Milan, 1919, Domenico Rochetti est un vétéran de la première guerre mondiale, qui n'a jamais retrouvé sa place dans la société. Combinard mais pas très futé, il évolue à la limite de la mendicité. Il tombe sur son ancien capitaine, Paolineli, cadre fanatique du parti fasciste émergeant, et lui-même clone physique du Duce. Celui-ci ne semble avoir une piètre idée de Domenico, mais sent qu'il fournit une bonne matière première pour le mouvement.
De son côté Domenico y trouve une certaine sécurité, une structure collective, ainsi qu'une visibilité voire uen activité sociale. La cellule comporte aussi un intellectuel/avocat grandiloquent, qui théorise la violence révolutionnaire à la Sorel malgré son allure de rond de cuir, un peu en chien de faïence avec le militaire.
Dans un premier temps, le parti fasciste est légaliste et s'en tient à organiser des meetings électoreux classiques, mais suite à un revers électoral et à la plus grande popularité des communistes (dont leur propre programme se démarque alors peu, si on en considère la lettre et pas l'esprit) , il devient de plus en plus violent, et cible de plus en plus directement les villages, villes et personnes engagées à gauche.
C'est ainsi que Domenico retombe sur un ancien camarade de régiment, Umberto Gavazza, à peu près dans la même situation que lui. après la guerre il est revenu vivre dans la famille de sa soeur, agriculteurs communistes, tout en en étant méprisé d'eux du fait sa situation de chômeur. Umberto soigne Domenico, blessé suite à un cpupd e main sur leur village, et expulsé, n'a plus d'autres choix que de suivre Domenico dans le parti.
Umberto semble simple, sinon naïf, mais réfléchit un peu plus que domenico et conserve une certaine conscience politique et se méfié plus du mouvement.
Leur première action d'éclat est de casser une grêve d'éboueurs à Milan, suite à laquelle ils seront emprisonnés. Ils envisagent alors de quitter le parti.


Alors on est en apparence dans le film canonique de la comédie italienne politique, qui vise à faire rire tout en représentant une conscience de classe, rendre la dialectique un peu plus transparente, l'alléger pour la rendre consciente, d'une manière en fait assez brechtienne.
Et c'est très bon, très drôle et fort (superbe scène de l'huile de ricin chez le juge), et en même temps, dans une certaine mesure limité par son propre didactisme. Mais aussi, finalement plus compliqué et flou que la plupart des autres films sur la même période.
D'une part l'engagement à gauche recontre la fibre individualiste et cynique de Risi. D'autre part, contrairement à la
Grande Pagaille de Comencini, l'enjeu n'est pas de prendre conscience des crimes du fascisme, se positionner dans l'après en rompant avec lui.
Il s'agit au contraire de ne pas s'y laisser prendre ou séduire, le montrer comme dangereux et résistible, et il est clairement tourné dans une perspective de lutte contre l'extrême-droite contemporaine.
Dès lors le film est très dense et ne simplifie aucun enjeu, il montre bien que le fascisme s'est appuyé au départ sur ce qui était à la fois une classe sociale et un type moral taversant la société, délaissé : l'ex-soldat qui n'a pas bénéficié de la victoire, qui n'a rien à espérer car rien n'a changé alors même l'apolcalyse semble derrière lui et qu'il lui a survécu, avant de toucher une audience de plus en plus large, atteigannt de façon apparemment miraculeuse (mais par la faiblesse à al fois de la auche et d ela bourgeoisie) son programme. Le mouvement est ainsi intégralement masculin, et en même temps joue sur la frustraction affective de l'homme seul, unvirilisme qui n'est concient qu'au niveau du groupe, mais dès le début vécu comme une honte ou dimunuation individuelle.
La victoire militaire est paradoxalement l'occasion d'une invisbilisation, il s'agit de lui rendre sa valeur, d'introduire la fiction d'une promesse que l'histoire avait formulée avant les faits. Le projet est fictivement déplacé dans le passé, sans pouvoir distinguer l'origine d'une raison et son objectif.
Même si le meurtre, exercé à l'égard de qui est différent , fragile et en même temps socialement intégré, arrive symboliquement à la fin du film, avec la mort d'un contrôleur de train zêlé, plus borné que politiquement conscient, qui met en péril la marche sur Rome, et est l'occasion paradoxale d'une rupture ratée des personnages principaux, il s'agit moins d'alerter sur les crimes du fascisme, qui n'avaient pas encore eu lieu que de souligner le caractère incohérent et contradictoire de son idéologie, qui ne permet alors, deleur position,qu'une suscpicion : le mouvement est à la fois révolutionnaire et conservateur, ouvriériste mais visant à rassurer la bourgeoisie comme un public, exaltant la force et l'individualisme, mais aussi la discipline et le sacrifice pour le chef, sophistique et bavard mais brutal, garantissant l'ordre tout en le menaçant.
La haine pour les communistes est aussi une annexation et neutralisation de leur concept de classe sociale.
Là-dessus le film est donc extrêmement fort, précis et actuel, et, malgré le caractère massif de son sujet, il adopte un angle qui est assez rare dans le cinéma. Il s'agit de définir le fascisme, pour mieux le combattre, en adoptant l'idée que la définition est peut-être le plus difficile, inviter à juger et à al fois venger les personnages; aux yeux du monde de leur lâcheté et à leur propre yeux de leur propre humiltié qui les a retenu d'aller au bout de ce qu'ils avaient deviné.
Dès lors il contient un singulier mélange d'emphase démonstrative et de subtilité : l'idéologie est comparée à une polenta dégueulasse. Et elle établit dans deux moment distincts qu'il n'y a rien d'autre à bouffer d'abord, et ensuite qu'on est obligé de la manger. impossible de devancer la contrainte, même et surtout si on la comprend. L'apparence d'un contrat social portant sur ce qui a été déclaré auparavant inévitable pour des raisons ontologiques.
Bien vu.
4.5/6