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MessagePosté: 08 Juin 2014, 00:45 
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Successful superfucker
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Inscription: 28 Déc 2006, 21:20
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Une institutrice décèle chez un enfant de 5 ans un don prodigieux pour la poésie. Subjuguée par ce petit garçon, elle décide de prendre soin de son talent, envers et contre tous.

Retour de Nadav Lapid qui bénéficie déjà d'une assise confortable dans la sphère critique dès son premier opus Le policier. Il revient avec cette histoire sur la préservation d'un art face à la vulgarité et au formatage du monde à travers les personnages d'un gamin de maternelle surdoué inventant des poèmes comme des flashs d'inspiration, et une figure ambigue d'institutrice entre chouchouterie admirative et besoin de se l'approprier, délaissant ses propres enfants pourtant exemplaires dont la réussite lui semble banale ou mentant à son club de poésie en faisant passer les créations du gamin pour les siennes. Autour de cette relation, tout le monde semble se contrefoutre du talent du gosse: Quand ils ne s'en tiennent pas à des aspirations purement matérialistes, les adultes ne pensent qu'à baiser ou à danser sur de l'eurodance pourrie. Le lien de transmission entre la professeur et son élève est bridé par l'aveuglement porté en même temps par une certaine idée de pureté de l'art et par les contreparties que l'institutrice s'octroie, flirtant avec le directeur du club de poésie ou tentant de devenir une mère de substitution, mais toujours baigné d'une certaine mélancolie qui n'enmène pas le film vers les rives du thriller à suspense. En tout cas, le film ne paie pas de mine de prime abord mais hante pas mal après la projection grâce à une identité assez unique du coup je gonfle ma note à
4/6


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MessagePosté: 08 Juin 2014, 10:11 
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Et elle est où, ta critique de THE TRIBE? :)


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MessagePosté: 12 Sep 2014, 15:08 
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Pour reproduire les camps?

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MessagePosté: 21 Sep 2014, 20:50 
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Bon, j'ai été assez charmé perso, même impressionné sur certains passages. Je trouve le film très fort pour capter une certaine étrangeté du monde, essayant d'incarner par ses parti-pris mystérieux (ou les attitudes inattendues de ses personnages) l'énigme de l'art et de la création.

Le titre ne ment pas : c'est un film sur l'institutrice, non sur l'enfant. Et là réside peut-être ce qui me gêne dans le film : je ne sais pas réellement ce que Lapid pense d'elle, et plus généralement de ce qu'il filme. On nous montre quand même une femme prise d'une sorte de vénération mystique, agissant avec le gamin comme avec un Dieu (quémandant ses paroles, notant ses déclarations, écartant avec jalousie les autres prêtresses, le lavant... je trouve même parfois au film une certaine ambiguïté, mais je dois avoir l'esprit tordu). Les poèmes sortent de lui via un étrange rituel, comme s'il était soudain véhicule ou passeur d'une dimension supérieure, mais lui s'en fiche, et le film semble souvent appuyer le fait que cette posture éthérée de poète-seul-face-à-tous-observant-le-monde, comportement dont l'institutrice veut l'habiller, est une idéalisation fanatique de l'art. On a une héroïne qui, s'enivrant du contact avec le génie qu'elle adore, retire l'enfant à la vie, comme on condamnerait un gamin qui joue à ses copains à devenir moine et à aller s'enfermer dans un monastère.

Et pourtant, le film peint très souvent l'opposition plus attendue entre les deux maudits (le génie, celle qui sait reconnaître ce génie) et le reste du monde contemporain où rien n'est à sauver. Le "tu m'as manqué", la façon dont il paraît infecté par les strophes débiles entendues en montant l'escalier, la piscine hystérique de l'hôtel ou les scènes de sexe tristes... Le film semble pas mal de fois épouser strictement le point de vue de son héroïne.

Du coup il y a beaucoup de scènes où je ne comprend pas ce que le film essaye de me montrer, ou de me dire. Celle de la danse en boîte, par exemple, qui par son étrangeté inattendue ressemble à d'autres scènes "positives", mais qui pourrait tout aussi bien être conçue dans une volonté de ridicule. Je suis souvent un peu désarçonné par le fait de ne pas savoir ce que le film me raconte, exactement.

Reste de beaux moments de grâce et, au-delà du meilleur pitch ciné vu depuis longtemps, l'un des films les plus imprévisibles et intriguant de l'année.


