Forum de FilmDeCulte

Non mais j'ai posté ça plus pour la blague. C'est le seul retour que j'ai vu qui parle de ces sujets là.

Bon festival à tous :

Il y a des compte-rendus quotidiens dignes d’intérêt ou les journalistes n’ont plus rien à foutre de critiquer les films ?

Tirades empesées, images pseudo-poétiques… Très attendu, le film en compétition de Coppola nous fait dormir debout.

«This is the end, my friend.» Jim Morrison l’avait prédit. C’était dans Apocalypse Now. Un jour, cela arriverait. On y est. La fin est là, apparemment. Francis Ford Coppola montre en compétition Megalopolis , le faramineux projet qu’il caressait de longue date. Cela n’a pas été sans mal. Une fois de plus, une fois encore, il s’est ruiné. Il aurait financé le film lui-même, hypothéqué ses propriétés, plus ou moins vendu ses vignobles, à moitié fermé ses hôtels. La légende continue. Hollywood en a besoin. Coppola avait déjà été mis sur le flanc par Coup de cœur. Ses studios American Zoetrope y avaient laissé leur peau. Le refrain n’est donc pas neuf. Il est bon, il est sain que le cinéma colporte ces histoires en dents de scie. Quarante ans que la rumeur courait sur cette épopée allégorique. Coppola ne craint pas les serpents de mer. Quelqu’un qui a été obligé de partager une palme d’or avec Le Tambour ne peut pas être totalement mauvais.

Voici donc l’objet. Face à ce très long-métrage, Malraux aurait sans doute utilisé le terme de «machin». Il y a de tout, là-dedans. Megalopolis évoque le foie d’une oie qu’on aurait gavée. Transposer la conjuration de Catilina dans l’Amérique de demain, il fallait y songer. Dans un futur proche, New York semble avoir été dévastée par une catastrophe. Deux personnalités s’affrontent. À droite, Frank Cicero, le maire rétrograde accroché à ses privilèges. À gauche, un architecte génial et idéaliste qui rêve d’une société parfaite, César Catilina donc. Adam Driver joue les savants fous. Il a un don, celui d’arrêter le temps, ce qui lui permet de s’immobiliser un pied dans le vide au sommet du Chrysler Building, adresse de son cabinet. Cicero a une fille. Julia n’a qu’une idée: sortir en boîte. Visiblement, les patrons de discothèques n’auront guère d’imagination, leurs établissements sortant de scènes coupées dans le Caligula de Tinto Brass, pornographie en moins.

Vulgarité, débauche à la petite semaine, Coppola a tendance à confondre Manhattan et Las Vegas. Il y a un hic. La demoiselle a une liaison avec l’artiste inspiré qui a inventé un matériau miracle censé remplacer le béton et l’acier, le mégalon. On nage en pleine tragédie. Les décors sont laids, les costumes sont moches, les couleurs écœurantes comme des marshmallows. Les acteurs - pas un pour sauver l’autre - en font des tonnes. Le moyen d’agir autrement?

Un caprice à 100 millions

Le réalisateur leur fourre dans la bouche des tirades empesées, remplies de majuscules, les abreuve de formules sur la démocratie, l’amour, la tyrannie. Les personnages ont la fâcheuse habitude de s’exprimer comme des candidats à l’oral du baccalauréat qui auraient révisé la veille leur manuel de philosophie. L’intrigue patine. Des images pseudo-poétiques tombent à plat, par exemple le bureau du maire bizarrement ensablé de travers comme un blockhaus sur une plage de l’Atlantique. La voix off est dévolue au chauffeur du héros. C’est un Laurence Fishburne assez décontenancé, qui en a pourtant vu d’autres durant ses prestations incompréhensibles dans Matrix. Dustin Hoffman, en avocat richissime, disparaît avant qu’on ait été sûr de l’identifier.

Comme il est question d’empire, on aura droit à une course de chars. Dans les rues, la colère gronde. Les démagogues braillent dans leur mégaphone. Les citations pleuvent, Rousseau, Pétrarque. Driver déclame «Être ou ne pas être», se retrouve momentanément défiguré (aucun lien entre les deux événements: de toute façon, le megalon remédiera à cet inconvénient). Des statues géantes s’effondrent sous la pluie. Le bonheur selon Coppola ressemble à s’y méprendre à une publicité pour Center Parcs. Jon Voight, hagard et peroxydé, a l’air de vouloir désespérément remonter sur le canoë de Délivrance pour échapper à ce naufrage. Shia LaBeouf, en traître turbulent et sosie d’Alain Chabat, se déguise en femme et reçoit une flèche dans le derrière. Les spécialistes reconnaîtront Talia Shire en maman inquiète. Un satellite russe survole la terre, avec ses initiales CCCP, comme au bon vieux temps de la guerre froide.

«Une fable», précise le sous-titre. Il serait plus juste de parler de conte à dormir debout. L’ensemble est d’une tristesse à se pendre. Où est passé l’auteur du Parrain ? Il y aurait une explication: Coppola a été victime d’un imposteur qui a signé à sa place ce caprice à 100 millions de dollars. Une note d’espoir surnage au milieu de ce ratage monumental. Dans l’avenir, il existera toujours des sacs Chanel et des DS 21. Tout n’est pas perdu. L’honneur de la France est sauf, «my friend»