Dommage d'avoir changé l'affiche (même si celle est bien).
La précédente était vraiment sublime:
France, début des années 60. Simon, catcheur, porte le masque blanc, sur le ring il est « Le Spectre ». Il propose à son ami Victor, de retour de la guerre, d’être son adversaire au masque noir : « L'Équarrisseur de Belleville ».
Mais pour Victor, encore fragile, le rôle paraît bientôt trop lourd à porter : pour une fois dans sa vie, il aimerait être dans la peau de celui qu'on applaudit. Simon suggère alors à son ami d'échanger les masques. Mais on ne trompe pas ce milieu là impunément…C'est vraiment dommage parce qu'on a là une proposition unique dans le paysage du cinéma français. A des années lumière de la Macaigne Mania, David Perrault propose un film respirant le cinéma par tous les pores. Pétri de références (dont beaucoup que je n'ai pas dû reconnaitre d'ailleurs) le film se présente comme un hommage en même temps qu'une réappropriation de plusieurs "écoles" de cinéma. D'un côté on a le cinéma parisien des années 50-60 (on imagine d'ailleurs parfaitement Gabin à la place de Nahon) avec des dialogues qui fleurent bon le Audiard de la grande époque. Pas nécessairement dans l'aphorisme ou le comique mais plus dans l'argot, dans les personnages décalés et excentriques etc... De l'autre côté on sent une influence évidente du cinéma américain classique avec ce Noir & Blanc chiadé, certains personnages iconiques (référence à Cagney, une scène qui évoque directement
Le Baiser du Tueur etc..). Et puis au milieu de tout ça quelque chose d'un peu plus indéfini, comme une tentation de série B (tout l'aspect catch masqué), de film de genre plus contemporain (maniérisme de la mise en scène).
Mais le tout ne fonctionne pas pour la simple et bonne raison que le film ne nous raconte rien. On ne comprend jamais quel est le sujet. Il y a une vague histoire de transfert de personnalité (avec moults scènes oniriques un peu lourdes) qui se retrouve presque totalement évacué dans une deuxième partie plus classique (mais du coup beaucoup plus efficace) de thriller mafieux. Et on se retrouve avec un film fonctionnant uniquement par blocs, par scène, qui peine à créer une véritable mythologie, à construire un univers crédible et cohérent. D'où un rythme totalement bancal, des scène de dialogues qui s'eternisent, des dérives narratives qu'on a du mal à comprendre, des scènes de rêves répétitives et lassantes... Mais au milieu de tout ça il y a parfois des moments surprenants qui sortent soudain du lot.
On peut regretter aussi le sort du catch dans le film, relégué à l'arrière plan. Les combats sont filmés sans invention, sans rythme et on aurait aimé pénétrer ce monde là plus avant. Parce que là ça reste au final comme un prétexte pour un récit aux contours flous et à l'intérêt plus que limité (l'impression que ce genre d'histoire de trouble de la personnalité est très limité et ne produit jamais grand chose de concluant). Les acteurs sont bons, j'ai été d'ailleurs très étonné par Jean-Pierre Martins (que j'avais trouvé nul dans le film de Dahan mais qui là est excellent). Denis Ménochet écope d'un personnage étrange, très effacé, un peu énervant dans sa naïveté (notamment à travers une scène à mon sens très ratée autour d'un poulet).
Il y a vraiment une belle promesse de cinéma là dedans (splendide photo, très belle musique), on sent un cinéaste qui s'est fait monstrueusement plaisir sur chaque plan mais on a vraiment du mal à comprendre de quoi il retourne, à s'impliquer dans ce cinéma finalement trop conceptuel pour totalement emporter le morceau. Mais je suis très curieux de voir la suite de sa carrière.
2/6