3.
Mr Ouine. - Georges Bernanos
Le dernier Bouquin que je n’avais pas lu de Bernanos. C’est profondément différent de ces précédentes œuvres et la difficulté qu’il a eu à l’écrire, la lutte que sa rédaction a dû être se sent à chaque page. Ça pue, c’est empli de boue, d’ellipses en ellipses on s’abîme dans le même trou noir que celui qui habite le cœur de Mr. Ouine et, même si par instant il reste quelque chose de l’enfant (l’esprit d’enfance que l’on retrouve chez le curé du journal) chez Steeny, ce n’est qu’une lumière tamisée, scintillant faiblement par instant, dans ce monde grotesque où même le prêtre abdique.
Citation:
« Mon enfant, reprit-il avec son ancienne emphase, au cours de ma carrière universitaire comme après, je n’ai nullement songé à nier l’existence de l’âme, et aujourd’hui même, je ne saurais la mettre en doute, mais j’ai perdu tout sentiment de la mienne, alors qu’il y a une heure seulement, je l’éprouvais ainsi qu’un vide, une attente, une aspiration intérieure. Sans doute a-t-elle achevé de m’engloutir ? Je suis tombé en elle, jeune homme, de la manière dont les élus tombent en Dieu. Nul ne se soucie de me demander compte d’elle, elle ne peut rendre compte de moi, elle m’ignore, elle ne sait même plus mon nom. De n’importe quelle autre geôle, je pourrai m’échapper, ne fût-ce que par le désir. Je suis précisément tombé là où aucun jugement ne peut m’atteindre. Je rentre en moi-même pour toujours, mon enfant »
Putain de chef d’œuvre, pour résumer. J’ai rarement vu un écrivain français labourer les mêmes profondeurs que les russes avec autant de force.
5.
Du côté de chez Swann - Marcel Proust
Commencé la recherche cette année, qui est d’une « facilité » de lecture incroyable : c’est d’une fluidité et d’une musicalité assez extraordinaire, ça se lit d’ailleurs bien à voix haute. C’est également d’une grande « délicatesse » dans sa saleté, jamais de faute de goût. Je comprends la légende érigée autour de la rencontre avec Joyce, étant donné qu’on peut faire difficilement plus antagoniste..
Citation:
« Et avec cette muflerie intermittente qui reparaissait chez lui dès qu’il n’était plus malheureux et que baissait du même coup le niveau de sa moralité, il s’écria en lui-même : Dire que j’ai gâché des années de ma vie, que j’ai voulu mourir, que j’ai eu mon plus grand amour, pour une femme qui ne me plaisait pas, qui n’était pas mon genre ! »
7.
Endgame - Samuel Beckett
Plutôt que d’enfiler des lieux communs, je renverrai à l’analyse d’Adorno :
http://fr.slideshare.net/tayoulevy/ador ... andendgame.
Putain, tu ne peux pas imaginer à quel point ça me fait plaisir de voir quelqu'un parler de ce bouquin de Bernanos. Les quelques titres que je connais me semblent extraordinaires alors à l'occasion j'essayerai de lire ceux que je ne connais pas. Ah, et une petite question : pourquoi avoir décidé de mettre le titre du Beckett en anglais sachant que c'est un texte français?