L'étonnant Homme-CrabeSynopsis : alors comme ça, j'ai épousé une ninja...Également titré
Heroes of the East et...
Les Démons du Karaté.
Malgré un mariage arrangé, Ah To, un jeune maître en arts martiaux chinois (Gordon Liu) et Yumiko, sa consœur japonaise (Yuka Mizuno) filent le parfait amour, sauf lorsqu'ils abordent les problèmes du quotidien comme quel est le meilleur art martial ? Excédée que son mari la surclasse dans tous leurs duels, Yumiko repart pour le Japon où son ancien flirt et six de ses amis décident de donner une bonne leçon au goujat.
On a tôt fait de dire à propos de ce film qu'il s'agit d'un mélange entre la comédie romantique et le film de tatane, et même si on commence comme du Lubitsch où les disputes se règleraient à coups de savate, c'est un poil plus compliqué. Car pour Liu Chia-liang, les arts martiaux c'est la vie et la vie c'est les arts martiaux, et toute sa mise en scène est dévolue aux mouvements, à la chorégraphie et aux techniques de ses protagonistes. Chez lui, on ne fait qu'un avec son art ou ses armes, et le but de tout est d'atteindre cette harmonie dans un perfectionnement incessant : cf ses films sur la 36e chambre de Shaolin auxquels une scène d'entraînement fait d'autant plus référence que frangin Gordon tient là aussi la vedette.
D'où l'abandon de l'aspect comédie romantique après la première partie pour un véritable tournoi dont l'objectif est moins de récupérer la donzelle (qui s'empresse de devenir le coach de son mari) que de représenter l'honneur de la Chine. Mais, là où un film de cette époque a tendance à surfer sur la xénophobie anti-nippone du type
La Fureur du Dragon,
Shaolin contre Ninja montre un échange culturel permanent au cœur des différents duels.
Le mouvement de balancier est toujours le même : Ah To doit à chaque combat apprendre une nouvelle technique, tout en analysant voire en adoptant celle des belligérants japonais. On a donc ainsi un festival de techniques particulièrement variées au cours de sept combats à chaque fois expertement agencés tout en respectant la construction psychologique des personnages.
Mon favori -hormis le final dantesque où l'on multiplie les trompe-l’œil des ninjas du titre- est sans doute le duel de nunchakus/tonfas aux enchaînements rapides qui se déroule dans une ruelle large, tandis que celui avec les saïs joue avec une barrière séparant les combattants.
De plus, Liu Chia-liang aime considérer hommes et femmes comme égaux et unis par les liens du poing dans la face. Certes, ici, la femme perd continuellement les premiers duels, mais c'est moins par infériorité de fait ou manque d'expériences et de savoir, que là encore pour asseoir la prétendue supériorité des arts martiaux chinois sur ceux japonais. D'ailleurs, même le genre est fluide dans ces arts, puisque Gordon Liu démontre au début une technique de combat utilisée par les femmes chinoises en robe devant sa femme qui démolit des murs en pantalon de kimono. Voir aussi la séquence où filmés en face-à-face, comme en reflet, les tourtereaux présentent l'un à l'autre leurs différentes armes.
Enfin, la mise en scène est aussi soignée dans les scènes de baston que dans celles au repos, ce qui donne une impression de fluidité et d'harmonie permanente, épousant ainsi le regard de ses spécialistes. Un sens du partage et un intérêt évident de la part du réalisateur qui apparaît en maître de la boxe d'ivrogne.
Liu Chia-liang se paie même le luxe de chorégraphier et réaliser des combats impressionnants mais sans ultra-violence ni le moindre mort.
Un vrai message de paix par le développement personnel et d'entente au-delà des rancœurs présentes et passées qui trouvera, sans aucun doute, écho en cette période particulièrement modérée.
maintenant que j'y pense c'est un peu comme un
Scott Pilgrim sans le côté tête-à-claques