6 ans et molesté depuis l'âge de 7 ans par Salva) et sur la séparation entre l'homme et l'artiste (vu comme ça infuse dans ses oeuvres).

Bref, curieux de revoir le 2 (que j'avais trouvé plus sympa) et de découvrir le 3 (apparemment mauvais).
Par contre, je ne materai pas le reboot par un autre gars (qui a un splendide et rare 0% sur RottenTomatoes).

_________________

mdrrrrr

In the 2017 cast commentary Justin Long discussed a stunt that went wrong. To save money Justin was in the car rather than a stuntman, with a stunt woman playing Trish who was supposed to hit the Creeper with the car. However the speedometer was broken and she ended up going too fast and the Creeper stuntman was badly hurt in the collision and Justin was showered with broken glass. Victor Salva considered quitting filmmaking altogether after this accident but was reassured when he visited the stuntman in the hospital.

_________________

ce qui est marrant c'est que je me souviens de l'histoire à l'époque, ce n'est pas le truc sous-terrain qu'on a découvert des années après grace à un courageux travail d'investigation de la gen z sur wikipedia.
c'est juste que ça ne gênait pas plus que ça- dur de déterminer si c'était à cause d'une tolérance accrue vis à vis de la pédophilie (dur à croire, on était en plein post dutroux etc) ou une plus grande foi dans la légitimité de la réinsertion, ou juste la filmosphère qui flottait complètement. mais si quelqu'un fait un mémoire sur ce genre de sujet ce serait intéressant d'aller retrouver toute la presse de l'époque pour voir comment c'était abordé.

Je m'en souviens, c'était abordé comme un truc trouble qui renforçait justement le sous-texte du film, c'était presque une qualité malsaine.

Disons qu'à la différence de Polanski ou Singer, il a été jugé et condamné et il y a "longtemps" mais on peut toujours débattre de l'adéquation de le sentence prononcée, comme pour un Cantat.

_________________

Ah mais moi je n'ai aucun jugement moral. Je sépare clairement l'homme de l'artiste, ou plutôt l'homme du film, déjà car un film est une création collective.

Oui mais justement, dans ce cas précis, comme ça informe le film (tout comme Bohemian Rhapsody en dit davantage sur Bryan Singer que sur Freddie Mercury), la question peut être soulevée (et donc toutes celles, plus larges, qui en découlent également) : si un artiste exorcise au travers de son oeuvre, est-ce mieux ou est-ce malsain? Un peu comme pour l'affaire Vivès.

_________________

C'est intéressant - et d'ailleurs j'ai beaucoup aimé Tar pour cette aspect. Perso je ne cherche pas trop à connaitre la vie ou l'intention de l'artiste quand je vois un film, disons que ça ne précède jamais l'empathie ou l'émotion que le film provoque. Mais c'est vrai qu'avec les affaires #Metoo la frontière devient plus poreuse. Peut-on voir Tess sans penser à ce qu'a pu faire Polanski aux femmes ? Lire les BD de Vivès sans douter du second degré après ses déclas sous pseudo dans un forum ?

Oui voilà.


Peut-on revoir X2 et la scène où Magneto séduit le jeune Pyro sans penser aux jeunes de 18 ans drogués et violés par Singer?

_________________

Tu m'as donné envie de le revoir.

o/

_________________

et repulsion, hein... qui explore le psyché dévasté d'une femme victime d'abus sexuelle dans sa jeunesse... et 12 ans après il se dit tiens et si...?

Il aurait dû faire un remake, pour avoir la version "avant" et la version "après".

_________________

D'ailleurs Little Children de Todd Field mettait en scène un beau personnage de pédophile post-détention, (thème traité par The Woodsman avec Kevin Bacon, pas vu).

Après si Jeepers Creepers a été un succès, tout le monde s'en foutait un peu à l'époque j'imagine, à part les lecteurs de Mad Movies (109 000 entrées en France), et le genre prête moins le flanc aux grands questionnements artiste/oeuvre.
Après l'époque est clairement plus pudibonde : la question morale intéressante est éternelle, à savoir une société plus encline au pardon est-elle aussi une société plus laxiste (à tout point de vue), et vice versa.

Plus aucun souvenir de ce film surcôté hormis sa nullité et ses 10 dernières minutes sympathiques notamment grâce au look du monstre.
Le reste = poubelle.

_________________
Netflix les gars, Netflix.