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 Sujet du message: The Landlord (Hal Ashby, 1970)
MessagePosté: 30 Nov 2024, 22:36 
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Jeune héritier d'une très riche famille, Elgar Enders achète un immeuble dans le quartier de Park Slope à Brooklyn, alors ghettoïsé, dans le but de le réhabiliter et de faire une plus-value immobilière, en pariant sur l'embourgeoisement de la zone.
Mais une autre raison motive Elgar : empoté mais généreux, il souffre de plus en plus du caractère moralement étriqué et du racisme de sa famille WASP, à la fois conservatrice et passablement décadente.
Conscient que son oisiveté crée une dépendance de fait envers eux, il veut s'en émanciper matériellement tout en recherchant leur reconnaissance, en leur prouvant qu'il peut réussir économiquement, être le fils rebelle et comprendre l'argent .

L'ambiguïté est symétrique envers ses locataires noirs : il entend les expulser à court terme, mais il ressent par ailleurs de la curiosité et de la sympathie pour eux et essaie d'améliorer la salubrité de l'immeuble, de ne pas mettre la pression sur les plus fragiles en cas de retard de paiement. Il les oppose explictement, aux plans moral et politique, à sa famille dont ils sont pour lui l'antithèse.
Ce noeud va se matérialiser dans deux relations amoureuses : avec Lainie une danseuse de bar métisse et étudiante en arts plastiques, plutôt intello et revêche, le love interest principal qu'il veut imposer dans sa famille, mais aussi (après une cuite) Francine Johnson, une mère de famille habitant l'immeuble plus âgée et extravertie, de milieu plus prolétaire, et dont le mari est actif politiquement dans des mouvements radicaux de lutte
et c'est cette dernière qu'il va mettre enceinte plutôt que Lainie




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Premier film d'Ashby, que Bmntmp aime beaucoup il dont il pointe la proximité avec Leo the Last de Boorman (en effet une forme de remake et d'europanéisation, politiquement affadie).

Le film possède les défauts de ses qualités. La bonne idée est de partir d'un personnage, Tanguy fatigué de l'être, qui n'a pas besoin d'être converti moralement, ayant déjà critiqué les préjugés de son milieu, mais de l'intérieur seulement, avant que le film ne commence. Du coup la question de l'antiracisme n'est pas liée à une dimension moralement édifiante, exemplaire, mais articulée en terme de désir (ici une manière de d'objectiver et de se voir du dehors - le personnage accède en même temps à la sexualité, au pouvoir économique et à l'objectivité sociologique, sans être moralement transformé). Le rapport à l'autre n'a pas à être justifié, mais il faut néanmoins en prouver l'efficacité voire le caractère rédempteur : on se confronte avec une expérience, plutôt qu'avec une valeur, ce terrain a été tranché avant le film.
De l'autre, les personnages sont quand-même des archétypes sociaux, même si le film le lisse avec plus ou moins de bonheur en versant dans une sorte d'humour à la Woody Allen en plus progressiste..
Le film est une forme de métaphore ironique et miniaturisée de la mauvaise conscience blanche après les morts de Martin Luther King et Robert Kennedy, montrés par des photos au mur dans les appartement de l'immeuble, qui se rincent comiquent l'oeil lors de scènes d'amour - ils sont tout à la fois des causes et des témoins malicieux et fantômatiques, des espions indiscret de la vérité sociologique qui procède de l'idéologie.
Du coup le traitement des problèmes amoureux du personnages, la question du couple et de la paternité, passent brusquement à la fin du film de l'humour au pathos mélodramatique
en faisant un enfant avec la "mauvaise" femme il reproduit une situation caricaturale de l'esclavage, obtenant par l'effet de son inexpérience l'équivalent d'un viol, le scénario est assez malin
. Car la vie priée est le seul "champ" (pour utiliser un terme à la Bourdieu) où cette mauvaise conscience politique peut se manifester concrètement et se transforme - la tension homme-femme (voire même la violence domestique du principal couple de locataire) est montrée comme une absorption consciente du conflit politique - un débouché qui n'a pas valeur propre et le sait - la tolérance exige d'accepter la crise affective permanente - et ne s'incarne réellement que dans la famille et la descendance.

Le film est aussi touchant par une espèce de générosité moderniste et de vibe seventies, recourant souvent à l'insert, chaque rencontre d'Elgar se traduit par une image-flash, à la fois souvenir, flash-forward et fantasme d'un lieu social idéal et abstrait qui rime avec l'espace réel - une scène primitive reconstruite. On a un rythme qui rappelle la fin de 2001 de Kunrick dans le contexte de la comédie sociale New-Yorkaise. On voit aussi un ton qui rappelle les films de Robert Östlund (une forme de jeu de challennge and response moral permanent, où l'autre se fait ntentionnellement le cliché que l'on attend de lui, où la contradiction entre les discours et les actes devient performée plutôt que d'être critiquées ) mais dans une forme encore progressiste, sans le relativisme moral et la lassitude égocentrique amenée par le post-modernisme (même si le film est une forme de déconstruction de la screwball comedy à la Capra ou Hawks, avec Beau Bridges en guise de jeune James Stewart un peu maladroit).

Et la première scène d'amour avec la locataire est très belle.*
On trouve aussi un lien thématique avec la Dernière Corvée (où les personnages sont plus denses) un personnage d'idiot intelligent blondinet (assez dostoievskien en fait) devient une valeur (dans la dernière Corvée le coupable sous escorte d'un procès militaire à la fois dérisoire et exemplaire, ici un apprenti-capitaliste balourd mais sympa, qui ne sait à vrai dire pas quoi faire de son argent) à fois surveillé et protégé par plus cynique et déclassé que lui (mais à même de réaliser cette valeur, qui ne doit pas s'épuiser avant la fin du film) .
En voulant être le seul être faible du scénario, le seul pigeon, il permet par contraste aux autres de se mouvoir dans un espace où le recul du regard sociologique est une évidence facile - plutôt qu'une vocation.


*très bonne prestation de Diana Sands, morte d'un cancer à 39 ans (et qui a créé des pièces de James Baldwin) : https://en.wikipedia.org/wiki/Diana_Sands

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Sur un secrétaire, j'avise deux statuettes de chevaux : minuscules petites têtes sur des corps puissants et ballonés de percherons. Sont-ils africains ? Étrusques ?
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