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Quel horrible titre



Emmanuelle habite en banlieue, près d'un centre commercial. Depuis la mort de son père, elle se sent de plus en plus décalée par rapport au monde qui l'entoure. Sa mère s'absente, le lycée l'ennuie. Elle vient d'avoir 17 ans et cette année-là, sa vie va basculer...

Premier film distingué à Locarno, très humble (c'est à dire que l'arc n'est jamais pointé vers le ciel) mais assez brillant (ça touche sa cible pratiquement tout le temps). Réussite d'abord dans la peinture du décor, son 93 à l'horizon obstrué par les panneaux publicitaires, nuages cachés par des Carrefour et Leroy Merlin, banc à l'arrêt de bus et quai de RER, banlieue fantomas partagée entre appart en tas et rêve de maison témoin - là dedans il y a quelque chose de très juste et qui atteint une certaine poésie par sa justesse.

Ensuite son portrait d'ado, qui a mille occasions de sombrer dans les lieux communs, mais qui est parfaitement authentique dans son mutisme sombre, son absence d'envie, sa colère rentrée, son miroir cassé d'idéal standard à mannequin culottes ou première de la classe à la Starac, et un rapport aux autres qui ne sent jamais la fiction. Je trouve tout ça assez admirable et Anaïs Demoustier s'en sort bien (le duo avec Ascaride roule bien aussi).

Le ton est assez crû, c'est à dire que le film file droit sans faire de concession particulière aux bons sentiments, et on ne tombe pas dans l'auteurisant franchouille socialo-crapoteux: il y a pas mal d'élégance là-dedans, dans les souvenirs d'une gamine portée sur des épaules lors d'une fête de l'huma dont les changements promis semblent figés dans un sable mouvant, dans le plan de la jeune héroïne sur l'herbe avec un terrain de foot au second plan. Aucun chichi mais Czajka semble savoir regarder ce qu'elle filme. La fin, contrairement à l'issue traditionnelle du coming of age story, dégage une vraie amertume, celle qui ressort de la vie merveilleuse chantée par Sparklehorse, là où l'on pourrait bien disparaitre, au Mali ou sur un banc de centre commercial, sans que personne ne s'en aperçoive.

4-5/6

A noter un total contre emploi pour Salim Kechiouche, qui joue...un prof de tennis hétéro.

(et les débuts cinématographiques de Magdalena Maleeva aussi)

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Doll, it's a heartbreaking affair