Forum de FilmDeCulte

*Uniquement disponible en copie DVD pourrave*



Le fonctionnement, de A à Z, du plus prestigieux des grands magasins américains : le Nelman Marcus, un véritable empire. Les vendeurs face aux acheteurs, les opérations marketing, les préparatifs de noël, les entretiens d'embauche, les ateliers de fabrication, les cérémonies officielles...


Wiseman a beau ne pas exagérer, ne pas traquer la saloperie pour traquer la saloperie, il part avec un matériau tellement abject et détestable que dès les premières minutes, où l'on assiste à la gymnastique de mains (!) du personnel (sur un remix interdit de musiques classiques) pour mieux servir le client... qu'on ne pourra que haïr tout ce petit monde. Il n'ont aucune chance : de la direction au moindre petit employé, tout pue le désabusé et l'enthousiasme de façade. Tout le monde joue, tout le temps, continuellement. Les défiles de mode, par exemple, qu'on pense être un lien de manipulation de client, se retrouve dans diverses scènes du film, même dans les réunions internes ! Tout le monde fait son show. C'est effrayant.

Et c'est aussi assez vite un peu chiant, car on a rapidement l'impression que tout est joué, que rien ne viendra nous sortir de ce marasme qui n'en finit pas de puer de la gueule. Wiseman est pourtant hyper en forme. Il y a des idées de mise en scène, discrète mais puissantes, qui parcourent tout le film. Un exemple en tête : une discussion hyper mielleuse entre une cliente qui essaie des habits et la vendeuse qui rit avec elle, en la regardant et lui parlant dans le miroir - on assiste alors une conversation super zarb, les deux jouant la complicité intime alors que tout le long du plan elles se tournent le dos, comme si elles parlaient toutes seules ou au mur...



... Passage alien. Son point fort, c'est finalement de moins aller dénicher les scènes sidérantes (bien qu'il y en ait : la vendeuse qui vient aux tables des restaurants pour faire la pub de la robe qu'elle porte, achetable trois étages plus bas) que d'isoler des choses tout à fait normales, sans le contexte et le lien habituel qui y amène, pour faire ressortir dans toute sa crudité le rituel bizarroïde, le code de société, la théâtralité. Du petit orchestre qui joue dans un coin du magasin aux traversées passives en escalators, tout prend un tour résolument absurde, décalé.

Mais voilà, quand on sait que ce sera l'horreur d'un bout à l'autre (film dépressif, vraiment), l'impression finit par émerger qu'on ne fait que répéter ad nauseam le même dégoût, et qu'on avance pas (même si, j'insiste, Wiseman appuie rien au stabylo ; n'empêche, il comprend très bien l'incongruité de ce qu'il filme). En ressort un film qui, a posteriori, se pose comme une sorte de témoignage ultime de ce qu'aura été la laideur des années 80. Mais j'imagine qu'il y a plus passionnant et prenant dans sa filmo.