Forum de FilmDeCulte

São Paulo, Sinfonia da Metrópole en VO.



Du lever au coucher du soleil, une célébration de São Paulo, du progrès, et de la cité moderne.


Y a-t-il eu dans l'Histoire du cinéma un truc plus stérile que les symphonies urbaines ? Énième clone de cette lignée maudite donc, pour un résultat toujours aussi vain, cette fois moins traversé par une volonté de virtuosité formelle que par un souci très net de propagande (un carton présentant un aspect de la ville = une image qui l'illustre), comme s'il était encore possible de réduire l'intérêt du genre... Peu de choses, en fait, se construisent ici par le montage. En passer par des cartons est d'ailleurs l'occasion de voir verbalisé très crûment l'inconscient fantasmatique qui anime la plupart de ces films (futur glorieux et industriel, euphorie du progrès mécanique : ne vous fiez pas à la relative humanité et spontanéité de cette photo, qui était juste la seule disponible sur le net).

S'il faut vraiment aller pêcher les bons points, on notera que dans son tiers central, le film fait un passage en revue des institutions qui donne à voir des images moins habituelles (le centre à venins, la prison), même si il y a alors autant de cinéma à l'écran que dans un dépliant touristique. On a aussi de temps en temps quelques bizarreries plus remarquables : une ode flippante à la charité des riches (une main géante avec sa pièce qui domine la ville tel Godzilla), un passage bucolique au parc nimbé de fondus indolents... Des miettes, donc, et à part un film occupé à sagement réciter les vertus du progrès, il n'y a rien à retenir.

Tu as des exemples de symphonie urbaine ? Seul Of Time and The City me vient à l'esprit et j'ai bcp aimé

Il y a déjà "Berlin Symphonie d'une Grande Ville" de Walther Ruttmann en 1927 (que la cinémathèque belge passe souvent)

https://www.youtube.com/watch?v=0NQgIvG-kBM

Je le rangerais pas dedans... Là il s'agit vraiment d'une série de films très semblables, bien circonscrits dans le temps (les années 20), où ce fut le modèle le plus facile à reproduire à travers le monde pour tout aspirant cinéaste d'avant-garde. En gros : un suivi de la ville sur une journée, qui essaie d'en décrire la dynamique et le mouvement, souvent par la seule science du montage sans commentaire. Tu retrouves toujours la même chose : les plans reposés à l'aube, la ville qui s'anime, des description des usines et machines dans la journée, les lumières qui partent dans tous les sens le soir quand la ville commence à faire la fête avec ses clubs...

Toute la troisième avant-garde documentaire consiste grosso-modo en ce genre de films (même si c'est pas toujours sur des villes). Le film de Ruttmann est effectivement le plus connu, avec L'homme à la caméra (qui a au moins pour lui une ambition autrement plus vaste). Mais en fait le "genre" existe déjà plus tôt, dès le début des années 20. Presque chaque capitale européenne a la sienne, et pas mal de ville hors-Europe aussi. Parfois t'as des films qui en reprennent les codes mais en font quelque chose de plus singulier, comme À propos de Nice de Vigo qui a une idée en tête qui transcende et dépasse l'exercice formel. Les films plus courts (La Pluie d'Ivens, Images d'Ostende de Strock...), plus focalisés sur un aspect en particulier et obligés de créer une structure propre, tirent un peu leur épingle du jeu aussi, même si je trouve ça tout aussi vain au bout du compte.

Dans celles que j'ai vu, j'en ai qu'une qui se détache vaguement, parce que plus douce et un brin mystérieuse, Aimless Walk (une symphonie urbaine tchèque). Celle-là est pas mal. Le reste m'a endormi, mais je suis loin d'avoir tout vu... (en même temps faut être motivé).

C'est contre ce genre de film que Kracauer a écrit "les Employés" d'ailleurs (il s'agissait de décrire les réalités sociologiques et culturelles qu'ils dissimulent, en étant à la fois "objectifs" et esthétisants).

Oui, ce sont des odes ou des utopies. Je ne sais pas à quel point la "Nouvelle objectivité" allemande contre-carrait ça, vu que parfois on y range même le film de Ruttmann...