Forum de FilmDeCulte

Le forum cinéma le plus méchant du net...
Nous sommes le 24 Nov 2024, 04:16

Heures au format UTC + 1 heure




Poster un nouveau sujet Répondre au sujet  [ 4 messages ] 
Auteur Message
MessagePosté: 28 Avr 2011, 01:11 
Hors ligne
Teacher

Inscription: 13 Mai 2010, 11:50
Messages: 11667
Image

La femme d'un pilote d'avion rejoint son amant, un comédien de théâtre, durant les absences de son mari. Entre les deux, elle ne sait lequel choisir.


Dans la lignée de Vivre sa vie, ce film de la période 60' de Godard me semble des coudées au dessus des œuvres plus emblématiques qui l'entourent : plus direct, plus épuré, plus mystérieusement beau, plus touchant... Une femme mariée est cependant très inégal, naviguant entre le sublime et le tâtonnant, souffrant pas mal d'être atomisé en mille morceaux...

Ce qui constitue la matrice du film, cette succession de vues qui s'ouvrent et se ferment en fondus au noir comme autant de respirations, dans le cocon d'une litanie de chuchotements, est absolument magnifique. Reprenant le concept de l'ouverture du Mépris, la dépoussiérant de sa morgue et de son aspect mécanique, Godard tisse une dentelle sans fin de contacts, d'évitements, de touchers, de corps qui se cherchent et dialoguent. C'est d'une douceur incroyable, d'une grande pudeur aussi paradoxalement, et toutes les scènes moins conceptuelles qui découlent de cette approche (je pense notamment à tout ce qui concerne les rapports avec le mari, personnage sublime - la caresse discrète dans les cheveux à l'aéroport, ça m'a achevé) sont du même niveau.

De l'autre côté, on a du vide à remplir, et donc des tentatives tous azimuts que rien ne lie entre elles, qui viennent régulièrement briser l'état de grâce que le film parvient à installer. Les longues interviews, pas une mauvaise idée en soi mais tellement néfastes au mouvement d'ensemble, m'ont par exemple passablement irrité (certaines, comme celle du médecin, c'est juste insupportables). Godard peut se montrer très feignasse aussi : quand il a l'idée de filmer la piscine en négatif, conférant à la scène une réelle étrangeté somnambule (avec toujours ce chuchotement entêtant), il ne fait rien pour l'introduire dans le film autrement que par le pur théorique de son photographe et du publicitaire, il ne fait rien pour rattacher stylistiquement cette idée à une dynamique d'ensemble qui lui donnerait du coffre - ça arrive et ça repart n'importe comment, à deux doigts de l'expérimentation hasardeuse d'étudiant, ça a juste pas de gueule, et surtout peu de portée. C'est en fait d'ailleurs souvent la bouée de sauvetage du film, cette façon malsaine de s'envahir d'images et de mots liées à la publicité, de marquer par cette invasion tous les corps d'un doute, et ainsi de donner au film un semblant de cohésion (ça reste quand même bien brinqueballant, je trouve).

Voilà, des choses superbes, d'autres irritantes, un film qui comme souvent chez Godard aurait gagné à moins se disperser. La simplicité lui sied bien, je trouve dommage qu'il ne s'y abandonne pas plus souvent...


Haut
 Profil  
 
MessagePosté: 23 Sep 2022, 09:45 
Hors ligne
Expert
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 24 Nov 2007, 21:02
Messages: 28410
Localisation: In the Oniric Quest of the Unknown Kadath
Rattrapage de ce film sur Arte et donc c'est du pur Godard. Ca synthétise parfaitement ce que j'aime et ce que j'aime beaucoup moins chez lui. Ce que j'aime c'est la liberté absolue du film, en 1964 c'est clair que c'est quelque chose de totalement neuf, on fait du cinéma avec trois fois rien, sans véritable scénario. Comme le dit Tom, ce qui est le plus réussi c'est l'observation de l'intime, celui du couple, celui de cette femme (magnifique Macha Méril, comment ne pas tomber amoureux de cette coupe au carré parfaite ?), ces moments qui semblent volés, chuchotés (mais par contre j'ai raté environ 25% des dialogues, le mix est horrible), ces rapports amoureux à la fois terriblement quotidiens mais également profondément romantiques (le pilote d'avion qui évoque un ailleurs d'aventures).

