Forum de FilmDeCulte

De frêles garçons le jour, des rois la nuit. Ils sont jeunes, roms et bulgares. Ils sont venus à Vienne en quête de liberté et d’argent facile. Ils vendent leurs corps comme si c’était tout ce qu’ils avaient. Seul les console, et parfois les réchauffe, le sentiment si rassurant d’appartenir à un groupe. Mais les nuits sont longues et imprévisibles.

Dès l'intro, le film renvoi au Querelle de Fassbinder, référence qui "hante" Brothers of the night tout du long. La bar gay comme lieu quasi unique, les éclairages, jusqu'aux marinières portées par ces jeunes prostitués bulgares. Pour autant, Chiha utilise le cadre pré-défini par Fassbinder sans qu'il soit limitatif ou réducteur, mais plutôt comme une référence clin d’œil à partir de laquelle il développe sa propre thématique.

Ce qui frappe tout d'abord, c'est le côté très artificiel de ce documentaire. J'ai eu la chance (par pur hasard) d'assister à une séance où Chiha introduisait lui-même le film, et où il expliquait qu'effectivement il a (parfois) demandé à ces garçons de se mettre en scène, parce que de son point de vue il avait ainsi plus de chance de toucher à leur réalité plutôt qu'en les filmant à la manière d'un documentaire classique. Et je trouve que cela marche très bien, aidé en cela par cette bande de bulgares gouailleurs, charismatiques et excellents acteurs. Le dispositif de Chiha est par ailleurs très juste, l'alternance entre réalité et réalité fictionnelle retranscrivant parfaitement leur vie, faite de mensonges aux autres (leur femme, restée au pays), et à eux-mêmes (le besoin qu'ils ont de se répéter sans cesse qu'ils ne sont pas homosexuels, tout en passant leur temps à se caresser ou a raconter leur séance de fellation ou de sodomie, jusqu'à la confusion totales des genres dans la magnifique scène finale). On peut regretter l'absence d'un regard du réalisateur sur la question de la prostitution, mais c'est d'une manière aussi la force de ce documentaire que de ne prendre absolument pas parti et de se contenter de dresser le portrait de cinq jeunes hommes au parcours particulier et somme toute très attachants.

4.5/6