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 Sujet du message: The Old Oak (Ken Loach, 2023)
MessagePosté: 09 Nov 2023, 17:31 
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Bon cru que ce Loach qui parvient à parler des réfugiés tout en parlant toujours du prolétariat anglais dans un village oublié. Les deux sujets fonctionnent bien de concerts et n'oppose pas deux souffrances, deux pauvretés mais au contraire essaie de les faire coexister, communiquer. Et c'est vraiment réussi, je m'attendais à un film dénonçant le racisme primaire des provinciaux anglais face à l'arrivée de migrants mais ce n'est pas ça ou du moins ce n'est pas que ça. C'est bien plus une chronique sur des coins d'Angleterre laissés à l'abandon et sombrant peu à peu dans une misère terrible où arrivent des réfugiés syriens. Et Loach essaie de ne juger personne, de ne pas être donneur de leçon. Le personnage principal est très réussi, j'aime beaucoup comme Loach filme son visage, capte à la fois sa candeur optimiste mais aussi les stigmates d'une vie brisée.

Il y a quelques grossièretés de scénario dont on aurait pu se passer et qui n'apporte franchement pas grand-chose
le chien du personnage tué par le pitbull [d'ailleurs tout ce récit autour du chien est superflu, bien trop larmoyant], la trahison finale des fidèles du pub
probablement quelques dialogues en trop mais c'est un très beau film, digne et émouvant qui essaie de créer à son niveau un joli sentiment de "communauté" qui ne serait pas uniquement lié au territoire mais bien plus profondément à l'humain. La fin m'a cueillie.

4/6

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MessagePosté: 09 Nov 2023, 19:15 
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Ah, tu me donnes envie d'y aller. Les derniers Ken Loach étaient tellement prêchi-prêcha que j'avais décidé d'abandonner son cinéma.


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MessagePosté: 10 Nov 2023, 07:16 
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Art Core a écrit:
un joli sentiment de "communauté" qui ne serait pas uniquement lié au territoire mais bien plus profondément à l'humain.


je me demande quel pourcentage des spectateurs du film ne sont pas déjà 100% convaincus par cette approche des choses en entrant dans la salle, et du coup la différence avec les "bulles d'informations" dont on parlait beaucoup avec les electeurs trumpistes, des gens qui ne se confrontent que ce avec quoi ils sont déjà d'accord. et est ce qu'il y aurait la place pour un film à message / portée politique qui tenterait, sur n'importe quel sujet, de bousculer , interroger ses spectateurs sur ses notions, ou s'il faut absolument se positionner en mode facho (vaincre ou mourir) / humaniste (old oak etc) pour que les gens aillent voir ce qui semble correspondre à leur vision, et point barre.


Dernière édition par FingersCrossed le 10 Nov 2023, 09:18, édité 1 fois.

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MessagePosté: 10 Nov 2023, 08:56 
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FingersCrossed a écrit:
je me demande quel pourcentage des spectateurs du film ne sont pas déjà 100% convaincus par cette approche des choses en entrant dans la salle.


Je ne suis pas convaincu


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MessagePosté: 10 Nov 2023, 09:17 
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mais tu dis toi-même que tu avais zappé les derniers parce que c'était trop prechi precha :D


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MessagePosté: 10 Nov 2023, 10:05 
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FingersCrossed a écrit:
je me demande quel pourcentage des spectateurs du film ne sont pas déjà 100% convaincus par cette approche des choses en entrant dans la salle, et du coup la différence avec les "bulles d'informations" dont on parlait beaucoup avec les electeurs trumpistes, des gens qui ne se confrontent que ce avec quoi ils sont déjà d'accord. et est ce qu'il y aurait la place pour un film à message / portée politique qui tenterait, sur n'importe quel sujet, de bousculer , interroger ses spectateurs sur ses notions, ou s'il faut absolument se positionner en mode facho (vaincre ou mourir) / humaniste (old oak etc) pour que les gens aillent voir ce qui semble correspondre à leur vision, et point barre.


Justement je trouve que le film est plus surprenant et "profond" que son sujet laisse penser. Beaucoup de spectateurs je pense attendent un film gentillet sur l'accueil des migrants mais ce n'est pas ça ou pas que ça. Il te montre la paupérisation de coins d'Angleterre qui semblent littéralement abandonnés et comment justement on y envoie des migrants parce que ça dérangera moins que dans les centres villes de grosses agglomérations.

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MessagePosté: 10 Nov 2023, 10:48 
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FingersCrossed a écrit:
mais tu dis toi-même que tu avais zappé les derniers parce que c'était trop prechi precha :D

Ben oui, justement, je ne suis pas (plus) 100% convaincu de l'approche de Ken Loach avant d'aller voir ses films


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MessagePosté: 26 Mai 2024, 08:36 
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je me souvenais de l'avis d'art core et de ce petit échange, d'où le fait qu'au moment de le choisir dans le cadre de mon petit week-end cannois j'étais tout à fait ouvert d'esprit.

mais autant il y a des fois où on est simplement pas d'accord, autant là je me demande carrément si on a vu le même film.

