Forum de FilmDeCulte

Un magnat de la musique, réputé pour avoir "les meilleures oreilles de la profession", est la cible d'une demande de rançon qui l’accule à un dilemme moral, entre vie et mort.

Par le passé, les remakes d’œuvres de Kurosawa ont pu s'avérer fructueux et j'étais curieux de voir une adaptation moderne et racebent d'Entre le ciel et l'enfer, surtout après un teaser énergisant, même si j'ai pas vu un bon film de Spike Lee depuis 20 ans.

A l'arrivée, malheureusement, le résultat peine à être ne serait-ce qu'à moitié convaincant.
Toute la première partie demeure finalement assez proche de l'original et, même sans comparer, le problème est que le récit ne mine jamais de manière forte le dilemme moral au cœur du postulat. Tant et si bien que tout paraît à la fois long, alors que c'est techniquement plus court et plus speed dans le découpage, avec d'étranges double takes, et faiblard, malgré le cabotinage communicatif de Washington (mais dont le personnage souffre parfois d'une écriture limite ridicule, comme quand il se met à parler aux photos d'illustres artistes dans son bureau) et la performance tout en rage rentrée de Jeffrey Wright à ses côtés.

Il faut attendre de basculer dans la seconde moitié, voire le dernier tiers, pour que non seulement l'ouvrage s'éloigne de son modèle mais surtout pour que le projet de Lee apparaisse plus clairement. Il existe évidemment toujours une dimension de classe sociale mais cette version ajoute en outre une réflexion sur l'âge et l'embourgeoisement, faisant du protagoniste un inévitable miroir de l'auteur, menacé d'avoir perdu le mojo, confronté à une jeunesse qui remet en question son statut déjà financièrement menacé. Le scénario parvient à incarner cette idée en projetant directement le héros dans la poursuite finale et en réinterprétant le face-à-face de part et d'autre d'une vitre sous une forme vivifiante...

...et d'un coup, tout est flingué par une répétition de la même scène, dénuée de l'inventivité de la précédente ou du constat terrible de son prédécesseur, et un épilogue feel-good à côté de la plaque. Pour un film dont le personnage principal se vante d'avoir "la meilleure oreille dans le business", cette conclusion est étrangement tone-deaf (au même titre que la BO semblablement hors sujet à dessein).

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Et le film de se boucler sur une volte-face réac et conservatrice de ce même personnage, qui préfère finalement au rappeur voyou "chien fou violent et ordurier" (parental advisory), la finesse de la chanteuse jazz/soul accompagnée au piano puis par le grand orchestre, amen... Si le personnage est un reflet de Spike Lee cela en dit long... A moins qu'il s'agisse d'ironie, mais j'en doute fortement.

Son père était jazzman (et pas vraiment dans un style moderniste) et dans le fond l'opposition est présente dès son premier film (le show d'anniversaire sirupeux, seul moment en couleur, dans lequel Jammie trouve la rivale de Nola).
En l'occurence le problème de son cinéma semble moins l'embourgeoisement (la capital il l'a déjà) que l'inverse, la compréhension du dehors.

C'est le cas de le dire, il y va mais on sent que c'est pas sans se boucher le nez avant...