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MessagePosté: 27 Jan 2014, 11:05 
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S'écrit aussi parfois Ivan Mozjoukine, ou Ivan Mozzhukhin.
Un certain Alexandre Volkoff est parfois cité en co-réal (à tort, semble-t-il).

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Le pitch trouvé pour le ciné-club était classe, mais il était faux ! Une jeune femme fait un étrange rêve, où un homme la poursuit sous de multiples apparences, tentant de la jeter dans un bûcher. Par ailleurs, son vieux mari, qui s'inquiète de l'attrait qu'elle a pour la frivolité de la capitale et craignant qu'elle ne le quitte, engage un détective chargé de restaurer l'affection qu'elle a pour lui...


J'ai été à fond de chez à fond au premier tiers, content au second, plus tempéré dans le dernier. Cela tient à une particularité du film qui fait aussi sa force : le large prisme de tonalités à travers lequel on s'immisce dans ce drame bourgeois. Drame qui en passe par des tableaux psychanalytiques fantasmés, par un monde nocturne rongé par l'angoisse de perdre l'amour de l'autre, mais aussi par une tendresse plus légère et comique, voire parfois par du vaudeville. Le tout cohabite avec une étonnante harmonie, sans doute parce que pour une fois, cette histoire de bourgeois n'est en aucun cas un moyen de parler de la bourgeoisie. C'est un "cauchemar bourgeois" dans les thèmes (ma femme est-elle là pour mon argent ?) et l'imagerie (grands décors immaculés où l'affection se disperse), mais il n'y a pas d'acidité critique dans le regard, pas de moralisme : c'est une histoire sincère de triangle amoureux, au plus près des personnages, où chacun gardera sa dignité jusqu'au bout. Ce qui fait que la fantasmagorie du film (son cauchemar, son club de détectives absurde, sa danse mortifère) ne prend jamais l'allure d'une série d'inserts : elle point naturellement des angoisses et émotions de ses personnages, avec une certaine évidence.

Un exemple. La femme sort en ville, et téléphone à je ne sais qui pour savoir où se retrouver. Le mari paniqué la suit et descend, alors qu'elle décroche le téléphone. Et arrivée du plan de celui qui répond :

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Ça dure à peine cinq secondes, et c'est complètement absurde. On a simplement la vision angoissée du mari, celle de 36 amants qui répondent en même temps dans la même pièce. C'est pas expliqué, la bizarrerie du truc est pas appuyée, c'est à la fois drôle et un peu triste pour lui... C'est typique de la façon très douce dont l'irréalité s'insère dans la diégèse.

Le souci est que dans l'ensemble, même si son inventivité ne faiblit pas, le film emprunte quand-même un trajet quasi-unidirectionnel, partant de territoires sombres pour aller vers quelque chose de plus pétillant. C'est un peu décontenançant pour le spectateur de voir le cauchemar initial, matrice du film qui va en découler, ne pas avoir droit de réponse au final, par exemple. Ou le mari, beau personnage dont la mélancolie nous touche, se voir expédié par la légèreté d'une scène finale potache. Ou encore le parfum fantastique, jusqu'ici meilleur traducteur des tourments des personnages, quitter petit à petit les lieux pour un ensemble plus franchement réaliste. Le meilleur exemple de cette dérive est le détective, qui navigue habilement entre un professionnalisme charismatique et une émotivité infantile (Mosjoukine, impassible et Keatonien en diable, est brillant pour ça - je découvre un super acteur), et qui finit aussi par perdre ce précieux équilibre. Il arrive un moment où l'on sent le risque de ne plus prendre cette histoire au sérieux.

Un peu déceptif sur la durée donc, mais la tendresse sincère avec laquelle sont traités les personnages, dans un film qui confère par ailleurs une forme juste et flamboyante à ce qui n'est qu'une banale histoire de désamour, en font un film plutôt fort. Je le conseille, donc (ne serait-ce que parce que par son rythme, son montage, sa générosité visuelle et son jeu relativement sobre, c'est aussi un des muets les plus accessibles que j'ai pu voir).


Concernant le DVD : aucune idée de l'origine de cette édition (pas en France, en tout cas, même si la copie vient de la cinémathèque). Compression tout de même un peu violente, faut baisser un peu la luminosité (les noirs étant de toute façon rehaussés par le teintage) pour éviter les gros blocs de pixels...


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MessagePosté: 30 Avr 2020, 18:17 
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Tom a tout dit, rien à ajouter à sa critique, où il relève très justement forces et faiblesses du film. Et bien que cela se termine un peu en eau de boudin, ça reste hautement recommandable, ça tombe bien c'est en ligne sur le site de la cinémathèque depuis hier soir : https://www.cinematheque.fr/henri/film/50361-le-brasier-ardent-ivan-mosjoukine-1923/

Pour en revenir à Mosjoukine, c'est effectivement un très bon acteur, probablement l'un des meilleurs du muet avec son jeu tout en finesse. Sur le même site de la cinémathèque est également visible Feu Mathias Pascal de L'Herbier. C'est un gros morceau, près de 3 heures, pas exempt de lourdeurs, mais Mosjoukine y est pareillement très bon, et si les première (à San Gimignano) et troisième parties (à Rome) sont parfois un peu indigeste (à noter tout de même les scènes en extérieur qui à elles seules valent le coup d’œil), la seconde à Monte Carlo est vraiment au-dessus du lot, comme une respiration à l'intérieur du film, 20 à 30 minutes où Mosjoukine se retrouve à une table de roulette, ses soucis matrimoniaux derrière lui. Ne serait-ce que pour cette longue séquence (ainsi que les présences de Michel Simon et de Pauline Carton), si vous avez un peu de temps et de curiosité, je vous le recommande également.


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