j'ai rarement vu un tract politique à ce point. mais en vérité, si deephan c'est du zemmour je ne vois pas bien qui en france peut porter un discours aussi neuneu sur le sujet.
alors chaque scène illustre doctement un élément de pensée sur le sujet ("ils se rencontrent autour d'un appareil photo parce que l'art rassemble les peuples ! le bar n'est plus fréquenté que par une poignée de gens parce que l'occident est en déclin démographique ! il raconte l'histoire du bar à la fille car au fond ce sont ces nouveaux arrivants qui s'approprieront cette histoire commune qui sinon disparaitrait !) ou carrément les éléments de langage placés directement dans la bouche des personnages ("quand quelque chose va mal, les gens s'en prennent à plus petit qu'eux alors qu'il faudrait s'attaquer aux plus grands, les puissants qui nous exploitent !").
la démonstration est tellement dogmatique et jusqu'au boutiste (c'est dans absolument chaque scène, chaque dialogue, chaque interaction : rien n'existe en tant qu'histoire ou en tant que personne, tout en tant qu'illustration) que ça en est assez admirable au fond.

et le tout, donc, dans un refus de penser assez puissant. il y a le camp du mal - les méchants racistes white trash, dès la première seconde et jusqu'à la dernière - et le camp du bien - les gentils gens de gauche et surtout les gentils syriens. les gentils syriens à un stade qui en devient... raciste. parce que si essentialiser les immigrés comme violeurs délinquants criminels c'est raciste, considérer que tout personne venant du tiers-monde est intrinsèquement le bon le pur et le juste c'est quand même principalement les considérer comme des bons sauvages. puis pendant *une* scène, il explore un peu la complexité des choses (ça dure 20 secondes il faut profiter) : les bénévoles distribuent des trucs aux syriens, dont un vélo, sous les yeux de gamins pauvres locaux qui ne comprennent pas pourquoi les syriens ont le droit à un vélo alors qu'ils viennent d'arriver alors que eux on leur a jamais rien donné. mais c'est pour immédiatement te formuler l'élément de langage : "le problème ce n'est pas qu'on en fait trop pour les syriens c'est qu'on en fait pas assez pour tous les pauvres à cause du libéralisme !", puis de l'illustrer dans un truc tellement neuneu c'en était douloureux : ils ouvrent un restaurant collectif gratuit et participatif où les syriens et les locaux peuvent venir manger gratuitement ! avec un panneau "those who eat together stick together" soigneusement cadré dans le plan.
sans parler de la fin, tellement niais et absurde, de la science fiction gauchiste vraiment.

je suis allé voir les critiques presse sur allociné, globalement hyper positives, et je ne savais pas si c'était par panurgisme cannois, par terreur de dire quelque chose sur un film sur l'immigration et donc d'être instantanément dans le camp du mal, ou si c'était la preuve que le film fonctionnait au final comme un meeting politique : on est tous ensemble à penser la même chose, on applaudit chaque parole qui va dans son sens, on diabolise et caricature chaque parole qui apporterait une nuance, et on rentre chez soi convaincus d'être dans le juste - et ça je peux le comprendre, l'époque est dure et c'est agréable de se lover dans une bulle en se disant qu'on est formidable et qu'on a bien raison de penser ce qu'on pense.

mais enfin en tant que film c'est consternant.


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MessagePosté: 26 Mai 2024, 12:23 
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Fingers crossed a écrit:
on est tous ensemble à penser la même chose, on applaudit chaque parole qui va dans son sens, on diabolise et caricature chaque parole qui apporterait une nuance, et on rentre chez soi convaincus d'être dans le juste - et ça je peux le comprendre, l'époque est dure et c'est agréable de se lover dans une bulle en se disant qu'on est formidable et qu'on a bien raison de penser ce qu'on pense.
Rien n'est plus faux et c'est ignorer ce que le film a de profondément déprimant. L'accabler comme tu fais n'a pas grande utilité : c'est déjà un film accablé. Ca se termine significativement sur un enterrement; la seule ambition des gars est de manger ensemble, de survivre. Le grand soir n'est plus pour demain. C'est pas la gauche combattante qu'on a pu connaître dans d'autres Loach; c'est la gauche mélancolique qui mesure l'étendue du désastre. A la fin de "Land and freedom", c'était déjà un enterrement, mais on y gardait le poing levé, l'étendard rouge. Là, même pas. Il s'agit juste, comme dit Art Core, de rester un peu "humain", de pas se transformer en pitbull. Ce qui en ressort n'est pas je ne sais quelle bonne conscience, mais plutôt un sentiment de honte: la honte des échecs, du découragement.
Je ne suis pas fan de Loach ni de ce film, je précise. Mais en faire une ode triomphale à la "bonne conscience de gauche", c'est vraiment trop le déformer.


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MessagePosté: 26 Mai 2024, 13:57 
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non mais je pense que le film a été remonté depuis sa sortie en salles et c'est cette version là que j'ai vue sur canal. je ne vois pas d'autre explication.

après on peut effectivement dire que le film incarne parfaitement l'état de la gauche.
(d'ailleurs marrant, le labour s'apprête à revenir au pouvoir après 14 ans de défaites, mais pas du tout sur une ligne open borders).


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MessagePosté: 27 Mai 2024, 03:02 
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FingersCrossed a écrit:

mais enfin en tant que film c'est consternant.
La meme impression que j'ai eu devant Daniel Blake.
Après The old oak, c'est un peu mieux. Inoffensif, gentillet, programmatique mais ça reste loin des années glorieuses de Loach. Je crois que son dernier que j'ai bien kiffé c'est celui sur le whisky.


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