Ivre, et en attendant un hypothétique passage à la prochaine Mostra de Venise, je me lance dans un nouveau auto-festival en compilant vingt films des six dernières Mostra que je n'ai pas vus... Avec toujours la volonté de voir des films d'un max de pays et de me forcer un peu...
Bon, vous pouvez participer au jury, hein, je fixe la barre à disons quinze films vus.
Tout peut être vu légalement.
Etats-Unis Pasolini d'Abel Ferrara 5/6 Belle surprise. Je n'avais pas aimé les précédents Ferrara, si bien que j'en espérais rien. Là, dès la première interview, j'étais à bloc. Je trouve Dafoe extraordinaire, le propos fort et quelques scènes saisissantes. Je regrette juste quelques fautes de goût - le début du film dans le film -, mais c'est un essai passionnant.
Killer Joe de William Friedkin 4/6 Je ne suis pas un grand fan de Friedkin mais la première heure est vraiment réjouissante, série B bien crade, avec des personnages tous plus minables que les autres et une réal impeccable. Le dernier acte est plus forcé: on ressent qu'il s'agit de l'adaptation d'une pièce de théâtre avec un resserrement sur le huis clos et des trucs WTF sur le plan psychologique jusqu'à la phrase finale (et tu devines presque le rideau qui tombe).
Dark Horse de Todd Solondz 4/6 Habituellement je déteste le regard cynique de Todd Solondz mais je trouve qu'ici, il me paraît in fine plus attendri que vraiment méchant avec son gros personnage principal. Il réussit même quelques très belles séquences - le baiser, les deux fins. Pas du tout fan de la musique qui appuie tout et le rythme reste neurasthénique.
France Réalité de Quentin Dupieux 4/6 La bonne surprise. J'avais moyennement aimé Steak et pas aimé du tout les autres. Là je trouve que ça fonctionne bien, le scénario est de plus en plus intrigant au fil du film, et je trouve la fin hyper anxiogène, comme un cauchemar lynchien - la zik fait le job aussi...
Vénus noire d'Abdelattif Kéchiche 5/6 Gros morceau que ce Vénus noire, qui semble répondre à la polémique sur La Vie d'Adèle alors qu'il a été réalisé avant, entre autres choses plus politiques - c'est sans doute le film le plus enragé de son auteur. Il est évident que Kechiche se retrouve clairement dans le discours des "artistes" du film, l'Afrikaner et le dessinateur, fascinés par la femme au point de la mettre en spectacle malgré elle. J'avais d'ailleurs parlé avec lui de l'aspect "sculpture" de son cinéma, que l'on retrouve clairement ici. Toute la première partie en Angleterre est absolument fascinante, d'une incroyable puissance dans la mise en scène - il a une faculté assez insensée d'étirer les séquences sans provoquer l'ennui. La photo est très belle, très "surprenante", loin du cliché de son cinéma. Je trouve la partie française moins réussie, plus attendue dans la trajectoire doloriste. La fin glace bien le sang et en dit long sur la déshumanisation scientifique qui va mener aux expérimentations nazies et japonaises. Grand film, donc, auquel il manque peut-être l'émotion d'Adèle.
Eastern Boys de Robin Campillo 4/6 Beau film. J'avoue qu'au début j'étais un peu déçu, mais Arnotte avait beaucoup fait monter mon attente. Je trouvais ça extrêmement cliché et j'étais agacé par la passivité du héros. Mais le développement de l'histoire, la tendresse qui se dégage m'a progressivement conquis. La fin est un peu "forcée", à la fois cohérente avec le conte de fée sentimental et un peu trop on tente une approche documentaire avec des Deus ex Machina un peu gros. La zik est super.
Un Ete brûlant de Philippe Garrel 3/6 La première demi-heure est effrayante: un sketch des Inconnus qui caricature le cinéma français avec les discours bobos sur la politique, les acteurs qui marmonnent le texte, l'amateurisme de certaines scènes - on se croirait dans les Mystères de l'amour. Mais bon, le charme opère sur la distance. Je trouve la dernière heure plus forte, grâce à la zik de Cale, peut-être, et surtout son ton plus sombre. La fin est très belle.
Europe Les âmes noires de Francesco Munzi 2/6 Je dois avoir du mal avec le cinéma italien... J'ai trouvé ça totalement lambda, vu mille fois, un sous-Gomorra à la lumière terne. Beau plan sur le cul d'une pute histoire de...
Hungry Hearts de Saverio Costanzo 2/6 Début en mode comédie romantique qui intrigue, deux jeunes acteurs plutôt attachants... et puis arrive le surplace psychologique et les crises... La mise en scène à gros effets n'arrange pas grand chose, au bout d'une 1h10 j'en pouvais déjà plus...
