Cinéphile obsessionnel et sans emploi, Hossein Sabzian ne peut résister à la tentation de se faire passer pour le célèbre cinéaste Mohsen Makhmalbaf à qui il ressemble, afin de s’attirer les faveurs d’une famille iranienne bourgeoise. Une fois démasqué, cet homme est traîné devant la justice pour escroquerie. Apprenant ce fait divers, le réalisateur Abbas Kiarostami s’empresse de réunir une équipe de tournage afin de reconstituer les faits et de filmer le procès de Sabzian.Jusqu'à présent ma connaissance de Kiarostami était circonscrite à la trilogie gigogne Où est la maison de mon ami?/Et la vie continue/Au travers des oliviers, 3 films qui m'ont à l'époque profondément bouleversés. Close-up est justement sorti entre le premier et le deuxième film de cette trilogie, et tout en traitant d'un sujet totalement différent, il n'en est finalement pas si éloigné.
Le premier tour de force de Kiarostami est que tout en livrant une œuvre ultra-cinéphilique qui pourrait rapidement devenir un pensum intellectualiste sur le cinéma et l'opposition entre le réel et la fiction, il ne se départit pas de son naturalisme (celui-là même qui fait la force de Où est la maison de mon ami?) qui donne une véritable authenticité à ce qui nous est donné à voir. Mohsen Makhmalbaf y est également pour beaucoup, époustouflant de sincérité dans le rôle de l'usurpateur de sa propre identité, moi qui me l'imaginait beaucoup plus dur dans son caractère (probablement à cause de sa ressemblance avec Ahmadinejad), j'ai été saisi par sa douceur, voir sa candeur lorsqu'au tribunal il explique les motivations qui l'ont poussé à "commettre son crime", jusqu'au final qui m'a presque tiré une petite larme.
L'autre atout principal du film tient à la critique (tout du moins est-ce ce que j'ai perçu) du pouvoir démesurément détenu par le cinéma. De part le sujet du film tout d'abord, l'histoire de cet homme extrêmement simple qui transcende son existence en jouant le rôle d'un cinéaste qui le fascine, et piège une famille qui veut bien se laisser piéger tant ils sont heureux de pouvoir côtoyer le célèbre cinéaste. La place occupée par la caméra/le réalisateur ensuite, double de la police (l'entretien avec Kiarostami dans le commissariat) et de la justice (où Sabzian/Makhmalbaf peut se tourner vers la caméra pour exprimer ses motivations).
Il y aurait bien évidemment bien d'autres choses à dire sur ce film, matériau idéal à des exégèses sans fin (voir par exemple l'excellente critique faite ici
http://www.critikat.com/panorama/analyse/close-up.html). Me reste pour ma part à découvrir tout le reste de la filmo de Kiarostami, en particulier tous les films postérieurs à Au travers des oliviers, avec la petite angoisse de savoir s'il aura réussi à maintenir son œuvre à un niveau aussi haut que dans ces 4 films des années 80-90.