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 Sujet du message: Ariane (Billy Wilder - 1957)
MessagePosté: 22 Mar 2009, 14:42 
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Bien que mal aimé de la critique et du public lors de sa sortie dans les salles américaines en 1957, Ariane (le titre original, Love in the Afternoon, est tellement plus glamour) conserve, plus de cinquante ans après sa réalisation, un charme indéniable que ne vient presque pas gâcher une durée un peu rebutante. Sur les 125 minutes que dure le film, difficile parfois de ne pas trouver le temps long, surtout devant certaines longueurs. Difficile aussi de nier l’aspect très théâtrale du jeu des acteurs (notamment Hepburn, qui m'insupporte). Pourtant, cette histoire d’amants, de portes qui claquent, de détective privé, fait mouche essentiellement grâce à la douceur de la mise en scène, au choix des partitions musicales qui l’accompagnent, et à la perfection des décors. Si le genre de la comédie américaine parait aujourd’hui incroyablement vieillotte, celle-ci surnage largement et mérite la (re)découverte.
4/6

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MessagePosté: 20 Nov 2019, 16:36 
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A Paris, le détective privé Claude Chavasse est spécialisé dans les affaires d'adultère. Sa fille, Ariane, est fascinée par son travail et plus particulièrement par le cas du playboy Frank Flannagan. Lorsqu'Ariane surprend un client de son père menaçant de tuer Flannagan, elle court prévenir ce dernier du danger.

3 ans après Wilder reprend la formule de Sabrina, avec la même Audrey Hepburn qui en pince pour un vieux monsieur. Ce qui est assez amusant c'est de voir que Bogart et Cooper, au moment où ils tournent ces deux films, ont exactement le même âge (55 ans), qu'Hepburn a elle (petit calcul rapidement fait de tête) 3 ans de plus lorsqu'elle tourne Ariane... et ce n'est que pour celui-ci que critiques et spectateurs vont s'unir dans un même élan désapprobateur, jugeant Gary Cooper trop vieux, condamnant le film à un cuisant échec commercial. Dans les années 50 déjà l'indignation pouvait être à géométrie variable.

En lançant le film je sais que certains ici en ont fait leur œuvre préférée de Wilder. Je m'attendais donc à du lourd, mais je craignais un peu aussi (ça me fait toujours ça quand je débute la projection d'un prétendu chef d’œuvre) que le résultat ne soit pas à la hauteur de mes attentes. Et j'ai bien cru que mes craintes allaient se confirmer (ce qui me permet d'évacuer fissa les quelques réserves que je peux avoir). D'une, et je comprends bien que c'est un poil anachronique comme critique, mais que le film se passe en France et que les français parlent en anglais, ça m'agace. Ça m'agace d'autant plus que du coup on est obligé de supporter l'usant accent français de Maurice Chevalier (qui il faut le reconnaître est tout de même très bon acteur), pire les salves de "Papa, Papa" de Hepburn. Que tu fasses parler les français en anglais assume Billy, pourquoi alors leur coller un ou deux mots de français dans la bouche juste pour faire couleur locale!
Mon autre réserve, qui est probablement une influence de l'air du temps, c'est qu'à un moment le film se trouve à une bifurcation et qu'il choisit de suivre la voie que je lui aurais préféré ne pas voir prendre.
Après la première après-midi passée ensemble, puis le retour de Cooper au States, Hepburn est effrondée, à la fois coupable d'avoir satisfait son désir et victime des techniques de séduction éprouvées du Don Juan - voir plus, lorsque Cooper enserre Hepburn de ses bras, coincées contre la porte, on est à deux doigts du viol. J'aurais aimé que Wilder "maintienne" Hepburn dans son rôle de victime, qu'il appuie le caractère profondément pernicieux de Cooper - qui sous couvert de don juanisme abuse avant tout des femmes - en gros qu'il soit un génial précurseur du mouvement #metoo