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MessagePosté: 21 Sep 2014, 21:04 
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Inscription: 13 Mai 2010, 11:50
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Et sinon j'apprends, en lisant l'interview de Lapid dans les Cahiers, que les poèmes du gamin (ceux qu'on loue sur 10 scènes, qu'on admire les yeux embués) sont ceux... du cinéaste lui-même, quand il avait 5 ans :?


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MessagePosté: 22 Sep 2014, 08:51 
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Inscription: 24 Nov 2007, 21:02
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Localisation: In the Oniric Quest of the Unknown Kadath
Pourquoi ce smiley ? Tu trouves ça prétentieux ?

Sinon j'aime beaucoup le film, sa singularité, ce qu'il dit du monde à travers son personnage principal mais j'ai parfois un peu l'impression qu'il ne sait pas trop où aller et se disperse un peu (les scènes avec le prof, un trouble pédophile qui passe sur le film sans véritablement s'y inscrire...). Du coup j'en ressort assez impressionné par sa densité mais aussi un peu frustré par le manque d'émotion, par son côté finalement presque un peu théorique.

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CroqAnimement votre


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MessagePosté: 22 Sep 2014, 09:45 
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Inscription: 13 Mai 2010, 11:50
Messages: 11667
Art Core a écrit:
Pourquoi ce smiley ? Tu trouves ça prétentieux ?

Oui, à partir du moment où c'est traité comme un phénomène de l'ordre du divin, du miracle... Ça devient quand même un réal qui parle de son propre talent sur un ton lyrique ! Je suis content de pas l'avoir su avant de voir le film.

Art Core a écrit:
un trouble pédophile qui passe sur le film sans véritablement s'y inscrire

Ça me gênait pas mal aussi. Peut-être est-ce simplement une facette de la vénération, un peu comme cet ordre de religieuses (dont j'ai oublié le nom) qui avait fini par avoir un rapport presque érotique au Christ. Le privilège de pouvoir toucher l'enfant divin, d'être son esclave, quelque chose comme ça.

Sinon j'ai l'impression d'avoir raté tout un arrière-plan politique que je suis pas capable de lire (la légende jouée en classe, la traversée du désert vers la mer rouge...)


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MessagePosté: 19 Déc 2015, 20:39 
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Inscription: 08 Mar 2009, 19:27
Messages: 451
Bonne pioche en ce qui me concerne. J'ai adoré.

Je ne vois pas du tout ce qu'il y a de divin ou de miraculeux. Le fait que ça soit vraiment une enfant de 5 ans qui les ait écrit ne me gène pas du tout. Le film nous parle surtout de la relation entre l'instit et l'enfant. La poésie est un mystère, comme l'amour. La question Que sais-tu de l'amour ? est posée dans le film, et la réponse est Je ne sais pas.

Et oui il y a un léger voile de pédophilie mais s'il ne reste qu'un voile. Nira tombe amoureuse d'un enfant de 5 ans, en tout cas de son esprit. Elle doit se dire continuellement pourquoi n'as-t-il pas 15 ans de plus ? Quand elle couche avec son prof de poésie c'est par substitution. Elle ne joue jamais avec Yoav et le traite comme un adulte.


Bref, un récit troublant et bien filmé.

_________________
Castorp a écrit:
Nan mais je suis d'accord avec Antigone, là.


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MessagePosté: 30 Mar 2016, 11:11 
Intéressant, mais j'ai l'impression d'avoir vu plusieurs films en un, qui s'annulaient mutuellement. Certains passages - d'ailleurs ceux qui m'ont le plus retenu- font penser à la satire sociale, très dialoguée et psychologique, d'une bourgeoisie nationale à la Chabrol voire Fassbinder, avec les têtes de cons du club de poésie qui sont bien décrites et détestables à loisir, d'autres aux moments surnaturels de de Oliveira avec la manière de filmer le don de l'enfant comme une donnée immédiate, de la métaphysique sur un axe Tarkovski Mallick avec l'idée d'un recommencement du regard dans l'enfance et l'art, reliée à l'étrangeté radicale de la possibilité de la connaissance totale du réel, et la fin est quasiment "A Perfect World" de Clint Eastwood. Paradoxalement cette accumulation et cette hétérogénité laissent peu de place au hors-champ et à l'indétermination du regard, c'est une sur-écriture (habilement mise en abîme dans les poèmes de l'enfant, dont le film dit lui-même qu'ils sont peut-être trop denses et précis pour être bons).

