elmergantry a écrit:
Vieux-Gontrand a écrit:
Sinon pour moi le Fassbinder qui m'a le plus toi touché ce est Effi Briest ( pas loin de la veine films d'époque de Truffaut). Et peut-être un de ses premiers, Le Bouc. Pas vu la série sur Döblin.
Une collègue m'avait fait lire le livre de Theodor Fontane, auteur sur lequel sa fille écrivait une thèse ou un mémoire. J'avais tellement aimé le livre que le film de Fassbinder, adaptation assez rigoriste dans mon souvenir, m'avait laissé un peu froid.
Revu le film après avoir lu le livre, et le Fassbinder reste très bon, apportant quelque-chose au livre (les très beau plans sur les chevaux de Crampas ou les escaliers de l'appartemebt berlinois figurent le narrateur-spectateur dans le récit : le seul qui souffre face au système, à la place des personnages, d'Effi elle-même.
Le film est un peu trop fidèle au livre, et a il est vrai un aspect "exercice de style". Fassbinder se concentre sur la psychologie d'Effi Briest et sa servante Roswitha, au détriment du mari, il accentue le côté christique de leur martyre, quand le livre est finalement plus politique et "neutre" (mais vertigineux, par exemplel a courte phrase sur le mol et discret antisémitisme wagnérien du mari). C'est assez déroutant car la forme, en seynettes courtes, et basée sur un dispositif littéraire, est un peu straubienne. Fassbinder ajoute une sorte de religiosité doloriste à cette rigueur . Ce n'est pas, pour autant, un angle incongru, c'est un aspect réel du livre.
Les fondus au blanc sur les analyses morales de Fontane scandent le film et établissent un lien avec le fascisme et l'autoritarisme politique
une machine à faire peur par calcul, il ya déjà chez Fontane l'idée que la bourgeoisie s'en accomode et peut les renforcer culturellement , presque plus forte dans le livre que dans le film. Ce qui est colère instinctive pour Fontane est interprété par Fassbinder en terme de religiosité vraie (Fontane est plutôt moqueur envers le catholicisme de Roswitha quand Fassbinder en fait un secret, une différence explicative). Effi pour Fassbinder se laisse mourrir par dégoût et presque par esprit de résistance. A vrai dire, il lui faut mourir pour pardonner le monde et l'entourage qu'elle a déjà jugée. On sent Fassbinder sensible à cette idée : la lucidité morale et politique s'oppose presqu'à la jouissance, le scandale sexuel est un signe qui l'annonce, mais qui lui-même s'efface. Il faut insister sur cet épuisement pour que la communauté entre les hommes soient établie à partir d'un sens, d'un point de vue moral, plutôt qu'une solidarité de condition et d'expérience sociale à laquelle il ne semble pas croire.