Mais le résultat final m'oblige à m'incliner devant le choix de Wilder, parce que malgré mes réticences ça marche, je ne peux pas empêcher le film de m'embringuer avec lui. Non pas que la réalisation soit la meilleure de Wilder (elle est au contraire très classique, on a presque l'impression d'être face à un film des années 40, c'est peut être son film avec le moins d’esbroufe visuelle), mais le scénario est probablement son plus beau. L'écriture est d'une précision clinique, avec une profusion de détails qui touche toujours juste (ce moment où Cooper distribue les pourboires aux employés de l’hôtel qui lui répondent tous "Merci monsieur", se retourne vers Hepburn - avec qui il vient de coucher pour la première fois - qui arbore son plus beau sourire et prononce la même phrase, c'est un tel concentré de sarcasme, à la fois drôle et tragique, c'est d'une beauté folle), qui joue gracieusement avec les codes du vaudeville (alors que je déteste le genre), tendant parfois à l'abstraction ou au burlesque (cette idée géniale des 4 gypsies qui suivent Cooper partout, du hammam à la ballade en barque à Vincennes, qui partage son désespoir pendant une soirée de beuverie, comme la marque indélébile de son propre enferment dans ce rôle de vieux Don Juan), tout entier construit pour nous emmener vers cette fin qui coupe littéralement le souffle.
Lorsque Cooper prononce pour la première fois son prénom, "Ariane", on ressent comme elle une véritable décharge électrique, on happe l'air quelques secondes sans arriver à respirer, je rejoins l'avis de Tetsuo qui en fait l'une des plus belles scènes finales de toute l'histoire du cinéma


5.5/6


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MessagePosté: 20 Nov 2019, 17:02 
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De l’esbroufe visuelle chez Wilder ? À quoi tu penses ?


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MessagePosté: 20 Nov 2019, 17:11 
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Déjà-vu a écrit:
De l’esbroufe visuelle chez Wilder ? À quoi tu penses ?

Je précise que ce n'est pas négatif pour moi, Wilder a un talent de metteur en scène exceptionnel, ses films sont très souvent hyper léché visuellement parlant. Si on prend Sabrina par exemple c'est une tuerie, les profondeurs de champ et les contrastes de lumières lorsqu'Hepburn entre dans le bureau de Bogart c'est magnifique. Après si je devais citer un plan de pur esbroufe l'ouverture de Boulevard du crépuscule conviendrait bien.


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MessagePosté: 20 Nov 2019, 17:15 
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Le film s’appelle Sunset Boulevard, il fait dérouler son générique de début sur le bitume, moi je dis ça se tient.


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MessagePosté: 20 Nov 2019, 17:18 
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Déjà-vu a écrit:
Le film s’appelle Sunset Boulevard, il fait dérouler son générique de début sur le bitume, moi je dis ça se tient.

Fait pas l'innocent, je parle évidemment de la contre plongée sur Holden dans la piscine


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MessagePosté: 20 Nov 2019, 17:19 
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Encore mieux : onirique en diable pour introniser le point de vue du mort


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MessagePosté: 20 Nov 2019, 17:21 
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Déjà-vu a écrit:
Encore mieux : onirique en diable pour introniser le point de vue du mort

Non mais j'aime, j'aurais pas du écrire esbroufe si c'est ce qui te chiffonnes, allez va pour maestria à la place.


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MessagePosté: 21 Nov 2019, 12:05 
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Lohmann a écrit:
Mais le résultat final m'oblige à m'incliner devant le choix de Wilder, parce que malgré mes réticences ça marche, je ne peux pas empêcher le film de m'embringuer avec lui. Non pas que la réalisation soit la meilleure de Wilder (elle est au contraire très classique, on a presque l'impression d'être face à un film des années 40, c'est peut être son film avec le moins d’esbroufe visuelle), mais le scénario est probablement son plus beau. L'écriture est d'une précision clinique, avec une profusion de détails qui touche toujours juste (ce moment où Cooper distribue les pourboires aux employés de l’hôtel qui lui répondent tous "Merci monsieur", se retourne vers Hepburn - avec qui il vient de coucher pour la première fois - qui arbore son plus beau sourire et prononce la même phrase, c'est un tel concentré de sarcasme, à la fois drôle et tragique, c'est d'une beauté folle), qui joue gracieusement avec les codes du vaudeville (alors que je déteste le genre), tendant parfois à l'abstraction ou au burlesque (cette idée géniale des 4 gypsies qui suivent Cooper partout, du hammam à la ballade en barque à Vincennes, qui partage son désespoir pendant une soirée de beuverie, comme la marque indélébile de son propre enferment dans ce rôle de vieux Don Juan), tout entier construit pour nous emmener vers cette fin qui coupe littéralement le souffle.
Lorsque Cooper prononce pour la première fois son prénom, "Ariane", on ressent comme elle une véritable décharge électrique, on happe l'air quelques secondes sans arriver à respirer, je rejoins l'avis de Tetsuo qui en fait l'une des plus belles scènes finales de toute l'histoire du cinéma



Allez, 6/6 là !

