Forum de FilmDeCulte

Un constat intime de l'état de la société italienne, tourné entièrement au téléphone portable.


Spoilers, mais on s'en fout car ce film est une merde que je vous interdis strictement d'aller voir.

Parmi les clichés tenaces qui tiennent en tête, en voici un qui a la dent dure : quand un artiste (acteur, peintre, romancier...) se met soudain en tête qu’il est aussi cinéaste, c’est toujours une catastrophe. Il s’agit ici en l’occurrence d’un metteur en scène de théâtre, et c’est avec joie que j’allais à cette séance dans l’idée de réduire à néant mes méchants préjugés. Bravo Delbono, donc, pour avoir confirmé puissance mille la moindre de mes craintes.

Ceci est un film de gros con.

Oh, pas de gros con amateur, hein. Je veux dire par là qu’il sait y faire Delbono, qu'il sait choisir les bonnes musiques, qu’il sait combien de temps il peut laisser durer une scène avant que sa nullité se voie trop fort - et qu’il sait déjà, en prenant son téléphone portable, ce qui passera et ne passera pas dans le cadre si bizarroïde du film-de-festival et de son public masochiste consentant. Il sait surtout les 36 façons dont il va pouvoir se branler sur le choix du support (« retour du néoréalisme », tu m’en diras tant) pour justifier sa bouse.

Ce film, c’est par exemple des extraits d’une émission TV où un docteur parle de l’obésité infantile (plutôt bien d’ailleurs), suivis de deux minutes de plans sur des sportifs faisant du tapis de course, avec au son une musique menaçante. Ou encore des plans sur des clochards qui dorment dans la rue, puis un plan sur des pubs pour kinder bueno, puis retour sur les clodos qui dorment. Ou encore : un plan sur un tag nazi qui dit que les musulmans sont des salauds, suivi d’un plan sur un bébé arabe tout mignon, dans le tram. Juste pour donner une idée du niveau…

Je pourrais faire tout le film comme ça, m’épancher sur l’incroyable fainéantise du réal "contestataire" italien qui pense qu’il lui suffit de filmer la TV nationale déplorable pour faire la démonstration du bien fondé de ses positions. Je pourrais disserter sur la complaisance à se filmer à poil, lui-même certes, mais aussi son "copain" aliéné qui n'a visiblement rien demandé, mais qui ne peut pas parler et donc pas se défendre.

Mais pour bien vous faire comprendre la teneur de l'ensemble, je vais plutôt m’arrêter sur cette scène magique où, venant filmer l’enterrement d’un jeune noir tué par deux commerçants, il s’attarde sur une fille (une proche de la victime, semble-t-il) entrain de pleurer dans les bras d’un ami. Une jeune femme à côté finit par lui demander d’arrêter de filmer cela, d'arrêter de se repaître de ça. Et l’autre con, portable tendu et voix assurée, de lui faire la morale en lui-disant qu’elle voit donc pas, cette grue, la différence entre loft story et ce qu’il fait, lui ; qu’elle confond tout, qu’il est là pour témoigner, lui - tout en continuant à filmer la fille qui pleure. Et de persister en ânonnant tout seul, sans couper sa caméra, « pays de merde, pays de raciste », soudain trop content de trouver un policier timide pour jouer au rebelle, policier qui lui demande juste de ne pas faire d’esclandre dans un moment pareil, pendant que les proches tentent de l’ignorer et de faire leur deuil. Mais c’est pas fini, il faut un point final à tout ça : le tout se termine par le réalisateur qui se filme, dans sa voiture, face à la mer, méditatif, avec une musique triste.

Film d’un gros tas de merde, donc, si représentatif d’une gauche bien sûre de ses idées et si paresseusement certaine d’être du bon côté, nous faisant la morale pendant qu’elle raisonne avec la finesse d’un collégien militant. Si on rajoute à tout cela la conscience si parfaite du B-A-BA à remplir pour donner des habits intellectuels à son film de vacance qu'on a monté en deux soirs…

Non, vraiment, c'est du grand art.

J'ai un joli contre-exemple pour toi (pas parfait, mais certaines idées sont magnifiques) :
http://www.imdb.com/title/tt0336693/?ref_=nm_flmg_edt_1

C'est court (20 minutes), et ça se regarde ici :
http://vimeo.com/11482249

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"Je vois ce que tu veux dire, mais..."
"Je me suis mal exprimé, pardon."

Il est quoi, à la base, le réal ?
Sinon oui, c'est un préjugé à la con, car il y a des tas de contre-exemples. Duras, Weerasethakul...

Merci pour le lien, je regarde ça ce soir ou demain.

Il y avait une rétro Delbono je crois à La Rochelle, je suis sur que tu ne t'es pas arrêté en si bon chemin

C'était une poétesse.



Mais c'est souvent vrai quand même.

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"Je vois ce que tu veux dire, mais..."
"Je me suis mal exprimé, pardon."

Y avait de quoi faire, oui, mais j'avoue qu'après ce film j'ai pas eu le courage d'insister...
J'aurais du persister pour Midi Z par contre (j'en reparle bientôt).

ah tu m'intéresses sur Midi Z, bcp aimé celui vu à Berlin. Tu as vu quoi ?

Un court intriguant tendance très bien, un long insupportable (Ice Poison) dont je suis sorti au bout de 20 minutes (ce que je ne fais absolument jamais). J'en reparle demain (pas de teasing, mais la flemme de réunir mes notes, là...)

Ice Poison c'est ce que j'ai vu je crois, alors là faudra tu m'expliques pourquoi tu sors au bout de 20 minutes.