une institutrice féministe laïque republicaine est envoyée dans un petit village pour y ouvrir la première classe de l'école obligatoire. exhumer une « femme en or » du passé (imaginaire en l’occurrence)
angle « féministe » martelé à chaque instant (la femme parée de toute les vertus accessibles aux êtres humains, « mon corps n’appartient qu’à moi !", misogynie crasse balancée fièrement à la gueule…, une petite fille est la première et plus sérieuse élève, et d’ailleurs « les filles éduquées deviendront les citoyennes puis les dirigeantes de demain ! », mais hélas elle se fait embêter et tripoter par les petits garçons, c’est la solidarité féminine qui lui permet de lancer le truc - avec la paysanne rugueuse et taiseuse mais qui observe et a tout compris…).
catéchisme républicain exalté.
celebration de la commune (+ point bonus dénonciation des violences policières)
affirmation de la liberté individuelle d’accomplir son propre destin comme valeur cardinale
bouseux qui résistent au progrès puis s’y convertissent quand ils se rendent compte que ceux avec qui ils n’étaient pas d’accord avaient en fait raison depuis le début
bouseux qui sont émouvants : ils ont « l’intelligence de la main ».
j’imagine la déception lorsqu’au terme d’une semaine de travail, il a fallu se rendre à l’évidence : c’était impossible d’inclure de manière fluide une storyline sur une famille de syriens qui viendraient se réfugier au village, dont les enfants deviendraient les meilleurs élèves et qui permettraient de redynamiser le club poney du département. mais en contrepartie, on a plusieurs répliques pour dénoncer la xénophobie : ils sont racistes avec les habitants du village d’à côté, c’est ridicule et c’est exactement la même chose !
c’est donc à une véritable check-list que nous assistons de la première à la dernière seconde de ce film produit par france télévision (et studio canal !) et destiné à être vu par des hordes, des cargaisons, des troupeaux de scolaires (assez bizarre, dans cette optique, qu’ils n’aient pas resserré le montage qui à 1h48 n’est pas délirant, mais ça reste assez leste et il y a des enfants qui vont s’ennuyer sévère).
alors revisiter le passé pour y plaquer son idéologie politique contemporaine, dans l’absolu ça ne me choque pas moralement plus que ça : ça me parait un incontournable de toute société humaine qui se construit sur son histoire commune, très bien. mais je trouve ça surtout un peu ridicule : la démarche intellectuelle est quand même absurde, c’est souvent fait avec des moufles (no shade eric mais enfin tu n’es pas *subtil*), et puis il y a l’hypocrisie de chaque camp qui s’indigne que l’autre le fasse au nom d’un grand principal moral avant de se précipiter à faire la même chose dès que l’occasion se présente.
et ça n’est pas très porteur artistiquement : la propagande politique est fondamentalement l’ennemie de toute complexité humaine ; ça ne présente pas l’intérêt fondamental d’un film historique - j’avais vraiment l’impression de visiter un disneyland de progressisme de gauche gauche circa 2020s avec des scènes qui me paraissaient à la frontière de l’absurde - ; puis étant doté d’un cerveau en parfait état de marche je suis capable d’avoir ma propre opinion sur les vertus de l’enseignement public gratuit et obligatoire et ne ressens donc pas le besoin de me faire dire quoi en penser pendant 2 heures.
est-ce à dire que c’est mauvais ? même pas. le fait est que les débuts de l’école obligatoire et son implantation dans la france profonde c’est quand même hyper intéressant - outre le coup de maître pour plaire au marché. alors, certes, le film n’a quasiment aucun intérêt historique mais ça reste sympa de passer deux heures dans cette problématique. et tout ça est bien fait, rien n’est ‘mauvais’, c’est écrit platement mais proprement, réalisé platement mais proprement, et la photo n’est même pas toute plate. la reconstitution fait vraiment terriblement reconstitution mais est propre, tout est atrocement prévisible et vraiment ça défile sans aspérité et sans point d’accroche et sans intérêt narratif devant tes yeux mais enfin du coup ça n’est pas désagréable, quoi. alexandra lamy est une comédienne sans profondeur mais appliquée, sinon tous les rôles sont écrits d’après un stéréotype et castés avec la même philosophie. vraiment c’est tellement dénué d’ambition artistique que c’est à peine un film mais ça n’est pas odieux, c’est bien fait sur un thème intéressant.
mais quitte à faire ça, je pouvais pas m’empêcher de penser que si ça avait été un film à oscar en 2003, il y aurait eu un savoir-faire particulier pour écrire des personnages qui seraient vaguement des êtres humains, une intrigue qui ne soit pas uniquement constituée d’éléments de pensée illustrés, etc. ça n’aurait pas forcément été beaucoup plus intéressant mais au moins ils auraient un peu essayé.