Tribune de Ishmael Reed publiée par Libération douze jours avant la mort de George Floyd :
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Deux semaines après l’attentat des tours jumelles, j’arrivais dans mon hôtel à Manhattan. Le réceptionniste semblait être dépassé par les événements et me disait qu’il voulait partir de New York. Accompagné par la journaliste Nancy Hicks Maynard, aujourd’hui décédée, et ma femme Carla Blank, je me suis rendu sur les ruines des gratte-ciel. On pouvait sentir l’odeur putride des corps en décomposition mélangée à la fine poussière blanche de ce qui avait été les tours jumelles. Le temps des guerres conventionnelles entre deux larges armées avec des milliards de dollars d’équipements était révolu, remplacé par des hommes armés de coupe-papier partageant leurs désirs de mort.
Maintenant, de nouvelles odeurs horribles émanent des rues de Manhattan depuis que les morgues de New York sont saturées. Les corps des défunts sont entassés dans des camions. A Brooklyn, les habitants se plaignent d’une odeur insoutenable. La source était un camion dans lequel les corps étaient entassés sans aucun système de réfrigération. Les citoyens et non-citoyens noirs et hispaniques paient les frais des dommages causés par le Covid-19. Ce sont eux qui font le travail ingrat, pendant que la classe moyenne blanche a le luxe de travailler à la maison. Quarante pour cent du personnel de première ligne sont noirs ou hispaniques. Ils travaillent dans les maisons de retraite, les abattoirs, dans ces lieux où beaucoup ont contracté le Covid-19. L’entassement de Noirs et d’Hispaniques dans les prisons est aussi une source terrifiante d’infection. Cette surpopulation a causé des émeutes.
Mais il y a maintes preuves qui prouvent que ceux qui sont au pouvoir se soucient peu de la diminution de la population noire et hispanique. C’est le cas du Président et de son conseiller, Stephen Miller, dont les ancêtres ont fui la Russie tsariste et le service militaire, et Steve Bannon, qui a dit ouvertement qu’il ne voulait pas que ses enfants aillent dans une école fréquentée par des Juifs. Cette attitude d’extermination banalisée explique la mort de milliers de personnes après l’ouragan qui a dévasté Porto Rico.
Le Président a dit qu’il ne serre pas de mains. Il est germophobe. Mais ses tweets révèlent que son cœur n’est pas sain. Il retweete des commentaires de sites de nationalistes blancs au grand plaisir de ces supporteurs qui s’affichent en public brandissant des croix gammées et des drapeaux confédérés sans comprendre que ces deux symboles représentent ce qui arrive quand les nationalistes blancs prennent leurs convictions de supériorité raciale sur le champ de bataille. Des millions de personnes meurent. Et ils perdent.
Les intellectuels, de droite et de gauche, qui ont accès aux médias se doivent de trouver des excuses à ceux qui ont voté pour Donald Trump. Selon une étude de Science Magazine, il s’agit d’une anxiété raciale, plus qu’économique, qui explique leurs votes.
Une fois de temps en temps, une personnalité politique laisse échapper les aspirations du nationalisme blanc. Ken Turnage, un représentant officiel d’une ville californienne, a dit que le Covid-19 devrait continuer son cours, tuant les personnes âgées et les sans-abri afin de «résoudre un problème qui représente un lourd fardeau sur notre société». Celles-ci ne sont pas des opinions farfelues et elles sont partagées par des membres de l’establishment américain, à en juger l’accueil très favorable du livre The Bell Curve («la Courbe en cloche») de Charles Murray, qui revendique que les Noirs sont intellectuellement inférieurs aux Blancs.
Certaines de nos revues d’opinions de renom telles que The New Republic, The New York Times Book Review, et The National Review ont soutenu ce livre. Ce dernier a été financé par le fonds Pioneer (Pioneer Fund), fondé par Wickliffe Preston Draper, qui avait un intérêt pour le mouvement eugénique qui s’est plus tard affirmé après sa visite en Allemagne nazie en 1935. D’ailleurs, un de ces amis proches fut pendu à Nuremberg. Cette puanteur des Etats-Unis ne provient pas uniquement des corps des défunts, mais aussi des esprits des leaders américains.
En proportions, il y a trois fois plus de morts du covid chez les Afro-américains qu'ailleurs. En France, la Seine Saint-Denis a connu une surmortalité exceptionnelle. Sans occulter le problème des violences policières, dans des contextes très différents comme le rappelle la tribune ci-dessus, le problème est beaucoup plus large à l'évidence que celui-ci. e déplore que l'activisme politique soit éventuellement dévoyé dans une espèce de culture du buzz, où des Geoffroy de Lagasnerie (pas de méprise, nulle essentialisation sur le nom ici) se chargent de donner un cadre réflexif.
La présentation de son ouvrage écrit avec Assa Traoré pose problème from the get-go à mon avis d'un point de vue rhétorique :
Citation:
La France a un problème avec la police et la gendarmerie : ça fait partie du Combat Adama. La jeunesse fait partie du Combat Adama. L’école fait partie du Combat Adama. Le racisme fait partie du Combat Adama. La démocratie et la justice font partie du Combat Adama. »
On est dans le slogan assené mais où les problèmes convergent vers le combat Adama, alors que le combat Adama n'est qu'une partie du faisceau).