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MessagePosté: 21 Nov 2019, 13:30 
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J'aurais surtout mieux fait de ne pas mettre de note. Je met très peu de 6/6, encore moins directement après la vision d'un film, il faut souvent que cela infuse un peu avant que je sois totalement conquis.


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MessagePosté: 21 Nov 2019, 13:32 
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Schtroumpf sodomite
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Je comprends.

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MessagePosté: 21 Nov 2019, 16:25 
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A la réflexion comme après ma rétro Wilder je compte basculer sur Lubistch, je me dis qu'il vaut mieux laisser la place pour un ou plusieurs films qui seraient vraiment parfait

Pour au final ne pas mettre plus de 4/6


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MessagePosté: 29 Mar 2022, 09:57 
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Sir Flashball
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Et donc je découvre que le film de Wilder dont Lohmann est un thuriféraire absolu, c'est celui-ci. Je n'en connaissais que le titre VO.
Résultat, si je comprends l'enthousiasme, je n'arrive pas à le partager complètement. Parce que je dirais que si, effectivement, 60% du film sont parfaits (à partir du moment où Hepburn rencontre Cooper, en fait, avec certains passages fabuleux. J'adore la façon dont Wilder filme Cooper, par exemple, toutes les plus belles scènes du film sont là), je trouve les 20 premières minutes, entre Hepburn et Chevalier, ratées, tant elles ploient sous le poids d'une écriture qui cherche le "banter" à tout prix, sans réellement y parvenir.
J'ai aussi beaucoup de mal avec la toute fin, où Wilder rend le pouvoir à Cooper, ce qui semble nier tout le discours du film, qui consistait à progressivement inverser le rapport de force (au début, Cooper est dominant, sa présence est oppressante, et Hepburn semble être une petite souris prise au piège, mais plus la romance progresse, plus Hepburn prend l'ascendant) : Hepburn n'est plus qu'une petite fille presque à genoux, dépendant du bon vouloir de son millionnaire.

Cela dit, malgré mes réserves, je n'ai pas vu le temps passer, et c'est clairement un des plus beaux films de Wilder.

5/6

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MessagePosté: 29 Mar 2022, 10:02 
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Привет дамы и господа.
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MessagePosté: 30 Mar 2022, 18:48 
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Castorp a écrit:
J'ai aussi beaucoup de mal avec la toute fin, où Wilder rend le pouvoir à Cooper, ce qui semble nier tout le discours du film, qui consistait à progressivement inverser le rapport de force (au début, Cooper est dominant, sa présence est oppressante, et Hepburn semble être une petite souris prise au piège, mais plus la romance progresse, plus Hepburn prend l'ascendant) : Hepburn n'est plus qu'une petite fille presque à genoux, dépendant du bon vouloir de son millionnaire.

Pour reprendre les mots de Skip McKoy, Ariane c'est l'ultime (et magnifique) hommage de Wilder à Lubitsch. Qu'il fasse jouer Chevalier est nécessairement un clin d’œil aux opérettes du début du parlant par exemple. Remis dans ce contexte, parler de prise d'ascendant d'Hepburn serait excessif. On est plus dans un rééquilibrage (nécessaire), mais chez Wilder comme chez Lubistch (si on exclu ses comédies grotesques du début des années 20 qui sont ses seuls films où les femme prennent vraiment l'ascendant sur les hommes) la femme s'auto-limite toujours dans ses prétentions, leur place est d'être une quasi égale de l'homme, mais un poil en deçà tout de même (c'est très exactement le sujet de leurs meilleurs films, Embrasse-moi idiot, 7 ans de réflexion ou Uniformes et jupons courts chez Wilder, Ange, Le Ciel peut attendre ou Le Lieutenant souriant chez Lubitsch). Non pas qu'au fond les deux soient des masculinistes convaincus, mais ce ne sont pas non plus des militants féministes, au fond ils ne chérissent rien tant qu'une certaine harmonie, et opère quelques menus ajustements afin que la position de la femme dans le couple soit plus conforme à ce qu'elle devrait être. Autour de toutes ces questions Embrasse moi idiot est absolument délicieux. Enfin, tout ça pour dire que la fin d'Ariane est totalement dans l'ordre des choses.


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