Mais à côté de ça, il y a Godard qui tente pleins de trucs, qui digresse dans tous les sens avec moments qui semblent hors sujet, totalement gratuits (cet affreux passage en négatif), déjà ces moments de collage de mots, d'images de textes (où l'on voit que sa dernière période était déjà en germes là en fait), ces longs moments d'interviews plus ou moins intéressants, une longue séquence sur des catalogues de sous vêtements... Tout le côté expérimental un peu chichiteux de Godard qui te donne envie de faire avance rapide.

Surtout que finalement une fois le film fini, tous ces moments un peu autre, ces errances esthétiques on les oublie aussi sec pour ne se souvenir que, comme le dit Tom, de la simplicité romantique d'instants en suspens. Macha Méril face au miroir qui se coupe la frange ça vaut pour moi dix fois plus que ces collages pénibles. Le film reste assez passionnant à voir et à replacer dans la carrière de Godard mais en temps qu'expérience de spectateur, c'est globalement moyen.

3/6

_________________
CroqAnimement votre


Haut
 Profil  
 
MessagePosté: 23 Sep 2022, 10:29 
Hors ligne
Expert

Inscription: 30 Sep 2016, 19:39
Messages: 5844
Les passages en négatif m'avait marqué. C'est le genre de petites expérimentations un peu gratuites que se permettaient Godard à l'époque, avec une verve certaine.


Haut
 Profil  
 
MessagePosté: 23 Sep 2022, 10:34 
Hors ligne
Robot in Disguise
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 13 Juil 2005, 09:00
Messages: 36701
Localisation: Paris
Moi ça m'a laissé un souvenir négatif.

_________________
Liam Engle: réalisateur et scénariste
Image


Haut
 Profil  
 
Afficher les messages postés depuis:  Trier par  
Poster un nouveau sujet Répondre au sujet  [ 4 messages ] 

Heures au format UTC + 1 heure


Articles en relation
 Sujets   Auteur   Réponses   Vus   Dernier message 
Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Bande à part (Jean-Luc Godard, 1964)

skip mccoy

7

1934

28 Mai 2009, 06:52

Baptiste Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. La Femme des sables (ou La Femme des dunes) (Hiroshi Teshigahara - 1964)

[ Aller à la pageAller à la page: 1, 2 ]

DPSR

21

2914

17 Juil 2022, 03:20

flatclem Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Ici et Ailleurs (Jean-Pierre Gorin, Jean-Luc Godard, Anne-Marie Miéville - 1976)

Zad

0

1546

02 Sep 2005, 13:27

Zad Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. [CM] Jean-Luc Godard

Zad

5

2733

28 Juil 2005, 23:16

Cosmo Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Une femme dans la tourmente (Mikio Naruse, 1964)

Cosmo

7

830

27 Mar 2021, 22:32

Film Freak Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Journal d'une femme de chambre (Luis Bunuel, 1964)

Mickey Willis

1

178

10 Mai 2024, 09:10

Baptiste Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Vivre sa vie (Jean-Luc Godard - 1962)

Tom

4

2137

27 Aoû 2023, 19:19

Qui-Gon Jinn Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Le Mépris (Jean-Luc Godard - 1963)

[ Aller à la pageAller à la page: 1, 2 ]

FingersCrossed

15

845

14 Sep 2023, 08:47

Film Freak Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Le Gai Savoir (Jean-Luc Godard - 1968)

Zad

0

1431

20 Aoû 2005, 14:10

Zad Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. For ever Mozart (Jean-Luc Godard, 1996)

Baptiste

2

1631

16 Juin 2011, 21:34

Tom Voir le dernier message

 


Qui est en ligne

Utilisateurs parcourant ce forum: Aucun utilisateur enregistré et 17 invités


Vous ne pouvez pas poster de nouveaux sujets
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets
Vous ne pouvez pas éditer vos messages
Vous ne pouvez pas supprimer vos messages

Rechercher:
Aller à:  
cron
Powered by phpBB® Forum Software © phpBB Group
Traduction par: phpBB-fr.com
phpBB SEO
Hébergement mutualisé : Avenue Du Web