The Cut de Fatih Akin 4/6 Surpris par les mauvaises critiques... Bien sûr le film est par certains aspects très classique - surtout dans sa première partie - et l'on pouvait couper quelques séquences au milieu du film - Minneapolis -, mais j'ai trouvé que ça avait une certaine force et une vraie originalité. Tahar Rahim est très émouvant, le film prend une ampleur universelle sur la fin, très belle, sur le "juif" errant.
Sacro Gra de Francesco Rosi 3/6 Le fameux documentaire qui a eu les faveurs de Michael Mann face à Tsai Ming Liang et Paul Thomas Anderson. Bon, ce n’est pas sur le plan formel qu’il a réussi son coup malgré quels beaux plans de périphérique sous la neige… Plutôt pour sa galerie d’Italiens ignorés, ambulanciers, putes, scientifique obsessionnel (le plus beau perso) qui vivent autour du Sacro Gra. Pas déshonorant, mais un Lion d’or pour ce film ?
Les Nuits blanches du facteur d'Andreï Kontchalovski 3/6 Le prix de la mise en scène du dernier festival de Venise. Bon, c'est objectivement bien filmé - Kontchalovski est l'ancien assistant de Tarkovski - et le film atteint par moment une certaine ampleur panthéiste. Le problème c'est qu'il veut aussi raconter quelque chose - la Grande et la Petite Russie - et que l'acteur principal joue pas très bien - ce sont des amateurs.
Goodnight Mommy de Veronika Franz, Severin Fiala 4/6 Même si le Twist se grille très vite, le film parvient à t'accrocher par son atmosphère et sa mise en scène clinique. La dernière demi-heure est scotchante (haha) et les gamins sont formidables (ça c'est de la critique).
Le Dernier Voyage de Tanya d'Alekseï Fedortchenko 5/6 Beau film qui épouse le rythme du fleuve Volga pour nous raconter un conte païen où l'on invente un peuple sans Dieu qui aime le sexe et les saveurs de l'été. La photo du chef op Mikhaïl Kritchman (Leviathan) est sublime.
Asie Outrage Beyond de Takeshi Kitano 3/6 Commandé à Kitano après le succès japonais du premier volet, Outrage Beyond ressemble beaucoup aux films de Kinji Fukasaku avec ces Yakusas qui s'exécutent les uns après les autres, les uns pour la morale, les autres par jeu de pouvoir. Le complot général est ici organisé par un flic "véreux", qui sort Otomo de prison pour le jeter au milieu des quilles. Certains persos sont très forts - Kimura, Otomo, même Kato -, mais on ressent vraiment le côté pilotage automatique du scénario - en clair, 1 tue 2 sur ordre de 3, 3 tue 1 avec l'aide de 4... etc etc. Pas dément, mais pas déshonorant.
Hill of Freedom de Hong Sang-soo 5/6 La petite musique mélancolique de Hong Sang-soo en format resserré, centrée sur les rêveries sentimentales d'un chômeur japonais en Corée du Sud. On retrouve bien sûr sa patte, ses circulations narratives, son jeu sur le réel et le fantasmé. Parfois drôle, parfois triste. Petit mais précieux.
Warriors of the rainbow de Te-Sheng Wei 2/6 Voilà bien un film qui n'avait aucune chance de se retrouver à Cannes: la version courte (2h35) d'un film fleuve de plus de quatre heures (et deux films), fresque nationaliste anti-japonaise à l'histoire rendue parfois incompréhensible par le montage elliptique WTF. Que retenir ? Une description ethnographique surprenante - le coup de la chasse aux têtes, je croyais que c'était au sens figuré, mais non... -, une violence hyper cash et parfois déroutante, la dernière heure totalement charal. Mais bon... la mise en scène est pas vraiment marquante malgré des moyens que l'on suppose colossaux. Et l'heure d'avant la bataille est looooooongue.
Accident de Soi Cheang 4/6 Pur exercice de style assez virtuose dans sa première partie. Dommage que la suite parano soit moyennement gérée, j'aime bien le côté désespéré de la fin.
Lebanon de Samuel Maoz 4/6 Bel exercice de mise en scène - le film est un huis clos parfaitement respecté qui donne une vraie expérience étouffante au spectateur -, Lebanon manque juste un peu de travail sur la psychologie des personnages - c'est le premier film d'un documentariste et je trouve les persos un peu trop archétypaux. Mais ça complète parfaitement Valse avec Bachir (le mec est d'ailleurs un ancien tankiste).
Australie Tracks de John Curran 2/6 Du Weinstein pur jus, avec son histoire vraie racontée de façon éclatée, avec sa voix-off et sa zik au piano façon Desplat. Pas désagréable grâce au charme des deux acteurs Mia et Adam, mais les photos du générique final ont plus d'âme que celle du film, beaucoup trop publi-reportage.
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