andré malraux : « rené clair est à la fois un poète et un inventeur. il a su imposer un langage au cinéma comme chaplin, mais avec cette distinction particulière qui est celle de l’esprit français. »
moi : "je sais pas c ki."
c'est la vérité brute, fort probable que j'ai confondu le nom avec rené clément si je l'ai entendu, et même ses films ne me disent rien. là je suis tombé dessus pour la rétro bardot au mac mahon et je lis un peu, et du coup il se faisait trash par la nouvelle vague comme incarnation du vieux cinéma français, de la "qualité française", qui lui ont ensuite valu moult hommages en disant qu'il incarnait un esprit et une élégance, mais du coup il a été un peu balayé par le changement de culture.
c'est ce qu'il m'a le plus impressionné dans le film : ça date de 1955, 3 ans avant et
dieu créa... la femme, 5 ans avant
plein soleil que j'ai vu hier - et pourtant c'est un film du siècle précédent, dans à peu près chaque détail c'est vraiment une autre galaxie de cinéma. et ça n'est même pas un film obsolète, comme peuvent l'être les fins de carrière des grands cinéastes : ça avait fait 5 millions d'entrées, prix louis delluc, c'était populaire et célébré. mais la société changeait à toute vitesse, et le cinéma a été pris dans le tourbillon aussi.
l'aspect le plus visible est la distribution. les deux leads sont gérard philippe et michèle morgan. deux immenses stars de la décennie précédente, au physique et au jeu datés. et dans les seconds rôles, on a yves robert, claude rich, bardot, jacques françois, jacqueline maillant - des gens qui vont prospérer par la suite. la confrontation bardot vs morgan est le plus parlant, un jeu artificiel, classique et figé face à un jeu plus naturel et instinctif (et faux). une beauté à l'ancienne, élégante et racée, face au physique de bardot que je laisse à chacun le soin de définir.
c'est vrai aussi pour à peu près tout. dans le fond, ça raconte, en 1913, une garnison dans une ville de province et le lieutenant est un 'don juan' (un queutard pathologique pour dire les termes) qui fait le pari de séduire la femme digne, belle, élusive et inaccessible de la ville. si le postulat est aujourd'hui franchement désagréable à regarder (quand bien même finalement il tombe vraiment amoureux bla bla bla), la comparaison avec
et dieu... est marquante : la femme est honorable et donc refuse de se donner par peur du qu'en dira t'on, tandis que le mec baise la galaxie entière sous les applaudissements complices de toute la ville. bardot joue une petite meuf de la ville éperdument amoureuse d'un autre soldat de la garnison, et 3 ans plus tard c'est elle qui chauffe la ville et se fait traiter de pute de tous les côtés.
mais tous ces aspects-là ne font partie du film que de manière périphérique : dans les dialogues, la mise en scène, le jeu on est au théâtre, une petite comédie de moeurs centrée sur son histoire, tout ça est absolument hors d'âge sans aucun esprit particulier pour compenser, ce serait une pièce il ne viendrait plus à un seul esprit l'idée de la monter.
il y a par ailleurs incontestablement une 'qualité française', ils ont dépensé sans compter pour une reconstitution spectaculaire, les costumes, les décors, les cascades de figurants, les parades militaires, le tout élégamment filmé en ayant un soin très professionnel à filmer correctement tout ce qui a couté du fric, que ce soit l'acteur au salaire important ou le bouquet de fleur spécialement constitué. ça donne parfois de belles choses, parfois c'est un peu plombant, et les couleurs sont totalement dégueulasses. ça a néanmoins été restauré en 4K il y a 4 ans et c'est quand même incroyable le soin que l'on apporte à notre patrimoine.
donc au final, si je ne connaissais pas, c'est bien que ça a un peu disparu (marrant d'ailleurs comme la salle était bien remplie mais à part moi personne de moins de 75 ans) parce que vraiment c'est d'un autre siecle, sans qualités notables à part des choses que l'on retrouve facilement ailleurs. j'ai trouvé ça assez long et pénible à regarder, dénué de charme, désagréable.
ma voisine de 95 ans m'a dit que c'était un grand chef d'oeuvre, je n'ai pas voulu la contrarier mais, j'ai beau être convaincu des vertus de la transmission culturelle, il y a forcément des déperditions entre les générations et je crains que ces
grandes manoeuvres --> poubelle.