J'ai été étonné de l'interview de Nadav Lapid dans les bonus du DVD, il présente le film comme un histoire littérale, à prendre au premier degré, et ul reprenant à son compte la thèse de l'opposition entre la pureté énigmatique de la poésie et la "saleté" économique mais ausis métapysique du monde énoncée par le directeur du club de poésie, alors que la singularité du film apparaît au contraire dans l'emboitement de métaphores les unes dans les autres, et reconnues comme telles par les personnages, sur plusieurs niveaux, jusque dans la langue, qui finit par diluer le réel en le disant (le film est assez fort là dessus: il donne à la poésie la fonction d'une idéologie, qui est son échec, mais qui est inévitable du fait de l'histoire de l'Europe et d'Israël).

La scène la plus forte, à la fois esthétiquement et pour son regard politique, est la marge du récit: la froideur neutre du regard sur la boum où les soldats dansent à la manière d'ados de 15 ans, avec des bouts furtifs de sauts d'enfants entre nous et les soldats qui brisent momentanément l'échelle du plan.


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MessagePosté: 12 Mai 2019, 18:05 
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Antichrist
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Inscription: 04 Juil 2005, 21:36
Messages: 24052
C'est fascinant de découvrir ce film après Synonymes dont il est un peu le préquel (vu que les poèmes sont ceux de l'auteur écrit à cinq ans et qu'on tente de vampiriser son art). On a aucun mal à imaginer que le jeune héros du film devienne Tom Mercier plus tard. C'est fascinant aussi comment Nadav Lapid réussit ses ouvertures - en cinq minutes, on est happé par le film, cueilli par son originalité, la manière qu'a le metteur en scène de placer la caméra à la hauteur des regards.

Après, comme pour Synonymes d'ailleurs, la première partie est vraiment la meilleure, quand le film reste au jardin d'enfant. Le deuxième acte, plus centré sur elle (même si, paradoxalement l'enfant est plus à l'écran), tient plus du classique portrait de femme en pleine crise de la quarantaine (adultère, doute sur ce qui fait son existence, sexe triste, scène de danse...).

Je reconnais au film la qualité de ne pas plonger la tête la première dans le genre et la critique de la société médiatique (je redoutais les passages bête de foire à la télé) pour se concentrer sur sa folie douce à elle, qui recueille les mots de l'enfant comme un apotre (très belle scène au bord de la mer). C'est d'une densité assez folle sur le plan thématique, bouillonnant et toujours intéressant même si l'émotion est vraiment nichée dans de rares déclarations d'affection.

4/6


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MessagePosté: 21 Nov 2021, 14:54 
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Inscription: 30 Sep 2016, 19:39
Messages: 5913
Déçu par le film qui attisait ma curiosité depuis un moment et dont je n'ai appris que très récemment qu'il avait fait l'objet d'un remake américain. Il rappelle de son côté un croisement de Birth de Glazer (l'aspect quasi-fantastique du don de l'enfant et la relation trouble qui se développe entre lui et sa maîtresse) et de Henry Fool (la poésie et la relation qui se développe entre un jeune inspiré et un mentor qui s'approprie ses productions), solutionné dans un contexte israélien, dont le malaise, la froideur rappellent ces films sinistres de la nouvelle nouvelle vague allemande plus ou moins oubliés qu'on a voulu monter en épingle il y a quelques années et qui faisaient preuve en fait d'un singulier manque d'imagination (les scènes de danse ici ont pu me rappeler Sous Toi, La Ville, qui transposait l'histoire de David et Bethsabée dans le monde de la haute finance). La mise en scène n'est véritablement inspiré à qu'à deux ou trois reprises, dans les scènes qui montrent Yoav jouer avec son ami de la crèche par exemple. Je vais faire à manger, je rajouterai peut-être deux trois choses.
En fait le film souffre d'être un film à pitch, finalement trop étriqué pour ne pas rester simpliste sur son opposition entre poésie et monde du trivial, de l'économique, et sur la subjectivité de son malaise.
Ces scènes satiriques de l'atelier d'écriture sont symptomatiques, la poésie, passe-temps adulte, se trouve in fine dévaluée dans des gloses mesquines ou inintéressantes. A la fin, des plusieurs films emboités les uns dans les autres dont parlent à juste titre des avis plus haut, c'est celui sur la frustration bovaryste de l'institutrice qui domine, comme Karloff l'a fait remarquer en fait.
Le film contient une critique d'Israël finalement trop allusive (universelle?) pour sembler pertinente. Un chant nationaliste à l'école, comme on entendant l'équivalent danois dans le récent Drunk, un discours crytique sur la double ascendance ashkénaze/sépharade (alors que la nounou est peut-être juive éthiopienne)... C'est à peu près tout, on reste commodément au bord de la névrose.
Assez d'accord avec Blanchot de chronicart https://www.chronicart.com/cinema/linstitutrice/


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